Montée des prix ou rareté de certains produits locaux comme le sucre, le ciment, etc. Idem pour des denrées alimentaires telles l’huile de palme, la farine, etc. A la tête de l’association Parcem (Paroles et Actions pour le changement de mentalité), l’économiste Faustin Ndikumana explique.
Certains temps, les prix de certaines denrées ont monté. Pourquoi ?
Effectivement, on constate une hausse des prix des produits locaux et importés. Il y a une sorte d’inflation qui est entretenue aujourd’hui. Et plusieurs facteurs expliquent cette montée.
Lesquels ?
D’abord, il y a le coût de production. En effet, aujourd’hui, avec la crise de l’énergie surtout hydroélectrique, il y a usage de l’énergie thermique. Ce qui fait augmenter le coût de production de certains produits manufacturés ici. Il y a, aussi, le phénomène de taxation qui est instable aujourd’hui sur les importations.
Les vendeurs ont tendance à répercuter ces taxes sur le consommateur final. Citons aussi le problème de devises qui a fait exploser les prix surtout pour les produits importés.
En outre, d’une manière ou d’une autre, avec ces effets de changements climatiques, il y a une production d’un tel ou tel autre produit qui baisse.
Par exemple ?
Cas par exemple de la production de l’huile de palme qui, avec la montée des eaux du lac Tanganyika, plusieurs hectares ont été inondés. Ce qui fait chuter la production. Aussi, les champs rizicoles inondés dans la plaine de la Rusizi. Idem pour les autres cultures maraîchères.
En plus de ces facteurs déjà cités, il faut ajouter le coût du transport qui aggrave aussi la situation. Il faut voir l’état pitoyables de nos routes. Ce qui exige un entretien presque permanent des véhicules de transport.
D’une manière ou d’une autre, tous ces facteurs font augmenter les prix des produits. Quand on calcule le prix de vente, c’est le consommateur final qui va payer tous ces ajouts.
A titre d’exemple, aujourd’hui, le transport qui durait une heure est aujourd’hui passé à 3 heures voire 4 heures sur la route Bujumbura-Rumonge. Ce temps est aussi comptabilisé.
N’y a-t-il pas une part de la mauvaise organisation du secteur commercial ?
Cela aussi. Il y a un amalgame. On ne sait plus qui est opérateur économique et qui ne l’est pas. Qui a droit de faire le commerce et qui ne l’a pas. Une gestion spéculative du secteur.
Maintenant avec cette tendance d’inviter les fonctionnaires à s’organiser après les heures de travail, il y a une sorte d’amalgame qui se crée entre les vrais commerçants, les fonctionnaires, les politiciens. Certains produits sont cachés pour but spéculatif. Tout le monde veut ajouter sa marge bénéficiaire.
De la corruption aussi peut-être ?
La corruption fait aussi rage. Aujourd’hui, le sucre se raréfie. Il n’y a pas de prix fixe. Mais, des fois, on dit à la SOSUMO que la production est suffisante.
Alors pourquoi cette rareté ?
C’est à ce niveau qu’il faut se poser des questions. Comment est-ce que son circuit de commercialisation est organisé ? Y a-t-il une liste transparente à la SOSUMO des gens qui sont chargés de faire le commerce du sucre ? Comment ces opérateurs économiques sont-ils choisis ?
Une situation similaire pour le ciment. Qui sont ces gens qui reçoivent le ciment de BUCECO ? Ont-ils des moyens suffisants pour faire ce commerce sans spéculer ? Existent-ils des critères objectifs ? Par exemple : avoir des camions, des hangars pour le stockage, etc. Des fois, il y a ceux qui s’introduisent dans ce commerce sans capacité de le faire convenablement.
C’est-à-dire ?
Au lieu par exemple d’utiliser son propre camion, il doit le louer. Même le hangar de stockage. Ce qui signifie que tous ces coûts- location des véhicules, hangars-, vont se répercuter sur le consommateur final. Bref, cela devient comme une sorte de labyrinthe. L’inflation s’entretien, s’auto-entretient.
Est-ce que la pandémie de Covid-19 n’explique pas aussi cette situation ?
Effectivement. Cette pandémie a son impact réel sur nos économies qui étaient déjà fragiles.
Que faire ?
D’abord à court terme, il faut parvenir à séparer les vrais hommes d’affaires et les aventuriers. Mettre fin à la spéculation et la corruption dans ce secteur. Que les professionnels du commerce exercent librement leur métier.
Tous ces aventuriers, ces commissionnaires doivent être punis. Il faut que le vrai commerçant professionnel accède à la production car, il y a tout un tas d’intermédiaires qui s’intercalent et font monter les prix pour trouver des commissions. Il faut aussi trouver dans l’urgence les devises pour importer les produits.