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Frère Emmanuel Ntakarutimana : « … la peine de mort abolie, il n’y a plus d’exécution possible, même au niveau judiciaire »

05/05/2013 Commentaires fermés sur Frère Emmanuel Ntakarutimana : « … la peine de mort abolie, il n’y a plus d’exécution possible, même au niveau judiciaire »

Comment fonctionne la CNIDH ? Et surtout, quelle est sa position officielle sur les cas d’exécutions qualifiées d’extrajudiciaires par les Nations Unies mais que le gouvernement burundais ne nomme pas ainsi ? Quel est la situation actuelle des droits de l’Homme au Burundi ? Frère Emmanuel Ntakarutimana, président de ladite commission, explique.

<doc5568|right>{Quel regard portez-vous sur la situation des droits de l’homme au Burundi ?}

Le Burundi essaie de sortir de quatre décennies de violences massives qui ont généré, entre autres l’impunité. Après les élections de 2010, l’espace politique s’est rétréci. Depuis l’année 2012, on assiste à un essai de rapprochement. Mais on s’est beaucoup inquiété à propos des exécutions extrajudiciaires qu’il y avait…

{Vous dites souvent que la CNIDH n’est ni un organe du gouvernement ni de la société civile ?}

En fait, l’institution nationale telle que définie par l’ONU, est une commission qui, dans sa racine, doit s’attacher aux principes des droits de l’Homme. Et ceci doit aller au delà des personnes, des systèmes et des sensibilités politiques, ce qui demande, pour une institution comme celle-là, qui recrée une culture des droits de l’Homme au niveau national, qu’elle soit une commission étatique sans être gouvernementale. Cela lui donne une fonction d’interface où on a, pour une fois, une institution de l’Etat qui se trouve entre le gouvernement, les autres institutions étatiques, la communauté internationale, la société civile et la population.

{Quels sont les défis auxquels la commission fait face aujourd’hui ?}

Il y a des défis qu’il ne faut pas faire mention du faite qu’ils sont connus. C’est notamment la question des moyens vu les ressources limitées de l’Etat. Mais en circulant un peu partout dans le pays, en écoutant les gens, il y a la question de la connaissance de la loi, des instruments de protection et de défense des droits de l’Homme qui est cruciale, même au niveau des administrations. Nous nous en rendons compte. C’est difficile de faire respecter et de promouvoir les droits de l’Homme si les gens les ignorent.

{Que faut-il faire dan ce cas ?}

Nous pensons qu’il y a un travail de sensibilisation, de formation et de promotion qu’il faut faire aujourd’hui. Nous souhaiterions même que les organisations de la société civile aident beaucoup en ce sens. Elles ont beaucoup investi dans le rôle de dénonciation et de protestation, ce qui est une bonne chose, mais en amont, il y a un travail de formation qui est nécessaire. En plus de ça, lutter contre l’impunité face à un Etat qui s’est construit sur cette logique, c’est une grosse machine dont il n’est pas toujours facile de renverser la vapeur. Les gens s’attendent à ce que les autorités donnent des signaux forts pour arrêter cela. Mais ça demande une grande détermination, car même si on est au sommet de l’Etat, et qu’on commence à lutter contre l’impunité, les mécanismes de protection ne sont pas toujours assurés. D’où la grosse question de protection de ces volontaristes politiques qui veulent que les choses changent. Mais aussi la protection des victimes et des témoins si on veut réellement s’engager dans une justice qui soit efficace.

{Quelle est votre position face à la question des exécutions extrajudiciaires ?}

La définition qui a guidé l’institution du procureur général dans la confection d’un rapport sur les exécutions extrajudiciaires, est celle qui avait été donnée par un rapporteur spécial. Mais c’était sur des cas précis liés à l’Afghanistan et à Israël, où on partait de ces assassinats ciblés, un des éléments de la panoplie des exécutions extrajudiciaires. C’était relatif à ces avions-drones que l’on utilise pour l’élimination des cibles bien précises. Mais ce n’est pas ce genre de définition qui s’appliquerait à ce qui est en train de se passer au Burundi. Il y a nécessité de poursuivre le dialogue sur la définition des exécutions extrajudiciaires.

{Que voulez-vous dire par « ce qui se passe chez nous » ? }

C’est clair que si les gens se trouvent entre les mains de responsable des institutions de l’Etat, et qu’ils disparaissent, à moins que les organes habilités de l’Etat ne prennent leurs responsabilités tout de suite pour punir le coupable et montrer qu’il agit à titre privé, c’est difficile de ne pas affirmer qu’il n’y ait pas d’exécution extrajudiciaire. C’est le cas notamment de Joël Ndereyimana que nous avons traité au niveau de la commission. A Gihanga, la population remet une personne dans les mains de la police, le lendemain on la retrouve morte dans un champ de riz. Il faudrait que la police explique ce qui s’est passé. Des cas comme ceux-ci il y en a dans tout le pays. Il faudrait que la question soit prise au sérieux. D’ailleurs, du moment que la peine de mort a été abolie, il n y a plus d’exécution possible, même au niveau judiciaire.

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