Le nouveau monument dédié aux victimes du « génocide des Hutu en 1972 » érigé à Nyambeho en commune Giheta vient d’être détruit par l’administration provinciale. Les victimes et survivants assistent sans comprendre.
Sur la place où le monument était érigé, seul son socle reste visible. Les tubes métalliques qui supportaient le haut du monument ont été coupés à la meuleuse, seul un parterre de ciment témoigne l’emplacement où il avait été construit. Les quelques rares personnes qui ont assisté à cette destruction indiquent que le gouverneur de la province Gitega était là au moment de sa démolition.
« Il était avec les policiers. Pour couper le métal, ils avaient amené un poste à souder avec une meuleuse et ont emporté toutes les plaques métalliques », a précisé un homme qui affirme avoir tout vu. Pour lui, cette action de ce mardi soir montre que certaines associations n’hésitent pas à travailler dans l’irrégularité pour assouvir leurs intérêts.
« Même si nous avons été surpris de ces deux monuments construits face à face, personne ne viendra se plaindre pour sa destruction car ces gens qui se prétendent nous représenter abusent de notre ignorance », souligne-t-il. Cet homme qui a perdu son oncle dans les événements tragiques de 1972 affirme qu’il est déboussolé.
« Pourquoi se disputent-ils nos morts au lieu de s’occuper des vivants ou de leurs orphelins ? », s’interroge Diomède. A la question de savoir l’impact de ces querelles sur les victimes et les survivants des événements tragiques qui ont endeuillé le Burundi, beaucoup d’entre eux ne mâchent pas leurs mots.
Selon leurs propos, le gouvernement devait prendre en main la question de ces associations qui se réclament de telle ou telle cause.
« Beaucoup d’entre elles veulent profiter de nos malheurs. Ce qu’elles ne savent pas c’est que nous n’avons pas de diplômes comme eux, mais que nous avons des têtes qui raisonnent », avancent Fabien, un trentenaire.
La destruction était déjà programmée d’avance
Ni la population, ni l’administration, personne n’était favorable à l’édification de ce deuxième monument sur ce site de Nyambeho.
« Je suis pour l’édification d’un monument mais pas de cette manière. Je reconnais ces deux associations mais je n’aime pas leur façon de nous diviser », a confié un certain Grégoire. D’après lui, s’ils se réclament de la même cause, pourquoi deux monuments sur un même site ? » Ce septuagénaire n’est pas le seul à se demander sur le bien-fondé de ce monument construit à la hâte et dont personne n’a voulu expliquer sa signification.
Du côté administration, depuis la construction de ce monument, il y a trois semaines, le ver était déjà dans le fruit. En témoigne, la correspondance du gouverneur de Gitega du 28 Septembre n° 531.O6 /306/2018 l’intention de Déogratias Nkinahamira, chef de mission national du Collectif des Survivant et Victimes du Génocide Hutu de 1972.
Dans cette lettre, Venant Manirambona non seulement avait manifesté son désaccord pour un tel projet mais aussi il avait intimé l’ordre d’enlever cette pancarte dans un délai ne dépassant pas 8jours.
« Passé ce délai, l’administration provinciale sera dans l’obligation de l’enlever dans l’esprit de la sauvegarde de la cohésion sociale et les frais y relatifs seront à la charge de votre association », lit-on dans le 3ème paragraphe.