Profitant de cette saison des récoltes, les commerçants cherchent à tout prix à stocker plus de haricot. L’administration craint une envolée des prix qui pourrait occasionner des famines dans les mois prochains.
Chaque matin, au bord de toutes les routes entrant dans la ville de Gitega, les commerçants sont assis à deux ou à trois. Munis des balances et des liasses de billets de banque à la main, ils hèlent chaque passant qui porte un sac lui demandant s’il n’a pas de haricot à vendre. Au fur et à mesure que les heures avancent, le petit tas de haricot qui est devant eux prend de plus en plus des dimensions d’un monticule. Dans l’après midi, des camionnettes passent pour charger la marchandise vers leurs lieux de stockage. Cette situation inquiète beaucoup.
« Je sais qu’ils nous piègent mais nous n’avons pas d’autres choix », indique Anatolie Bizimana ,une femme qui venait de vendre 20kg de haricot.
Pour cette dame, la population rurale n’a pas le choix. Elle doit vendre sa récolte pour satisfaire ses besoins les plus urgents.
Même son de cloche chez Gaspard Bankinyakamwe :
« Je sais que les commerçants vont spéculer sur nous, mais je suis dans l’obligation de vendre le peu que j’ai récolté. J’ai besoin d’argent pour faire la commande des engrais chimiques. »
Le malheur des uns fait le bonheur des autres
La plupart des commerçants interviewés n’acceptent pas qu’on les taxe de spéculateurs. Ils affirment plutôt qu’ils profitent de la récolte pour faire marcher leur commerce. Pour eux, le prix est juste car ils ne gagneront pas beaucoup.
« Si nous les vendons à 800 Fbu le kilo nous ne gagnons presque rien à voir les loyers et les taxes », avance une dame commerçante assise devant sa balance. Tout en ne niant pas qu’ils risquent de créer la pénurie d’ici peu de temps, elle rejette l’idée de stocker ces haricots pour les revendre à un prix très élevé : « Même si je réussis à acheter 2 ou 3 tonnes, je ne peux pas faire des stocks, mon capital ne me le permettra pas. Peut-être ceux qui disposent beaucoup de moyens peuvent le faire. Je l’achète pour le revendre demain », s’en est-elle défendue.
Selon l’administration, cette pratique est difficile à gérer. On ne peut pas empêcher les commerçants d’exercer leur travail.
« Tout ce que nous sommes à mesure de faire, c’est la sensibilisation. Nous avons depuis longtemps donné les consignes aux chefs des collines d’expliquer à leurs administrés le bien fondé de conserver leurs récolte », a indiqué Gérard Nibigira ,conseiller principal du gouverneur de la province de Gitega. D’après cette autorité, dans les jours à venir, les prix sur le marché risquent de s’envoler et il sera difficile de les maîtriser.