La fermeture définitive de l’office du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme au Burundi est effective, depuis jeudi 28 février. Cependant, Gitega ne coupe pas pour autant les ponts avec cette instance onusienne.
Martin Nivyabandi, ministre des droits de l’Homme, se dit ravi que le Haut-commissariat ait accédé à leur requête de fermeture du bureau de Bujumbura. «Nous avons demandé sa fermeture parce qu’elle n’avait plus sa raison d’être au Burundi.» Il rappelle que lorsqu’elle a ouvert ses portes en 1995, le pays était à feu et à sang. Il ajoute que cette donne n’est plus d’actualité.
Michelle Bachelet, Haut-commissaire aux droits de l’Homme, regrette « profondément » cette décision. Pendant de nombreuses années, le bureau du Haut-Commissariat des droits de l’Homme au Burundi a réalisé nombre de tâches avec le gouvernement du Burundi. «Nous avons travaillé ensemble sur la consolidation de la paix, la réforme du secteur de sécurité, celle du secteur de la justice et contribué à renforcer les capacités institutionnelles et de la société civile sur toute une série de questions des droits de l’Homme».
Depuis 2016, les relations entre les deux partenaires s’étaient détériorées. Les autorités burundaises n’ont jamais caché leurs griefs envers cet office. Ils l’ont, à maintes reprises, accusé d’ingérence dans les affaires internes d’un Etat souverain. L’inimitié a atteint son paroxysme avec la création de la commission d’enquête sur le Burundi à Genève où se trouve le siège de cette organisation. Il soupçonnait le bureau basé à Bujumbura de lui donner la matière pour les rapports.
Chaque rapport présenté faisait sortir les autorités burundaises de leurs gonds. Elles le décriaient avec énergie. Et des manifestations étaient organisées pour dénoncer les résolutions «biaisées» en provenance de Genève. On se souviendra des deux résolutions adoptées à l’endroit du Burundi.
La première est déposée par le bloc occidental, tandis que la deuxième est l’oeuvre des Africains. Un fait inédit dans le fonctionnement de cette entité. Cet épisode avait renforcé Gitega dans sa rhétorique de politisation du concept des droits de l’homme par certains pays occidentaux.
La collaboration continue
Est-ce un clap de fin pour la coopération entre les deux partenaires ? Le ministre assure que cette fermeture n’est pas synonyme de rupture : «Le Burundi est toujours membre de cette agence onusienne. Nous allons participer dans toutes les rencontres qu’elle va organiser et lui envoyer nos rapports.»
L’ancienne présidente du Chili ne désespère pas non plus. Mme Bachelet se dit prête à échanger « de manière constructive » avec le gouvernement burundais. En outre, elle entend continuer à explorer d’autres moyens de mettre en lumière les préoccupations en matière de droits de l’Homme.
Les défenseurs des droits de l’Homme burundais, quant à eux, ont des avis partagés. Pour Me Lambert Nigarura, membre du collectif des avocats pour la défense des victimes des crimes de droit international (Cavib en exil), c’est une grande perte pour la population. «J’espère que la communauté internationale restera vigilante».
Pour Hamza Burikukiye, porte-parole de la plateforme intégral de la société civile (Pisc), pas de raison de s’inquiéter. «Les mécanismes nationaux en charge des droits de l’Homme et de la promotion des droits humains émanant de l’Accord d’Arusha vont prendre la relève ». Il fait allusion à la Commission nationale des droits de l’Homme et l’Observatoire de lutte contre le génocide et de défense des droits humains.
Signalons que le bureau fermé avait joué un rôle de premier plan dans la création de la Commission nationale indépendante des droits de l’Homme et de la Commission Vérité et Réconciliation.