Vendredi 22 novembre 2024

Société

« Foyer heureux » : plus qu’un groupe WhatsApp, une thérapie

16/01/2023 9
« Foyer heureux » : plus qu’un groupe WhatsApp, une thérapie
Avec ce groupe, une liberté de de parole s’est créée.

C’est le nom d’un groupe WhatsApp, actuellement sur toutes les lèvres des femmes mariées de Bujumbura. Un véritable phénomène avec plus de 4000 femmes membres. Son objectif : donner de la voix aux femmes pour discuter, échanger sur la meilleure façon de faire de leurs toits conjugaux un « havre de paix ». Les membres approchés saluent l’impact que cet espace a eu sur le développement et l’épanouissement dans leur vie de femme. Découverte.

« Se coltiner l’écran à regarder les films, non! Je ne voulais pas», raconte Mme Liliane Irimukunze, l’iniatrice de cet espace de de discussion. Alors résidente à Kigali où elle était confinée, suite à la pandémie de Covid-19. C’est à ce moment qu’une idée lui traverse l’esprit : partager avec ses amies les enseignements reçues de la sœur Immaculée. Chrétienne pratiquante, l’initiatrice dudit groupe WhatsApp est une fervente fidèle de la Famille Espérance (FAES). «Certes, je voyais qu’il y avait matière à discuter. Mais dans mon for intérieur, je ne cessais de me demander si cela sera attrayant pour les Burundaises. C’est ainsi que j’ai essayé de cadrer le contenu des discussions en l’adaptant à la culture burundaise ». Le 1er groupe est uniquement constitué de ses amies, proches parentés, anciennes camarades de classe, etc. Au fil des jours, elle va commencer à recevoir des demandes d’autres femmes pour adhérer à son groupe WhatsApp. Le début d’une aventure. Actuellement à son 11e groupe, c’est une communauté de plus de 4000 femmes qu’elle gère. Quid des discussions ? « C’est tout ce qui se rapporte à la vie du couple marié en général, les astuces qu’une femme est appelée à mettre en œuvre afin que la vie sous le toit conjugal soit le meilleur endroit possible ».

Une fois l’espace de discussion créé, elle indique qu’il restait de trouver une bonne manière de le réguler et de cadrer les discussions du forum, l’idée étant que tout le monde se confie à cœur ouvert. Elle fait savoir qu’au début, certaines membres ne s’accordaient pas sur la démarche à suivre pour garder l’anonymat de celle qui se confie et la confidentialité de ses doléances. « Faire tout en sorte que ce que tu endures ne soit pas déballé sur la place publique, c’était la grande question », se souvient -elle. Pour parer à tout ébruitement, après consensus, Mme Irimukunze indique qu’elles ont décidé d’un commun accord avec les membres de mettre en place des filtres : « Celle qui a besoin de se confier m’écrit dans ma boîte personnelle (Inbox). En fonction de la doléance, avant de la soumettre dans le groupe pour d’éventuels conseils, échanges, je me dois de trouver la bonne formule à utiliser afin que nul n’ait une idée de qui cela pourrait être.» Ainsi, explique Mme Irikumukunze, après échanges /débat entre paires, la membre peut revenir vers moi si elle est restée sur sa soif.

Libérer la parole

Bientôt trois ans que ce groupe WhatsApp existe. Ce qui était un espace pour blagues entre copines représente toutes les couches sociales des femmes burundaises. Avec 11 groupes WhatsApp créés sous le label « Foyer Heureux », son administratrice principale projette de créer un 12e. « Mais, je pense qu’il sera le dernier parce que la régulation du fil des commentaires devient difficile », glisse-t-elle. Pour intégrer le groupe, il suffit d’introduire la demande auprès des administratrices, surtout être une femme légalement mariée. « Les veuves, les femmes divorcées, idem pour les filles en âge de se marier ne sont pas acceptées. » Mme Irimukunze explique qu’il n’y a rien de discriminatoire : « La raison c’est qu’il y a certaines thématiques, comme celles liées à la sexualité, qui les inciteraient à la débauche. En outre, dans la communauté Famille Espérance, il y a des enseignements qui leur sont destinés.»
L’essentiel des enseignements partagés étant centrés sur quelques chapitres de Fascinating womanhood (féminité fascinante), un livre qui parle du comportement de la femme, de sa façon d’être pour la bonne marche de son foyer familial. Et ce, sur tous les plans de la vie conjugale.

L’initiatrice du groupe explique que contrairement à ce que pensent certaines féministes, l’objectif de « Foyer Heureux » n’est pas d’apprendre aux femmes comment manipuler leurs maris. « L’approche consiste à se connaître d’abord en tant que femme, à comprendre ta féminité, les valeurs, l’image que tu te dois d’incarner, comment remplir tes responsabilités en tant que femme, etc. Sans oublier toutes ces astuces afin de ne pas tomber dans le carcan quotidien d’une femme qui ne fait plus rien pour plaire à son mari».

Ainsi de par différents témoignages, la plupart des gens qui se marient possèdent une idée préconçue de ce que sera leur ménage alors qu’il se construit au jour au jour. « C’est cela que l’on essaie de déconstruire, car, avec l’expérience, nous avons vu que certains couples implosent suite à l’ignorance des femmes ». En témoignent certaines préférant se murer dans le silence, en boudant leurs maris sous prétexte qu’ils rentrent tard ou ivres.

Des témoignages éloquents

Même les femmes d’un certain âge participent au débat.

En tête des listes des sujets de discussion : l’infidélité et les maris qui ne s’acquittent pas de leurs responsabilités comme il se doit.
Certaines femmes approchées ne tarissent pas d’éloges sur cet espace de discussion. La trentaine S.D. est une de celles -là. Outre qu’il a contribué grandement à sauver son mariage, c’est un cadre qui lui a permis d’ouvrir les yeux.

Avec un mari très nocturne, cette jeune femme confie avoir commencé à soupçonner son mari d’entretenir une maîtresse. Quand elle lui demandait où il pouvait être à 1h du matin de lundi à vendredi, son mari piquait une crise de colère. C’était devenu un rituel, avant qu’elle ne découvre la cause. « Un jour, je suis tombée sur une discussion dans le groupe concernant la préparation d’un plat. Le week-end qui suit, je me suis dit pourquoi pas ne pas le faire à la maison ». Peu tentée par l’idée de cuisiner, elle se rappelle que son mari l’a regardée étonné. « Il n’en revenait pas, car, en 3 ans de mariage, il ne m’avait jamais vu prendre de telles initiatives », confesse-t-elle, avant de poursuivre : « Ce jour-là après le dîner, dans ses yeux, j’ai vu transparaître une admiration que je n’avais vu que lorsqu’il me faisait encore la cour. Tellement émerveillée, je lui ai demandé s’il avait aimé. » Elle se souvient, tout sourire, qu’il n’a pas arrêté de hocher la tête. En l’enlaçant, il lui a glissé : « Si tu le fais souvent, je ne quitterai plus la maison. » Une parole tenue. S.D. témoigne que quelques jours après, son mari lui a avoué qu’il ne supportait plus la cuisine de la maison, il préférait aller manger dehors.

A l’instar de L.G., elles sont plusieurs à témoigner que l’espace de discussion les a fait grandir, permis de s’améliorer. « Le problème avec certaines, c’est qu’elles prennent pour acquis le fait de se marier, et commencent à se négliger. Une fausse idée», prévient H.M, membre du groupe, qui enchaîne : « La plus-value avec le groupe, c’est que tu peux dire tout haut sans que tu sois la risée de quiconque ». Pour elle, c’est une bonne chose parce que cela nous permet de nous ouvrir, d’avoir la parole libérée avec cette certitude que tu as le soutien de tes paires.»

Preuve du succès toujours grandissant de cet espace dans le cœur des femmes de Bujumbura, Mme Irimukunze confie que, désormais, ce sont leurs maris qui la contactent pour introduire leur demande d’adhésion. « Une chose inhabituelle pour nous, car, en intégrant le groupe, il y a cette consigne de ne rien dire à son mari», conclura-t-elle.

Forum des lecteurs d'Iwacu

9 réactions
  1. Didier K

    C’est vraiment interessant de lire les commentaires des mecs sur un article concernant la femme. Clairement le Burundais n’a rien compris, meme en 2023!!!! Pour info, je vis dans une société dans laquelle on continue d’avancer vers une égalité entre homme et femme, et croyez mois messieurs, restez ou vous habitez car vous auriez des soucis. Je vous donne un exemple: De toutes les couples qui sont venus s’installer ici, une grande majorité est divorcé, car une fois arrivée ici, et bien la femme a vite rejoint et dépasser le Burundais qui a vu son ancien monde disparaitre, qui a tout perdu pedant que son épouse ne pouvait que monter!

    S’il vous plait, cessez d’utiliser les religions car ces bouquins saints(les bibles, le coran et le Torah) ont été écris par l’homme et surtout, pour l’homme!

  2. Bellum

    Captivante lecture et découverte d’une grande dame cette Liliane Irimukunze qui apparaît comme une leader née. Deux points m’ont interpellé : 1. Fascinating Motherhood (Fascinante féminité) 2. Plaire à son mari.
    Je vais peut-être choquer mais je me pose des questions existentielles sur la condition de la femme depuis que ma fille, une universitaire et rigoureuse intellectuelle, m’a dit récemment qu’enfant, elle passait la nuit à pleurer en demandant que Dieu la transforme en garçon. De même, ma nièce préférée, véritable icône de la beauté et mère de 2 filles adolescentes m’a profondément bouleversé en m’affirmant : « être une femme est une malédiction divine.»
    Commençons par le point le plus simple et le moins existentiel : Plaire à son mari.
    Je n’ai jamais entendu à l’Eglise l’injonction paulienne « Femmes ! Soyez soumises à vos maris » sans que j’ai envie de sortir furieux. Les femmes et les hommes sont égaux bon sang ! Personne ne doit être soumise à quiconque. Le devoir de plaire à son mari m’a autant révolté. C’est un combat perdu d’avance et les femmes sont toujours perdantes. L’amante, belle et sexy, à la poitrine haletante, pour parler comme Francis Bebey, qui a séduit l’homme et désormais une maman abimée par les maternités et le poids des responsabilités familiales. Sans oublier la passion et la flamme qui s’émoussent après quelques temps. Les minettes à la taille de guêpe et aux fesses d’enfer de nos villes mettront le feu aux sens des maris que Dieu a puni de ce désir incontrôlable, irrésistible, irrépressible, insatiable et….animal. Aucune mère au foyer ne peut l’apaiser, d’où la multiplication des maitresses, girl friends et autres deuxième, troisième bureau.
    J’habite dans un pays où la polygamie est légale et la plupart des hommes importants et riches ont 2, 3, 4 femmes. Mais cela n’empêche pas qu’ils collectionnent des maitresses car la passion et la flamme s’estompent rapidement même pour la 5ème femme. Les hommes sont ainsi faits et Dieu dans sa grande sagesse a peut-être voulu distribuer des revenus puisqu’il anticipait la marginalisation et la pauvreté économique des femmes. Une maitresse interrogée il y a longtemps par Iwacu affirmait qu’elle est mieux traitée que la femme officielle restée avec les enfants dans la belle maison. Un adage prétend qu’un homme veut deux femmes à fois : sa maman à la cuisine et une p. au lit. La mère des enfants ne peut être ces personnages à la fois, dame Liliane Irimukunze se trompe. La seule chose importante est l’engagement car la famille est une chose importante, le reste les hommes de débrouillent comme ils peuvent. Les femmes savent que l’important c’est la famille et non la bagatelle. Sauf les occidentaux qui divorcent sans scrupule lorsque la passion et la flamme disparaissent.
    Venons-en alors à terrible condition féminine.
    J’ai eu de la peine lorsque ma fille aînée a eu ses règles à 11 ans. Comment peut-on perdre l’innocence de l’enfance à ce jeune âge alors que les garçons ont tout facile dans la vie. Le professeur de Kirundi, feu Abbé Nkanira enseignait que le mot umugore (femme) vient du verbe kugorwa (souffrir). Un professeur ami aujourd’hui disparu me disait qu’il s’offre toujours une bière lorsqu’il se souvient qu’il n’est pas une femme. Ma fille dont je parle plus haut pleurait de ne pas avoir de zizi. Le complexe de manque que Freud a étudié et décrit. Comme alors ne pas se poser des questions existentielles sur la femme si elle entre dans la vie avec un genre qu’elle refuse et qu’elle sait pénible et fait de souffrances jusqu’aux horribles souffrances de l’enfantement. Ma fille, brillante professionnelle, à qui tout réussissait : maitrise européenne avec grande distinction et travail international, a piqué une grande dépression au summum de sa carrière. Je me surprends à penser que c’est peut-être son refus du genre difficile et pénible qui a provoqué la dépression.
    Les Burundaises ont au moins la chance de ne pas subir comme ailleurs en Afrique, l’horreur des mutilations génitales féminines. C’est une barbarie sans nom de voir de petites filles souffrir le martyr pour rien. Au Burundi on coupe les têtes des petites filles, une barbarie politique mais pas leur sexe, une sauvagerie primitive. Fascinating Motherhood disait Liliane Irimukunze. Existe-t-il une femme heureuse de cette condition pénible et douloureuse ? Dieu est injuste.

    • Yan

      J’aime bien vos commentaires dont je suis du même avis de temps en temps, et surtout pas cette fois-ci. Mais je sens chez vous un caractère très narcissique: bel homme que vous êtes, fille surdouée que vous avez, nièce éligible au concours de miss monde, etc. On sent que vous avez horreur de la modestie!

    • Kaziri

      @Bellum

      Dieu n’est pas injuste. Je vous donne ci-dessous un extrait du livre d’une mystique française, Marie Lataste, à qui Jésus a confié plusieurs choses. Comme dans votre parcours vous avez fait un passage au Petit Séminaire de Mugera, vous savez sans doute que Jésus est le chemin, la vérité et la vie. L’extrait en question porte sur le qualificatif de chemin.

      « Je veux, ma fille, vous faire connaître ces trois voies, et distinguer entre elles celle qui m’appartient et que doivent suivre ceux qui veulent venir à moi.

      « La première voie est large, commode et très-pratiquée. Satan en a tracé le sillon dans le paradis terrestre, et le pécheur, esclave de Satan, marche dans cette voie. Elle est bordée de fleurs; mais ces fleurs, que fait germer l’enfer et non le ciel, cachent des épines qui donnent la mort. L’homme s’y nourrit d’un miel sauvage dont le goût paraît suave, mais qui, en vérité, sert de poison à ceux qui le mangent et les laisse sans vie. Le terme de cette voie sont les abîmes éternels.
      « La seconde voie est moins large, moins commode, moins agréable. Ce n’est point Satan qui l’a tracée, mais il l’a inspirée pour appeler ensuite les hommes dans la sienne. Les fleurs qui couvrent cette voie sont plus petites que les autres et moins nombreuses; leurs épines aussi, moins dangereuses et moins aiguës, ne vont point jusqu’au cœur et n’y font point de plaies mortelles. Ceux qui marchent dans cette voie conservent la vie, s’ils ne la quittent point pour entrer dans la première. Ils marchent, et trouvent au terme de cette voie le purgatoire et ses supplices passagers, mais effrayants et terribles.

      « La troisième voie ne ressemble nullement aux deux premières; elle est très-étroite, très-difficile et peu pratiquée. C’est moi qui l’ai tracée sur le Calvaire, et le chrétien, qui est un autre moi-même, marche dans cette voie. Elle est couverte d’épines; mais ces épines abritent des fleurs venues du ciel, dont le parfum réjouit l’âme et fait disparaître les blessures faites par les épines. Ces blessures, loin d’être mortelles, enlèvent tout ce qu’il y a de corrompu dans l’homme et respectent tout ce qui est bon en lui. Celui qui marche dans cette voie n’y trouve pour se refaire de sa fatigue qu’une absinthe très-amère; mais, dès qu’il est abreuvé, l’amertume se change en suavité.

      « C’est moi qui suis cette voie, qui mets les fleurs sous les épines, la suavité dans l’amertume, le ciel après le voyage. Je suis le conducteur de cette voie; je guide ceux qui veulent la suivre, par moi-même ou par d’autres moi-même, c’est-à-dire par des hommes qui sont plus avancés et qui ont plus d’expérience; mais le guide principal, c’est moi.

      Bref, tout cela pour dire qu’est heureuse sur cette terre la personne qui a compris et vit sans se plaindre le mystère de la souffrance. Le Christ en a donné l’exemple.

      • Aigle

        N’importe quoi!

  3. Nkurunziza Jessie

    Quand même la cuisine est la base de toute maisonnée comme le faisaient nos mamans.Mais les filles d’aujourd’hui ne savent plus rien faire à commencer par la cuisine.Comment parler de ménage si tout est confié à un boy de la maison ou une bonne?Y de quoi remuer le ménage.

  4. Pablo

    Ni vyiza cane mwirinde ingeso yo guca inyuma vos maris vyabaye ikiza Pour certaines femmes actuellement

  5. Une fille

    Bravo les filles ! Mwari mwari mwarinize!

    • Celestin Nibogora

      donnez nous alors le nom de l’administratice du groupe pour le joindre.

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