La Commission Vérité et Réconciliation (CVR) a procédé, ce vendredi 16 octobre 2020, à la clôture provisoire des enquêtes et exhumations des fosses communes de la crise de 1972 en province Rumonge. Le président de l’Assemblée nationale s’en est pris aux Nations unies et à la Commission Diène.
Crânes, fémurs, tibias et péronés et autres ossements, mais aussi des habits en lambeaux, des montres entamées par la rouille, des souliers et des ceintures qui ont bravé le temps, … entassés dans une tente érigée au Stade de Rumonge.
Il y a aussi des machettes, des douilles et mêmes deux grenades rouillées. Des vieilles cartes d’identité attirent aussi l’attention. « Elles ont été trouvées dans les fosses communes », confie un membre de la CVR. « C’est un travail qui vient de durer 6 semaines et nous n’avons pas encore terminé », indiquera le président de la CVR, Pierre Claver Ndayicariye.
D’après lui, la CVR a déjà exhumé, jusqu’à la date du 14 octobre 2020, 2.328 victimes de la crise de 1972 dans 170 fosses communes dans les provinces de Rumonge et de Makamba.
Les cérémonies avaient été rehaussées par le président du Sénat, Emmanuel Sinzohagera et le président de l’Assemblée nationale, Daniel Gélase Ndabirabe.
Dans son discours, ce dernier a demandé pardon aux victimes de 1972 au nom du Burundi, de l’Assemblée nationale, du Sénat et de tous les Burundais. « Ce n’est pas un jour de fête. C’est une journée de recueillement. Il n’y a pas d’autres mots à dire, à part demander pardon pour tout le mal que nous nous sommes infligés entre Burundais. »Pour lui, c’est un moment pour chaque Burundais de faire un examen de conscience et de pardonner.
Haro sur l’ONU et Doudou Diène
« Plusieurs manœuvres ont été faites pour cacher ce qui s’est passé. Mais Dieu a décidé de nous aider. Ceci est l’œuvre de Dieu. Ces restes de nos proches parlent», a clamé haut et fort le président de l’Assemblée nationale.
Et de s’interroger : « Est-ce que, en 1972, le Burundi était une île au point de s’entretuer sans que personne n’intervienne ? Certains se proclament défenseurs des droits de l’Homme, est-ce qu’on n’en parlait pas en 1972 ? L’ONU n’existait pas encore ? »
Il s’est demandé si ce sont seuls les Burundais qui voient ces ossements. «On nous dit qu’il y a des satellites au-dessus de nous et qui peuvent voir jusqu’à 50 cm, il n’y a pas là-bas un os de cette taille ? Les avions continuent d’atterrir au Burundi, personne n’est encore venu pour constater ce qui s’est passé. Par contre, nous entendons qu’il faut prendre des sanctions contre le Burundi. Nous aurons la paix lorsque ces victimes auront retrouvé leur dignité ».
Daniel Gélase Ndabirabe s’en est également pris au patron de la Commission d’enquête des Nations unies sur le Burundi. « Il y a quelqu’un qui s’est fait un champion des droits de l’Homme. Je vais le citer : c’est Doudou Diène. Il crie haut et fort que les droits de l’Homme ne sont pas respectés au Burundi. Mais, il n’est jamais venu pour voir ces ossements. Cela montre que tout ce qu’il raconte ne concerne pas les droits de l’Homme. C’est de la politique. Les Nations unies ont échoué, elles n’ont pas de leçon à nous donner. Nous allons nous occuper nous- mêmes des droits de l’Homme ».
Rappelons que le Conseil des droits de l’Homme des Nations unies a prolongé d’une année le mandat de la Commission d’enquête sur le Burundi. C’était mardi 6 octobre. Les politiques burundais divergent sur la prorogation de cette commission dirigée par le Sénégalais Doudou Diène.