Seules 31 coopératives « Sangwe » ont bénéficié des 10 millions BIF accordés par l’Etat. Les autres se disent exclues par la commune lors de la sélection. La commune Giheta souligne que l’enveloppe était uniquement destinée aux coopératives collinaires.
« Nous étions les premiers à soumettre le projet à la commune Giheta pour bénéficier du prêt de 10 millions BIF accordés par le gouvernement aux coopératives. Malheureusement, nous ne savons pas pourquoi notre dossier a été rejeté », lâche Sonia, membre de la coopérative de valorisation de cultures vivrières par les femmes(COVAC.VI).
Il est 9 h. Sur la colline Ruhanza de la commune Giheta, cette coopérative de femmes cultivatrices commence ses activités. Une dizaine de femmes sont arrivées.
Claudette Siniremera, présidente de COVAC.VI, ne décolère pas : « Nous pensions que les femmes seraient les premières à bénéficier de ce prêt de l’Etat. Mais, c’est plutôt la coopérative « Sangwe » qui a été privilégiée.»
Cette responsable déplore le manque de transparence des critères de sélection de la coopérative à soutenir. Et après la sélection, poursuit-elle, la commune n’a pas publié le nom de la coopérative bénéficiaire du prêt.
Cette mère de trois enfants confie que sa coopérative oeuvrant dans le domaine de l’agriculture et l’élevage depuis 2017 est la première à voir le jour sur cette colline. Elle réunit les femmes de la zone Giheta et Kiriba.
De surcroît, explique-t-elle, la COVAC.VI dispose d’une expérience dans la préparation et la gestion des projets. Elle ne comprend pas comment une coopérative nouvellement créée a pu rafler le financement sur toutes les collines de la commune Giheta.
Manque de transparence des critères de sélection
Même son de cloche chez 35 associés dans la coopérative Miroir de développement de Musama. Cette dernière s’engage dans le développement économique et social durable en mettant l’accent sur la myciculture. « Nous ne comprenons pas pourquoi la commune n’a pas soutenu notre projet, car nous remplissions les conditions exigées», fulmine Félix Nayigihugu, trésorier de ladite coopérative.
Ce jeune homme balaie d’un revers de main les raisons avancées par les administratifs pour justifier le choix de la coopérative « Sangwe ». Selon ces derniers, la coopérative « Sangwe » a gagné parce qu’elle est inclusive. Pour lui, cet argument ne tient pas vu que « la population de cette colline n’est pas membre de ladite coopérative ».
Il souligne que sa coopérative est inclusive. Tous les membres sont natifs et habitent sur la colline Musama. « Pourquoi créer une nouvelle coopérative alors qu’il y avait une autre sur cette colline ?», s’interroge-t-il.
D’après ce représentant, il y a plusieurs zones d’ombre dans la sélection de la coopérative « Sangwe ». D’abord, la commune n’a pas lancé un appel au dépôt de projet. Ensuite, les critères de sélection ne sont pas connus.
Les membres de certains partis politiques se disent exclus
« Nous étions au courant. Cette enveloppe était exclusivement destinée aux coopératives « Sangwe». Nous n’avons pas soumis notre projet », confie Jean Claude Ndayisaba, président de la coopérative de commerçants « Badandaza Terimbere » de Kibimba.
Ceux qui vivent dans le camp de déplacés de Ryangoni se sentent exclus. « Les membres des autres partis politiques sont exclus d’office. La coopérative « Sangwe » est gérée par les responsables collinaires du parti Cndd-Fdd. Ici, la majorité sont des Upronistes, témoigne l’un des déplacés. Ceux qui sont membres de la coopérative « Sangwe », poursuit-il, se comptent sur les doigts d’une main. Cette source sous couvert d’anonymat fait savoir que toutes les informations concernant cette coopérative sont transmises lors des rencontres du parti au pouvoir.
« Dans toute la commune de Giheta, 31 coopératives collinaires « Sangwe » ont bénéficié de ce crédit », indique Benjamin Niragira, conseiller technique chargé du développement de la commune de Giheta. Il fait savoir que ces coopératives remplissent les conditions exigées. Elles sont également inclusives.
La commune rassure
Ce responsable communal affirme que les projets soumis par la coopérative COVAC.VI et celle des jeunes de Musama ont été rejetés. Il rappelle que l’Etat a prévu de financer uniquement les coopératives collinaires. Et d’expliquer : « Cela signifie que les coopératives existantes composées de membres originaires des collines différentes ne sont pas concernées.»
M. Niragira déplore le comportement de certains membres des coopératives existantes refusant d’adhérer aux coopératives collinaires « Sangwe » pour aider les autres dans la mise en œuvre des projets de développement.
Pour rappel, chaque coopérative collinaire du Burundi a bénéficié d’un fonds de dix millions BIF. Un prêt qui a été accordé par le gouvernement du Burundi et qui est remboursable endéans deux ans sans intérêt. Et ce conformément à une ordonnance ministérielle conjointe du ministère de l’Intérieur et celui des Finances sur les modalités pratiques de répartition, de transfert, d’utilisation et de remboursement des fonds alloués au développement des collines.
Les coopératives « Sangwe » sont implantées dans les 2.639 collines du Burundi et 30 milliards 200 millions BIF ont été distribués sur tout le territoire national.