Le président de la République Evariste Ndayishimiye a rencontré le vendredi 3 mai 2024 à Buye, commune Mwumba, en province de Ngozi, tous les intervenants dans la filière café dans le cadre de redynamiser ce secteur qui est la première source de devises au Burundi. Selon le chef de l’Etat burundais, le Burundi perd plus de 47 millions de dollars américains par an. Cette situation est constatée même dans les filières thé et coton.
Evariste Ndayishimiye est revenu sur les détournements et les pertes enregistrés dans les filières café, thé et coton qui sont les principales sources de devises du pays. Il a déploré la perte annuelle de plus de 47 millions de dollars américains en raison des magouilles des intervenants dans le secteur du café. « Il y a la présence de multiples intermédiaires dans ce secteur. Il est incompréhensible que le café du Burundi soit vendu à 3,6 dollars américains le kg alors que celui des autres pays de la région se vend entre 7 et 8 dollars américains », s’est indigné le chef de l’Etat pointant du doigt les responsables de l’Office de développement du café, Odeca.
Le chef de l’Etat a annoncé que des mesures sévères doivent être prises pour changer les choses. « Moi, en tant que berger qui doit diriger cette nation, je vois qu’il y a plusieurs petits boucs turbulents. On doit ramener les choses dans l’ordre. Depuis notre jeune âge, on nous disait que ce qui développe le pays est le café, le coton et le thé. Depuis 1987, il y existe une mission chez certains de détruire tout ce qui peut développer le pays. Aujourd’hui, vous êtes arrivés sur le point culminant ».
Ndayishimiye fait savoir qu’ils détournent un montant équivalent à plus de deux mois de carburant par an. Il a instruit à l’Inspection générale de l’Etat de mener une enquête sur les irrégularités qui s’observent à l’Odeca afin de transmettre le dossier devant les instances habilitées pour le suivi. Les responsabilités doivent être établies pour plus de transparence.
Le directeur général de l’Odeca qui avait le monopole dans l’octroi du marché de vente du café à l’international n’a plus le droit de le faire seul. Il y aura désormais la contre signature de la cellule en charge de la commercialisation du café.
Evariste Ndayishimiye demande à tous les intervenants de travailler dans la transparence et aux intervenants dans la filière café de redoubler d’efforts dans l’augmentation de la production du café ainsi que dans la lutte contre la fraude. Ils sont invités aussi à contribuer à la négociation des marchés afin d’augmenter les recettes dans cette filière. De la sorte, les caféiculteurs pourront avoir une plus-value.
Il a appelé les banques commerciales à financer la chaîne de production du café pour permettre au pays d’avoir des devises. Il recommande aux responsables des usines d’élaborer la chaîne de valeur de la filière café pour résoudre les problèmes de fraude, de production et d’intrants.
Evariste Ndayishimiye a expliqué que son objectif est de faire entrer des devises dans le pays et de payer les producteurs en fonction du coût de production. Il a promis d’augmenter le prix chez les caféiculteurs burundais jusqu’à atteindre les prix pratiqués dans d’autres pays de la région. « Les devises seront disponibles à la BRB pour les importateurs et les producteurs recevront de l’argent pour se développer ».
Evariste Ndayishimiye accuse également l’Office du thé du Burundi, OTB, d’avoir refusé de participer dans un concours du thé. Les responsables de l’OTB, dit-il, ont reçu des pots-de-vin d’un particulier pour ne pas le concurrencer. « J’ai reçu des informations faisant état d’un refus des responsables de l’OTB par rapport à la vente de tout le stock qu’ils ont. Ils ont peur de perdre leurs intérêts. Si on analyse le prix qu’ils donnent aux producteurs et le prix de vente du thé, c’est ridicule. Où va cet argent? ».
Le secteur du Coton n’est pas non plus épargné. Le président Ndayishimiye pointe du doigt la Compagnie de gérance du coton, Cogerco. Il informe qu’il a constaté des détournements et des irrégularités lors de la réunion avec les responsables de cette institution. « Les détournements sont inqualifiables. Le coton est acheté à 550 BIF par kilo chez le producteur. Il est vendu à 6 700 BIF à l’usine Afritextile. Les graines sont vendues à 1000 BIF ».
Le chef de l’Etat dit avoir constaté que la Cogerco empoche 6 215 BIF alors que le citoyen n’a eu que 550 BIF. « Et on ose dire que la Cogerco est en faillite. Où va cet argent ? C’est ridicule et inadmissible », s’est-il indigné.
Le président de la République n’a pas oublié de mentionner la faillite de la Sosumo dont les produits sont aujourd’hui rares sur le marché. « Si vous avez la mission de détruire le pays, nous allons croiser le fer. Chaque responsable dans une société étatique doit se préparer. Nous allons voir s’il va triompher. Nous travaillons avec des hypocrites. Le producteur travaille pour rien et les responsables des sociétés publiques empochent de l’argent sans travailler », insiste-t-il.
Dans son exposé, le ministre en charge de l’agriculture, Prosper Dodiko a indiqué que la chaîne de production du café dès la pépinière jusqu’au marché international, connaît des défis qu’il faut relever. Il a cité, entre autres les emprunts à grand bénéfice, de multiples intermédiaires, la fraude et la mauvaise négociation sur le marché international.
Eclairage
Professeur Patrice Ndimanya : « L’Odeca est en conflit d’intérêt puisqu’il est opérateur et régulateur »
Selon Patrice Ndimanya, le diagnostic fait est correct mais les solutions pour sortir de ce cycle vicieux doivent être des stratégies bien réfléchies. « Les prix sur le marché international diffèrent selon les produits et selon les opérateurs. Certains opérateurs ont investi dans la certification. Il faut se poser des questions pour savoir pourquoi les autres pays de la région sont à un niveau supérieur. Qu’est-ce qu’ils ont fait ? Pourquoi ils ont de meilleurs prix ?».
Il estime que si le Burundi veut avoir des prix intéressants comme ceux des pays de la région, il doit s’inspirer des standards des pays qui vendent mieux. « Le premier problème c’est le manque de transparence et les lourdeurs bureaucratiques. Des documents facilement trouvables dans deux heures dans d’autres pays, on peut les chercher pendant deux semaines chez nous. Un autre problème est que l’Odeca est en même régulateur et opérateur dans la filière café ».
D’après ce professeur, depuis 2009, le gouvernement a vendu certaines de ses stations de lavage. Certaines stations ont été achetées par des nationaux et d’autres par des entités internationales. Les stations de dépulpage-lavage sont au nombre de 290 et l’Etat ne détient qu’au moins 30%. « L’Odeca est en conflit d’intérêt puisqu’il est opérateur et régulateur en même temps. Ce qui entrave la vente chez les négociants pour avoir de bons prix sur le marché international ».
Il explique que les pays concurrents comme le Rwanda ont libéralisé les filières et investi dans un marketing très agressif pour le café, le thé et le coton ainsi que d’autres produits d’exportation. Ils travaillent aussi dans la transparence pour attirer les négociants. Toutes les informations, ajoute-t-il, sont à la portée de tous.
Patrice Ndimanya explique que les opérateurs burundais dans le secteur se plaignent d’une lenteur et cela dissuade les négociants de venir sur un marché où on n’a pas de garantie d’avoir le produit au bon moment.
Il parle également de cette culture d’interventionniste de l’Etat dans la fixation des prix comme on le voit pour les produits comme le maïs et les autres. « L’Etat peut surveiller l’application des règles et la transparence mais il ne peut pas intervenir dans la fixation des prix. Ce n’est pas son rôle. Si c’est la cellule à la Présidence qui doit valider les prix, c’est un mauvais message pour les négociants ».
Selon ce spécialiste en économie rurale, les règles de fixation des prix doivent être établies. S’il y a un malentendu, ils peuvent recourir à une cellule d’arbitrage. « Ce sont des professionnels qui ont des prérequis intellectuels pour comprendre le fonctionnement des marchés globaux. Ces produits qui sont coté en bourse sont des marchés qui ont leurs règles et cultures. Ils requièrent des compétences pour négocier ».
L’Odeca devrait donc publier les prix pour savoir les quantités vendues, les acheteurs et les destinations.
Cela permettrait, explique-t-il, de savoir les opérateurs qui ramènent le plus de devises au pays donc qui ont des débouchés plus rémunérateurs.
Ici, il précise que la société privée Cococa a par exemple plus de huit acheteurs. Ce qui lui permet d’avoir de bons prix sur le marché. « Le rideau de fumée entretenu par l’opérateur et régulateur qui s’appelle Odeca doit être levé. Le gouvernement doit consentir des efforts supplémentaires pour assurer le marketing de son café. Les informations devraient être publiques pour attirer plus d’acheteurs », insiste-t-il.
Au sujet de l’Office du thé du Burundi, OTB, le professeur Ndimanya fait savoir plutôt que la filière a moins de problèmes. L’OTB reconnaît que les rendements sont significativement inférieurs par rapport aux performances des concurrents régionaux. « L’OTB reconnaît que les prix obtenus à l’export sont décotés par rapport aux origines régionales. Il le reconnaît dans son rapport interne. Les concurrents régionaux ont confié la gestion d’une partie significative de la production théicole à des entités privées. Ils font un marketing acharné ».
Il estime que l’OTB n’a pas de difficulté d’exporter dans les délais car il n’existe pas de structure pour valider les prix. Tout est décidé, fait-il remarquer, au niveau de la Direction commerciale. Cela veut dire que la lenteur dans l’octroi des contrats et licences n’existe pas.
S’agissant du coton, Patrice Ndimanya trouve que la Cogerco a des problèmes liés aux avantages coût et en ce qui est du professionnalisme dans la négociation et le marketing. « C’est aussi une filière qui est liée à une seule entreprise. Est-ce qu’il n’y a pas d’autres qui peuvent acheter le coton fibre à un prix très intéressant ? Je n’ai pas d’information mais cette situation de monopole mérite d’être questionnée ».
Ivyo I Burundi n akamaramaza.
Un président qui pointe du doigt des corrompus et des corrupteurs.
My question: What is the responsibilities of a President?
Where is the accountability?
Triste
On dirait que ce Mr vit dans une réalité alternative. Est ce qu’il croit vraiment à ce qu’il dit? Ou a t’il appris l’économie et surtout, a t’il des conseillers économistes?
C’est vraiment incroyable de voir quelqu’un dire la même chose, tous les jours, tous les mois, toutes les années, bcp d’années et ne jamais s’arrêter et méditer si ses idées fonctionnent!