Il y a presque deux mois, le ministère de la Solidarité avait encouragé les victimes des inondations à regagner leurs ménages. Les endroits inondés commencent à s’assécher mais aucun retour.
Lundi 3 août, certains quartiers de Gatumba qui sont au bord de la RN4 offrent un spectacle différent. Des maisons, des églises ou des écoles, jadis au milieu des eaux. Aujourd’hui, la grande saison sèche est passée par là, les eaux ont disparu.
A proximité, les sites où ils ont été déplacés, depuis avril, restent pleins. Aucun ménage n’a encore regagné son quartier. Au mois de juin, le ministère de la Solidarité avait exhorté ces sinistrés à rentrer chez eux dès que les inondations disparaissent.
Nous sommes dans le site de Kigaramango, qui abrite une grande partie des victimes : plus de 13 mille personnes, soit plus de 2500 ménages. Des taxis-vélos sont stationnés devant l’entrée du site à la recherche d’un client éventuel. Il faut parcourir plus de 2 km à pied pour arriver sur la route principale.
A l’intérieur du site, des milliers d’abris de fortune couverts par des bâches ou des lambeaux. Chaque famille est dotée d’une petite tente. Les sinistrés déambulent ici et là, la plupart semblent désœuvrés. Quelques-uns ont initié un petit commerce de charbon, de fruits, etc. Ces victimes ont l’air désespérés, affamés. La dernière fois qu’ils ont reçu une assistance en vivres, c’était en juin.
Des sinistrés munis de bidons font la navette à la recherche d’eau potable, une denrée rare dans le site. Les maladies dues à la mauvaise hygiène sévissent. Quatre morts sont signalés.
« Rentrer oui, mais où et comment ? »
Interrogés, ces sinistrés affirment qu’ils désirent retourner chez eux. La vie dans le site est insupportable, d’après eux. « Mais rentrer où et comment ? Nos maisons ont été détruites, les champs emportés. Il nous faut des moyens pour reconstruire et reprendre nos activités».
Certaines victimes demandent en urgence des matériaux pour reconstruire leurs maisonnettes. D’autres estiment qu’il faut plutôt maîtriser la rivière Rusizi avant de les faire rentrer. Pour une mère de huit enfants, même si l’Etat faisait l’effort de leur fournir des matériaux de construction, ce serait peine perdue. Les précipitations seront bientôt de retour.
Un homme âgé du site déplore que les eaux aient emporté tous ses champs. C’est la seule source de revenus qu’il avait, comme plusieurs autres victimes. « Si nous devons retourner dans nos ménages, il nous faut une certaine somme d’argent pour survivre pendant les premiers jours. Donc louer des terrains à cultiver».
Un des gérants de ce site, qui travaille à la Croix-Rouge, propose de construire une digue autour des quartiers vulnérables pour freiner les eaux de la Rusizi. « Inutile de les faire rentrer avant de maîtriser la rivière».
Dans une interview accordée à Iwacu il y a quelques jours, l’expert en environnement, Tharcisse Ndayizeye, a estimé que le gouvernement devrait trouver de nouvelles terres dans une autre zone non inondable pour ces déplacés. Pour lui, la délocalisation pure et simple de ces habitants de Gatumba est la seule solution durable. Les inondations ne vont pas s’arrêter, explique-t-il, vu que le changement climatique est devenu irréversible.