Dans « témoin des grands lacs », des individus installés dans un autre pays des grands lacs donnent un témoignage de leur vécu. Josette Kwizera, une jeune rwandaise, masseuse à Bukavu en RDC explique son processus d’intégration. Pour lui, les Rwandais vivent et travaillent tranquillement. Elle encourage les autres et appelle à la pacification de la sous-région.
Pourquoi le choix de la RDC ? Comment a-t-elle pu s’installer ?
Je suis venue pour chercher la vie. C’est pour travailler. Avant de venir ici en RDC, j’avais peur à cause de l’insécurité rapportée dans plusieurs localités. J’ai cherché quelqu’un qui peut m’accompagner. L’individu qui m’a emmenée est habitué d’ici.
Elle m’a convaincue et j’ai décidé de venir. J’avais su qu’il n’est pas facile de s’adapter sans parler français ni swahili. Mais j’ai pris la décision. En entrant, j’ai trouvé que c’est normal. Tout ce qui se dit sur la RDC n’est pas vrai. Ma famille, mes amis, avaient peur. Jusqu’aujourd’hui, ils me demandent comment est la situation et comment j’ai pu m’adapter. Je leur réponds que c’est normal.
Rien de spécial ni d’inquiétant. Nous sommes comme les Congolais. Personne ne nous intimide ni nous demande quoi que ce soit. Lorsqu’on a des documents, ça suffit.
Lorsque vous évoquez de l’insécurité, ce sont vos amis où c’est vous-même qui le constatez ?
Ce n’est pas mes voisins car mon père est à Kigali. Beaucoup ne connaissent pas totalement la RDC. Ce sont mes collègues de services là où je travaillais avant de venir ici qui me le disaient. Donc c’était des amis et collègues qui me décourageaient à chaque fois que je montrais mon intention de m’installer à Bukavu. Ils me disaient : il ne faut pas y aller. Tu ne connais pas l’endroit, on peut te faire ceci ou cela. Ce n’est pas la famille et les voisins.
Tu te retrouves en RDC. Qu’est que vous avez trouvé de différence par rapport à ce qu’on te disait et ce que tu vis ?
Ici en RDC, on nous laisse tranquille pour travailler. Même pendant la nuit, quand on a des documents personne ne peut t’inquiéter. On les demande même rarement. Les Congolais sont nos amis et collègues. En général, ils sont accueillants et généreux. Si c’est la nuit, il peut y avoir des bandits à l’extérieur, mais c’est normal partout.
En tant que citoyenne rwandaise, que fais-tu précisément ? Des Congolais, sont-ils satisfaits par ton service ?
Je suis un réflexologue professionnel. Donc mon boulot, c’est faire du massage. Des Congolais viennent pour le service sans considération de la nationalité. Ils saluent mes bons services tout simplement. Je me sens à l’aise dans mon travail.
Même à Kigali, je travaillais avec des Congolaises. Ils sont satisfaits par le service que je sois rwandaise ou congolaise, cela importe peu.
Il vous a été facile de vous intégrer et de ne pas vous sentir seule ?
Ça n’a pas été facile du tout. Quand je négociais le poste, c’était en français. Je n’étais pas à l’aise, car la langue m’était difficile. Il m’a dit de m’habituer à parler swahili. J’ai commencé à l’apprendre et on rigolait beaucoup.
C’était trop difficile, mais je me suis concentrée. Après cinq mois, je parlais swahili. Le français suivait, car il y a des clients qui parlent français. J’ai essayé d’améliorer et j’ai réussi.
Trois ans après, tu parles parfaitement français et swahili. Aviez-vous un prof pour les cours du soir ?
Non. J’ai appris de mes clients et de mes collègues de service. Pas vraiment d’une aide d’un enseignant.
Quel est votre regard sur les tensions dans la région des Grands Lacs ?
Il y a des crises. Des conflits s’observent entre les pays. C’est nous les citoyens qui souffrons, mais les politiciens sont bien. Nous avons des problèmes, mais eux sont satisfaits.
Nous devons nous aimer les uns des autres. L’un a besoin de l’autre. On n’est pas un ennemi. Nous devons développer la complémentarité. Les Congolais ont besoin des Rwandais et vice-versa. Il y a du boulot en RDC, au Burundi et au Rwanda.
Il faut vivre en harmonie et en paix. Nous ne devons pas céder aux sollicitations des politiciens qui nous entraînent dans des crises.
Il faut travailler beaucoup. Ne pas voir un Rwandais, un Congolais et un Burundais comme un ennemi. J’appelle des burundais et congolais de venir en RDC pour travailler. Il y a de l’argent. L’insécurité peut se rapporter pour tout. Des gens sont bien ne vous inquiétez pas. J’ai l’expérience de trois ans et demi.
L’émission Génération Grands-Lacs est un rendez-vous hebdomadaire par les jeunes et pour les jeunes. C’est une occasion pour les jeunes de données leurs avis et contribution sur des questions de leur région.
C’est une production de Search for Common Ground en collaboration avec les radios, Bonesha FM de Bujumbura, radio Isango star de Kigali, mama radio de Bukavu, la radio notre dame de Tanganyika, RNDT d’Uvira et la radio Kivu star de Goma.