Le rôle de la société civile dans la promotion de la paix est mitigé selon les jeunes de la région. Selon les experts, les organisons sont les piliers de la démocratie si elles jouent pleinement leur rôle.
La région des Grands Lacs vit des conflits communautaires et entre pays depuis des années. Face aux tensions récurrentes, quel rôle des organisations de la société civile ? L’émission Génération Grands Lacs revient sur comment les jeunes apprécient le rôle que jouent les organisations de la société civile dans la promotion de la paix.
Pour les jeunes de Kigali au Rwanda, certaines organisations de la société civile sont actives, mais d’autres ne remplissent pas pleinement leur rôle. « Il y a plusieurs organisations qui ne font rien. On ne voit pas d’impact dans la consolidation de la paix. Sauf quelques-unes qui organisent des cessions pour comprendre les divisions entre jeunes. Elles œuvrent pour les unir, car ce qui nous unit est plus important que ce qui nous sépare », a indiqué une jeune femme de Kigali.
Pour son concitoyen, ces organisations jouent un rôle prépondérant. Elles permettent de rapprocher les membres des communautés. « Ces organisations de la société civile jouent un grand rôle parce qu’elles organisent des groupes de dialogue et de rencontre pour combattre les messages de haine qui circulent dans la région. Elles organisent également des conférences et a un impact positif », a indiqué une jeune femme de Kigali.
Une autre jeune de Kigali dit apprécier le débat et conseil organisé par la société civile pour approfondir le dialogue et renforcer les relations dans la société. Pour elle, les assises organisées sont d’une importance capitale.
Les jeunes de Bukavu en RDC affirment quant à eux que ces organisations travaillent pour la paix. Ils rappellent notamment des marches manifestations pacifiques pour aider la population à revendiquer leurs droits.
Ils parlent globalement de la résolution des conflits par la non-violence est très appréciée. « Nos impressions sont bonnes par rapport à la société civile. Leur travail la paix est louable », a précisé une jeune de Bukavu.
Son concitoyen dépeint un tableau noir. Pour lui, les résultats ne sont pas palpables. Comme preuve, il parle de l’insécurité dans la ville de Bukavu. Pour lui, ces organisations doivent revoir leurs missions pour satisfaire la société.
La société civile face aux défis
André Baduniya, coordonnateur provincial de la nouvelle société civile du sud Kivu, estime que cette dernière joue un rôle indispensable dans la promotion de la paix. Toutefois, il relève certains obstacles qui entravent leurs actions. Il a parlé notamment le manque de moyens financiers. « Les organisations de la société civile ont plusieurs objectifs. Malheureusement, certaines n’ont pas de moyens ».
Pour lui, quand on parle de la région des grands lacs, il faut se déplacer au Burundi, au Rwanda, en République démocratique du Congo. Il a apprécié la libre circulation des personnes entre les pays de la région. « Au Sud Kivu, les Burundais et les Rwandais vaquent à leurs occupations. C’est la même situation que les Congolais au Rwanda et au Burundi. A Uvira, ce sont les Burundais qui font les petits travaux (petit commerce, petits travaux ménagers. Des perturbations qu’on observe sont causées par des groupes armés et des milices burundais, rwandais ou congolais », a-t-il témoigné.
Pour lui, la société civile joue son rôle de sensibilisation et de plaidoyer pour amener les États à prendre des décisions qui s’imposent. Il appelle les gouvernements de la région que les peuples sont condamnés à vivre ensemble. Les politiciens, les acteurs sociaux doivent mettre de côté leur tendance pour regarder dans la même direction pour assurer la paix et la cohésion sociale.
Connaitre la philosophie de la société civile
Selon Guillaume Ndayikengurutse, professeur de Science politique et relations internationales à l’université du Burundi, les organisations de la société civile dans la région doivent être conscientes des difficultés que connaissent nos sociétés. « Nous sommes dans des sociétés pleinement divisées sur des clivages politiques, ethniques. Elles doivent tout faire pour aller au-delà de ces clivages et essayer de défendre des causes positives d’une manière transversale. C’est un défi pour ces organisations ».
Selon ce politologue, en principe, la société civile est une actrice incontournable dans la promotion de la paix et de la démocratie. Il y a nécessité d’ouverture d’un espace démocratique, car les Etats vont vers la fermeture de l’espace civique. Par-là les actions de la société civile se retrouvent mises en cause.
Les gouvernements devraient considérer les organisations de la société civile comme des adjuvants et non comme des ennemis. La société civile, dit-il, joue un rôle de subsidiaire. Elles sont des partenaires des gouvernements pour la consolidation de la paix et de la démocratie.
Pour Guillaume Ndayikengurutse, beaucoup de gens veulent s’embarquer dans les sociétés civiles sans connaître réellement sa philosophie. Ces organisations doivent, dit-il, prendre une certaine distance par rapport à la conquête de pouvoir, mais également à la quête du gain matériel. « Malheureusement, certaines organisations versent dans des luttes politiciennes autour de la conquête du pouvoir, mais aussi pour leurs intérêts financiers. Tout cela fausse la philosophie de la société civile et l’empêche de jouer son rôle », a-t-il conclu.