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Exportations des fruits : cultivateurs et commerçants ruinés

05/05/2013 Commentaires fermés sur Exportations des fruits : cultivateurs et commerçants ruinés

Les commerçants burundais ne peuvent plus exporter de fruits vers les pays de l’East African Community. Ils sont bloqués au niveau de la PAFE (Police de l’Air des Frontières et des Etrangers).

<doc7786|right>A Rumonge, le long de la route macadamisée menant vers les provinces sud du Burundi, les oranges et les mandarines embellissent les lieux. Certaines murissent déjà, d’autres attendent quelques jours. Certains agriculteurs commencent à cueillir les premiers fruits et à les vendre. Avec sourire, femmes, hommes et enfants avec de petits paniers à la main crient et courent derrière tout passant. Et ce, même si la clientèle n’est pas aussi importante que par le passé. Motif : les exportateurs se seraient vu refuser le droit de continuer à exporter leurs mandarines et oranges vers le Rwanda et l’Ouganda, leurs habituels marchés. « Dans les années passées, nous commencions à accueillir nos premiers clients au début du mois d’avril. Ils venaient acheter nos champs de mandarines et oranges même pas prêts à être récoltés quitte à faire la récolte eux-mêmes le moment venu », indique un cultivateur.

Lui et son entourage craignent déjà de subir d’éventuelles pertes : « Nous avons beaucoup dépensé pour entretenir nos champs avec tout ce qui est semences, fumier,… Vous comprenez que si nous ne trouvons pas de marché c’est une grande perte.» Il se rappelle que les dernières années, tout allait bien: « Je parvenais à subvenir aux besoins de ma famille sans problème avec le revenu issu de mes mandarines et oranges.» Et de regretter pour ses trois champs consacrés aux plantations de mandarines : «Je ne peux pas y mettre une autre culture tout de suite qui soit aussi rentable ! »

Même regret chez les grossistes de la localité. Ils estiment qu’ils ne peuvent pas commencer à acheter sans être sûrs de pouvoir traverser les frontières. « En 2012, nous avons vu nos mandarines pourrir à la frontière. Nous ne pouvons pas prendre le risque d’acheter encore sans être assurés que la frontière sera ouverte», mentionne E.N.

Même situation à Matongo

Les exportateurs de maracujas de la commune Matongo, en province de Kayanza (une des provinces du nord du Burundi) sont aussi dans la désolation totale. Désormais, ils ne franchissent que très rarement la Kanyaru (frontière burundo-rwandaise). Selon eux, la PAFE les bloque. « Nous faisons toutes les déclarations nécessaires au niveau de l’Office Burundais des Recettes(OBR) pour obtenir le permis d’exporter. Mais une fois arrivés à la frontière, la PAFE nous empêche de pénétrer au Rwanda», indique F.N, un des commerçants.

D’après lui, les services de la PAFE leur expliquent qu’ils ont reçu les injonctions au téléphone de la part des hautes autorités. Tantôt, la PAFE garde leurs camions pendant plus de deux jours, tantôt elles les laissent passer sans difficulté : « Si nous étions hors la loi, elle nous aurait infligé des amendes. Mais elle nous garde pour nous garder et nos marchandises pourrissent.» Par ailleurs, ce grossiste croit que la PAFE n’aurait pas de base légale : « Elle ne dispose d’aucun document écrit montrant que désormais l’exportation des fruits du Burundi est bannie.» Le fait que les exportations soient permises au niveau de l’OBR et interdites à la PAFE reste aussi illogique pour notre source : « On dirait qu’il y a deux gouvernements au Burundi. Pourquoi les deux institutions ne collaborent-elles pas ? »

Pour ce problème, certains à Matongo précisent que la décision d’empêcher le commerce des maracujas vers les autres pays de l’EAC, serait liée à la mise en place de la nouvelle Brasserie présidentielle récemment installée à Ngozi. Selon eux, les autorités voudraient que les fruits burundais servent plutôt de matière première à cette Brasserie. Mais, les commerçants interrogés, indiquent qu’ils n’en savent rien.

La Commune et les agriculteurs aussi perdants …

Au niveau des pertes, les commerçants de Matongo réalisent que leur commune est aussi perdante. D’après eux, ils paient 15 Fbu par kilo de maracujas exportés : « Dans la situation normale, nos ventes sont estimées à 50 tonnes par semaine en moyenne. C’est environ 750.000Fbu que la commune perd par semaine quand nous n’exportons pas.»

Ce n’est pas fini. Les agriculteurs commencent aussi à sentir les conséquences. Ils indiquent que faute de pouvoir trouver assez de clients, le kilo de maracuja a chuté à 500Fbu alors que l’année passée, le même kilo se vendait à 1000Fbu. « Certains d’entre nous, qui avaient fait des pépinières de maracujas abandonnent petit à petit de les cultiver de peur que la situation se complique dans les prochains jours jusqu’à perdre encore plus de parts de marché», déplore Ntasano.

A cette question nous avons essayé de joindre le porte-parole de la police, Elie Bizindavyi pour s’exprimer à propos, sans succès. Le ministère du Commerce, de l’Industrie et du Tourisme aussi contacté, son porte-parole, Dismas Baradandikanya, précise ne pas connaître la mesure empêchant cette exportation des fruits : « Notre ministère ne peut pas refuser ces exportations alors que nous sommes dans la logique de les promouvoir. »

Au ministère à la présidence en charge des affaires de la Communauté Est-Africaine, le chargé de la communication indique aussi qu’il n’est pas au courant. « Nous n’avons pas de plaintes. Mais si tel est le cas, le Burundi serait en train de ne pas respecter l’étape du marché commun de l’EAC instaurant la libre circulation des biens, des personnes et des capitaux entre les pays membres de l’East- African Community. Ça serait continuer à mettre en place des barrières non tarifaires au commerce », souligne Oscar Bahizi.
Pourtant, des sources à Kanyaru, nous font savoir que les camions ne cessent d’être arrêtés par la PAFE.

EAC

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