Le taux de décaissement des projets financés par la Banque mondiale est de 21% seulement pour les 1,3 milliards USD du portefeuille de la Banque mondiale destiné au gouvernement du Burundi sur la période 2019-2023. Des centaines de millions de USD risquent de tomber en annulation alors que le pays a tant besoin de devises. Une honte, une incurie, une catastrophe, … selon les observateurs. Ils relèvent plusieurs facteurs : mauvaise gestion, incompétence des gestionnaires, recrutements partisans, spéculations, etc.
« Le groupe de la Banque mondiale a mobilisé des ressources importantes pour le Burundi dont un portefeuille de 1,3 milliards USD et cela dans les secteurs de la santé, l’éducation, la protection sociale, les infrastructures, l’énergie, le transport, l’énergie, … », a fait savoir Hawa Cissé Wagué, Représentante Résidente de la Banque mondiale au Burundi, lors de l’évaluation, le 2 mars 2023, du cadre de partenariat-pays (CPP) entre le Burundi et le Groupe de la Banque mondiale. D’après elle, ce cadre a été élaboré en 2019 pour couvrir la période 2019-2023.
La Représentante Résidente a souligné que ce cadre de partenariat a deux axes principaux à savoir le renforcement du capital humain et le renforcement des bases de la résilience économique et sociale. « Sur 6 objectifs prévus dans le cadre du CPP, seuls 2 objectifs ont été réalisés après 3 années et demi de mise en œuvre. La non-réalisation des objectifs est due à la lenteur dans l’exécution des projets. » Pour elle, un indicateur non atteint est une occasion ratée pour impacter la vie des nécessiteux.
Des chiffres peu reluisants
Les chiffres de la Banque mondiale sur la performance ne font pas honneur ni aux gestionnaires des projets financés par la Banque mondiale ni au gouvernement du Burundi. Selon cette institution de Bretton Woods, le portefeuille de 16 projets (13 nationaux et 3 régionaux) financés par la Banque mondiale au Burundi est de 1,3 milliard USD en dons. Mais le montant non-décaissé est de 804 millions USD.
Pour l’exercice en cours (Juillet 2022-Juin 2023), d’après la Banque mondiale, les prévisions de décaissement étaient de 188 millions USD. A 3 mois de la fin de l’exercice, seuls 59,6 millions de USD ont été décaissés soit 31,2 % des projections.
La Banque mondiale fait savoir que les retards dans la mise en œuvre des projets affectent la réalisation des objectifs du CPP et limitent l’impact sur la vie des populations. Selon l’institution, 2 objectifs sont réalisés sur les 6 principaux objectifs du CPP.
Il s’agit de : « Améliorer l’accès aux services de qualité de santé reproductive, maternelle, infantile et nutrition » et « Renforcer, la redevabilité du secteur public, l’efficience dans la fourniture des services publics, et l’autonomisation des femmes ».
Trois objectifs sont partiellement réalisés à savoir : « Renforcer les filets de sécurité sociale et l’inclusion économique pour les vulnérables », « Mettre en place des systèmes durables de production alimentaire » et » Améliorer l’accès à une éducation de qualité et l’emploi des jeunes ». « Ils pourraient être réalisés d’ici la période étendue du CPP avec beaucoup d’efforts. »
Quant à l’objectif « augmenter l’accès à l’énergie pour les familles pauvres », il a enregistré peu de progrès et risque de ne pas être atteint.
La Banque mondiale fustige également un niveau d’exécution faible des avances de démarrage pour la préparation de projets (PPA). « Il y a un retard dans la mise en vigueur des nouveaux projets. Une utilisation efficace des PPA contribuera à une meilleure performance des projets pendant leur mise en œuvre. »
Le ministre des Finances reconnaît des dysfonctionnements
« La Banque mondiale est le principal partenaire du gouvernement dans la mise en œuvre des projets de développement mais apparemment la plupart d’entre nous n’a pas conscience de cette situation ce qui fait qu’on observe cette lenteur dans l’exécution des projets. Du coup, on fait ralentir le développement », a indiqué Audace Niyonzima, ministre des Finances, du Budget et de la Planification Economique.
Le ministre Audace Niyonzima reconnaît qu’il y a quelques éléments qui handicapent les projets. « C’est généralement le recrutement. Les chefs de projets doivent noter que la question de recrutement ne doit plus retarder la mise en œuvre des projets. Le recrutement doit être basé sur les compétences. Le gouvernement va évaluer les chefs de projets sur les performances. »
Un autre élément soulevé par le ministre des Finances est les demandes d’exonérations. « Certains gestionnaires des projets ne connaissent pas les procédures. Ils ne savent pas que les projets financés par l’Etat sont exonérés par la loi. Ils s’adressent au ministre au lieu de s’adresser directement à l’OBR. »
D’après le ministre Niyonzima, certains gestionnaires des projets spéculent. « Cela doit s’arrêter. » Et de rappeler aux chefs des projets qu’ils ont une lourde responsabilité dans la promotion du développement de ce pays. « Il y a des projets en souffrance notamment les projets de l’énergie surtout le Projet Soleil. » Et d’interpeller le gestionnaire du Projet Soleil : « Je dois vous dire que vous êtes au rouge. Vous avez 100 millions USD.
Dans deux ans, vous avez décaissé même pas 1 millions USD. Cela ne peut pas continuer comme ainsi. » Pour les projets en souffrance, poursuit le ministre, sachez que le gouvernement va prendre des mesures appropriées. « On va vous évaluer sur les performances annuellement ».
Le ministre des Finances a souligné que ces discussions sont initiées au moment où ils sont en train de préparer le budget : « Le budget va comprendre une part très importante des financements des partenaires. Si on met cette part dans le budget et qu’on n’a pas cette visibilité sur leur exécution, le budget va en pâtir. Nous avons besoin de vos plans annuels pour qu’on les intègre dans le budget. »
Pour le ministre de l’Intérieur, Martin Niteretse, les Burundais attendent, de la part des gestionnaires des projets, des réalisations et non des verbes. « Mais, il semble que certains n’en sont pas conscients. Nous allons engager des enquêtes et rétablir les responsabilités. »
Projet SOLEIL, mauvais élève
Le projet d’énergie solaire pour les communautés rurales, plus connu sous le nom SOLEIL ou Nyakiriza en kirundi a été doté de 100 millions USD. Dans un communiqué de presse du 28 février 2020, la Banque mondiale avait annoncé que ce projet allait multiplier par deux le taux d’accès à l’électricité en améliorant l’accès des familles rurales, des entreprises locales, des écoles et des dispensaires dans certaines des régions les plus démunies du pays avec, à la clé, des gains de niveau de vie et de bien-être.
Selon l’institution, plus de 91 000 familles, 4 000 petites entreprises, 500 écoles et 400 dispensaires allaient être raccordés à l’électricité par des mini-réseaux ou des installations solaires autonomes.
Par ailleurs, avait indiqué, des cuisinières propres et efficientes viendront équiper 400 écoles et 300 000 ménages. « Ce projet améliorera la qualité des services d’éducation et de santé en milieu rural et procurera des capacités de production d’énergie renouvelable d’environ 17 MW. »
Jeudi 2 mars 2023, le constat était amer : « Le Projet SOLEIL est noté modérément insatisfaisant (MU) depuis 15 mois et cela demande des actions immédiates pour améliorer sa performance. » D’après les chiffres de la Banque mondiale, 88,9 millions USD ne sont pas encore décaissés depuis l’approbation du projet, le 28 février 2020.
Interrogé sur les raisons de cette lenteur, le coordinateur du Projet Soleil, Vincent Nibayubahe, a répondu qu’il ne peut s’exprimer dans les médias alors que le ministre des Finances a déjà parlé.
Un cadre, qui a requis l’anonymat, d’un des projets cités dans ce rapport de la Banque mondiale, estiment nombreuses les causes des retards : « C’est vrai que la société engagée pour exécuter les travaux a des experts qui sont qualifiés mais parmi eux, la majorité ne savent rien, on dirait qu’ils sont venus faire du tourisme. Les manœuvres burundais sont meilleurs qu’eux. » Il soutient que c’est du n’importe quoi, surtout quand c’est le moment de passation des marchés et lors des recrutements : « Ils font tout traîner pour faciliter le vol. De plus, on t’oblige à insérer des gens. En plus de ces ingénieurs, le parti au pouvoir te dicte les noms que tu dois aussi insérer. Parfois, ce sont des gens qui ne savent rien. »
Il fait savoir qu’ils se permettent souvent le non-respect des échéances à cause de la corruption. « Le décaissement est impossible parce qu’ils ne savent pas les justifier. En substance, il n’y a pas de transparence dans le recrutement, dans la passation des marchés, … »
Réactions
Agathon Rwasa : « C’est véritable calamité pour une nation »
« Cela démontre d’abord qu’il y a une certaine insouciance de la part des autorités parce si elles étaient soucieuses de la misère galopante, elles feraient tout pour qu’on puisse utiliser les fonds alloués pour le bien de la Nation », souligne le président du Congrès National pour la Liberté (CNL).
D’après Agathon Rwasa, la première cause est de mettre en avant le militantisme au détriment du mérité. « Ainsi, les plus compétents sont oubliés et les plus militants sont mis au premier plan pourvu que le pouvoir puisse s’installer et se consolider au détriment du bien-être de la société ».
Du coup, poursuit le patron du CNL, la paupérisation galope et c’est le développement qui manque au rendez-vous. « Lorsque vous avez des personnalités qui affichent une incompétence avérée, vous ne pourrez pas vous développer parce que vous n’avez pas de plan de développement à proprement parlé. On navigue à vue ». Une nation ne peut pas naviguer à vue et espérer avancer sur la voie du développement.
Pour le président du CNL, si l’exécutif burundais est conscient de cette situation plutôt dangereuse pour une nation, il devrait faire profil bas et accepter d’ouvrir un débat national sur la situation du moment. « Les partis politiques, la société civile, les Eglises et autres, on devrait se mettre ensemble pour analyser la situation et définir les perspectives de notre pays ».
De plus, fait-il savoir, on devrait penser à l’inclusivité dans les institutions étatiques au niveau du gouvernement, de l’administration territoriale, … « Mais, il faut un courage de titan pour le faire. Ce qui risque de ne pas arriver vu l’arrogance de ceux qui dirigent ce pays, prenant le Burundi en otage comme si c’était une rançon de leur soi-disant lutte pour la démocratie ».
Kefa Nibizi : « C’est une honte pour un pays qui a besoin des devises ! »
« C’est une honte pour un pays comme le Burundi qui est classé parmi les pays les plus pauvres du monde et qui a besoin des devises mais qui néglige cette main tendue de telle manière que les donateurs commencent à s’inquiéter sur la capacité d’absorption des fonds qui nous sont accordés », relève le président du parti Codebu…
Pour lui, c’est un manque de conscience de toute une chaîne des personnalités impliquées dans la gestion des projets. « C’est une très mauvaise image du Burundi auprès de tous les donateurs qui risquent de rechigner à donner des fonds consistants à notre pays. »
Pour Kefa Nibizi, les causes sont de plusieurs ordres. « Il y a un manque d’appropriation des projets présentés. La deuxième est les spéculations dans les recrutements des équipes de gestion à tel point qu’on y met des personnes compétentes mais on choisit des personnes qui répondent à d’autres critères de sélection comme le favoritisme, l’appartenance politique, … »
D’après M. Nibizi, une autre cause est un degré de mauvaise gouvernance accru qui caractérise les Burundais car certaines personnes ne laissent pas avancer des projets dans lesquels ils ne tirent pas leurs propres profits. « Suite au manque de conscience que les donateurs ont envers notre pays en matière de bonne gestion, les procédures de décaissement sont très complexes. Il y a risque de retarder l’exécution. »
M. Nibizi souligne que des fois, il y a des décaissements qui sont effectués par les équipes de gestion mais qui sont jugés inéligibles et que le gouvernement du Burundi doit rembourser à la Banque mondiale.
Pour éviter ce genre de désagréments, Kefa Nibizi exhorte le gouvernement à mettre en avant les compétences lors des recrutements et éviter des critères subjectifs. De plus, suggère-t-il, il faut négocier avec la Banque mondiale pour assouplir les procédures de décaissement.
« Il faudra également renforcer la culture de la transparence, du respecter des procédures que nous manquons cruellement. » Le président de Codebu… propose au gouvernement d’évaluer progressivement le degré de décaissement des fonds accordés afin d’identifier les causes des retards et trouver une solution en temps utile.« Ils s’agit des personnes incompétentes ou de mauvaise foi, il ne faut pas renouveler leurs contrats. Il ne faut pas déplorer uniquement sans trouver des solutions rapides. »
Le parti Codebu aimerait qu’on puisse épuiser les fonds avant même les délais fixés pour montrer aux bailleurs que nous voulons encore plus. « On constate que dans la sous-région, nous sommes parmi les pays qui bénéficie moins d’appuis financiers de la part des donateurs parce que nous n’avons la capacité d’absorption. »
Aloys Baricako : « Un constat amer »
D’emblée, Aloys Baricako, président du Rassemblement national pour le changement (Ranac), s’étonne tout en faisant un constat amer. Et de se poser mille et une questions : « Est-ce que le gouvernement du Burundi en demandant ces financements n’avait-il pas présenté des projets ? Est-ce que ces derniers avaient été bien étudiés ? Est-ce que ces projets avaient été bien planifiés dans le temps, dans l’espace ? Est-ce que les échéances sur l’exécution de ces projets étaient bien déterminées ».
D’après lui, à chaque activité correspond un montant donné. Chaque activité doit être exécutée dans une période bien précise. « Ou alors, est-ce que les gens qui avaient planifié ces projets avaient surestimé leur coût ? », s’interroge-t-il encore, tout en soulignant que cela aurait déboucher sur le détournement des fonds.
Et de déplorer : « C’est un constat amer où dans un petit pays comme le nôtre qui souffre d’un manque criant de devises et voir que cet argent n’est pas utilisé pour renforcer l’économie du Burundi et permettre qu’il aille de l’avant ».
Interrogé sur les probables causes de cette situation, le président du Ranac évoque la mauvaise foi des fonctionnaires, l’incompétence et l’inexpérience, le népotisme.
« Il y a des gens qui sont dans les places qu’ils ne méritent pas. Quand vous vous trompez sur une personne dans les nominations à certains postes, le résultat est celui-là qu’on observe actuellement », martèle-t-il.
M. Baricako cite aussi le cas des projets mal étudiés. Pour lui, les projets qui n’ont pas été bien étudiés deviennent difficiles à exécuter.
« Au cours de leur exécution, vous êtes bloqué et c’est pourquoi vous ne pouvez pas les terminer, ou achever le budget alloué auxdits projets ».
Il recommande d’étudier un projet sans spéculation, sans sentimentalisme, en toute indépendance et en respectant tout ce qu’il faut pour réussir un projet.
Par ailleurs, Aloys Baricako épingle l’intention de détourner qui aboutit à la manipulation des chiffres sur les fonds reçus.
Le président du Ranac alerte sur un cortège de conséquences fâcheuses qui en découlent pour le pays. Il évoque la dévaluation de la monnaie qui entraîne la cherté de la vie, la non-exécution des projets, la perte de confiance. « Nous risquons de ne plus gagner la confiance des bailleurs de fonds », prévient-il.
Interrogé sur les solutions, M. Baricako recommande de mettre de côté le sentimentalisme dans la nomination aux postes de grande importance. Il suggère aussi la rigueur dans la gestion des projets et des financements.
Abdul Kassim : « J’éprouve un sentiment d’indignation »
Pour le président du parti Upd-Zigamibanga, l’incompétence de certains, la corruption et le manque de civisme pour d’autres seraient les causes. « Une cause serait également la lenteur dans la prise de décision car beaucoup de fonctionnaires n’ont pas encore intégré dans leur mentalité et intégré la notion de budget programme. »
Pour lui, le gouvernement devrait d’abord faire le ménage et recruter un personnel compétent et consciencieux. « Le militantisme dans le recrutement doit impérativement disparaître et laisser la place au professionnalisme et le mérite. Il devrait alors utiliser efficacement et au plus vite le budget restant avant de renégocier un autre budget. » De plus, indique-t-il, le gouvernement doit user de la transparence dans la gestion de la chose publique et installer les habitudes de bonne gouvernance dans tous les secteurs de la vie nationale.
Gabriel Rufyiri : « Ce sont des devises en termes de centaines de millions dont le pays aurait pu profiter, qui partent en fumée »
Pour le président de l’Olucome, le faible taux de décaissement des fonds alloués par la Banque mondiale est lié d’une part, aux exigences strictes de la Banque mondiale par rapport aux procédures de décaissement et d’autre part, à l’exigence par rapport à l’exécution des projets et la capacité d’absorption des personnes en charge d’exécuter les projets. « C’est vrai que là, il est question des projets de la Banque mondiale mais c’est le cas de tous les partenaires techniques et financiers qui ont des procédures sur base desquelles l’argent doit être décaissé ! ».
Gabriel Rufyiri rappelle que lors du Forum national du développement tenu en novembre 2021, il a été relevé que le gouvernement manque cruellement d’experts en matière de négociation et d’exécution des projets. « C’est un problème général qui doit être analysé en profondeur pour être résolu parce qu’avec la levée des sanctions de l’UE, le Burundi aura beaucoup d’argent non seulement en provenance de projets mais aussi via l’appui budgétaire. Ce qui nécessitera des experts pour exécuter ces projets dont les résultats sont clairement définis »
D’après le leader de la lutte anti-corruption, il est question de mauvaise gouvernance dans cette affaire. « Quand le gouvernement compte exécuter des projets via les recettes budgétaires, en l’occurrence lors de l’attribution des marchés publics, on sait bien comment ça se passe ! Mais pour les projets de la Banque mondiale, ça ne se passe pas ainsi car il y a des procédures à respecter »
Selon M. Rufyiri, les conséquences d’une telle situation sont multiples. « Si l’échéance d’exécution du projet sans que l’argent soit décaissé, il retourne à l’expéditeur et il n’y a pas de report. Vous comprenez alors à quel point le pays perd beaucoup d’argent ! Il y a aussi l’image du pays qui en pâtit car les partenaires techniques et financiers discutent entre eux et se passent le message sur tel ou tel autre pays. Enfin, ce sont des devises en termes de centaines de millions dont le pays aurait pu profiter, au vu de leur rareté en ce moment, qui partent en fumée »
Comme solutions, Gabriel Rufyiri recommande de faire appel à des profils qualifiés pour la bonne marche des projets de l’Etat. « L’exemple de l’OBR est assez édifiant. L’organisme a fait appel à un expert étranger qui a permis de doubler, voire même de tripler les recettes de l’OBR ! Faisons donc appel, si possible, à des experts étrangers qui auront aussi la tâche de former des experts burundais »
Le président de l’Observatoire de la Lutte anti-Corruption juge que le rôle du ministre des Finances, qui avait déploré cette situation, n’est pas de se lamenter mais de proposer des solutions. Gabriel Rufyiri estime en outre que le pire dans cette situation, c’est l’ingérence de l’autorité politique dans la gestion des projets. « Des militants zélés du parti au pouvoir sont nommés à des postes techniques sans aucune compétence. Cela reste un gros problème au moment où ce qui doit être mis avant, c’est l’éthique et la compétence »
Hamza Venant Burikukiye : « C’est un signe d’une irresponsabilité notoire»
« Ne pas consommer les fonds accordés par les partenaires au développement reste un manquement grave aux obligations et c’est un signe d’irresponsabilité notoire », fait savoir le représentant légal de l’Association Capes+. D’après lui, la lenteur dans l’exécution des projets peut s’expliquer à deux niveaux : soit pour des raisons internes résultant au manque du professionnalisme, l’inexpérience et l’incompétence mais par des spéculations des uns et des autres dans le circuit d’exécution de ces projets.
Concernant les raisons externes, ajoute-t-il, cela peut résulte des règles et politiques des partenaires au développement qui donne sans lâcher la main. « Leurs principes de gestion de leurs appuis non négociés mais imposés sont beaucoup fermés et durs ce qui ne facilite pas, par conséquent, la mise en œuvre des activités. »
Pour M. Burikukiye, le pire est que c’est l’image du pays qui est ternie. « Pas de solutions magiques pour redresser la balle que d’asseoir la bonne gouvernance politique et économique. Surtout, il faut des gens qu’il faut dans les places qu’il faut. De plus, il faut bien négocier les projets et surtout leur faisabilité selon le contexte du pays. » Il demande aux partenaires au développement d’écouter au lieu imposer et de considérer, dans leurs appuis, le renforcement des capacités organisationnelles et opérationnelles des instances de mise en œuvre des projets financés.
Iwacu a interrogé le parti au pouvoir mais il n’a pas voulu répondre.
Faustin Ndikumana : « C’est une situation d’incurie »
Quel est votre commentaire par rapport à cette situation ?
D’abord, cette situation n’est pas nouvelle. C’est en fait l’ordinaire dans l’exécution des projets dans notre pays. C’est un problème d’absorption des fonds accordés.
Donc, l’élaboration des projets, le contrôle, la rédaction des rapports, se font tardivement quitte à ce que les exigences préalables pur un décaissement supplémentaire ne sont pas remplies.
Le bailleur est obligé d’attendre jusqu’à ce que le récipiendaire de ces fonds observe les principes et tous les éléments que doivent contenir un rapport digne prouvant la bonne exécution d’une tranche déjà accordée.
Quelles sont les causes ?
Premièrement, il y a l’incompétence. La politisation à outrance dans la nomination même pour des projets qui exigent une compétence technique avérée pour leur mise en application. Les compétences techniques sont au second plan.
Ce n’est même pas la Banque mondiale seulement, même la Banque africaine de développement, le taux d’exécution est similaire.
Il y a aussi une philosophie encrée chez certains hauts responsables qui veulent spéculer.
Je nomme celui-là car en contrepartie, il me fera ceci ou bien je nomme quelqu’un de faible pour continuer à l’influencer afin de lui soutirer des petits avantages dans l’exécution du projet, la passation des marchés. Vous savez que la transparence dans la passation des marchés publics au Burundi reste toujours problématique. On veut toujours avoir des avantages.
Quelles sont les conséquences pour le pays et pour la population ?
Des conséquences sont énormes. D’abord, c’est un portefeuille d’un milliard USD sur 5 ans, soit 200millions par an.
C’est une somme non négligeable pour renflouer les caisses de l’Etat en devises. Ce sont ces projets de développement qui complètent le vide du gouvernement par rapport aux ressources de financement. Nous avons un bailleur qui vient donner une aide au développement en plus non remboursable car la Banque mondiale ne donne jamais de crédits au Burundi.
En plus, nous sommes dans une situation de manque de devises, de problème de vivres, du déséquilibre de la balance de paiement mais même le cadeau qui nous est accordé, on ne parvient pas à le consommer. C’est paradoxal. C’est vouloir quelque chose et son contraire.
Et c’est la population qui en pâtit
Justement. Il y a un manque de devises, des taux de change différentiels. Si ces millions de dollars arrivaient sur le marché, il y aurait un répit.
Au niveau de l’exécution, des emplois pouvaient être créés en injectant ces millions de BIF provenant de ces millions de dollars. Ce serait mieux dans ce contexte qui devient de plus en plus difficile à cause de la pauvreté, d’inflation, …
A vous entendre, le gouvernement est responsable ?
Il a une responsabilité parce que quand un gouvernement éprouve un problème de disponibilité de fonds, il doit monter une stratégie de mobilisation des fonds. Parmi ces dernières, il y a la mobilisation des appuis au développement.
S’il ne parvient pas à le faire, on dit que le gouvernement a raté à sa mission par rapport à sa responsabilité devant le peuple burundais.
Pour vous, que doit faire le gouvernement pour rectifier le tir ?
L’argent est là. Le Burundi a des gens compétents et expérimentés. Même s’il n’y en avait pas, on serait obligé de s’ouvrir à l’expertise étrangère. Ce n’est pas une honte. L’essentiel est que le projet soit exécuté au profit de la population.
Regardez le manque à gagner, c’est extrêmement énorme. Pourquoi il y a des Burundais qui sont sollicités dans d’autres pays pour aller donner leurs compétences ? Ce sont des grands experts qui aident d’autres peuples au lieu de servir leur pays d’origine.
En somme, comment qualifier cette situation ?
C’est une situation d’incurie par rapport à la gestion des projets, des dossiers aussi sensibles qui ont un intérêt vital pour le pays. Même la BAD avait estimé que le besoin en infrastructures du Burundi à 6 milliards de dollars pour avoir un taux de croissance économique consistant.
Et quand ces bailleurs de fonds commencent à rendre disponibles ces fonds, on fait du n’importe quoi. C’est de l’irresponsabilité notoire. C’est la crédibilité du pays qui est mise en cause.
Nibazako biko bija kwiherezo. Notre Président fera le tout possible pour changer les Irresponsibles dans notre Pays Bareke gupfukama munda Igihugu kandi abiriko .
On peut simplement dire qu’il n’y a pas de pénurie de moyens financiers, il y a pénurie de cerveaux.
@Jereve
Hari umukongomani twamenyanye nko muri 1990. Ni incabwenge, imbere yo kuva muri Kongo yigisha muri kaminuza, hanyuma asubira kwiga kandi aca akora mubintu vya haute technologie. C’est vraiment un sage, yitonda cane mugabo yavuze ati kuri jewe kuja gusubira gukora hariya iwacu c’est aller m’abrutir.
Quelques phrases interpellent : 1. Nous avons un bailleur qui vient donner une aide au développement en plus non remboursable car la Banque mondiale ne donne jamais de crédits au Burundi. (2) C’est un signe d’une irresponsabilité notoire. (3) […] ceux qui dirigent ce pays, prenant le Burundi en otage comme si c’était une rançon de leur soi-disant lutte pour la démocratie. (4) Des militants zélés du parti au pouvoir sont nommés à des postes techniques sans aucune compétence. Cela reste un gros problème au moment où ce qui doit être mis avant, c’est l’éthique et la compétence (5) Le militantisme dans le recrutement doit impérativement disparaître et laisser la place au professionnalisme et le mérite. Il devrait alors utiliser efficacement et au plus vite le budget restant avant de renégocier un autre budget.
Est-ce qu’ils lisent?
Supposons même que les PPA’s soient acceptables, et que les fonds soient décaissés, vous croyez vraiment qu’a l’état actuel de la gouvernance, ces projets seront exécutés.
Ils finiront comme le barrage de Mpanda c.a.d. Enrichir les prétendus dignitaires qui se sont illustrés dans le pillage systématique des biens du pays. ils sont protégés par le pouvoir en place. Alors qui les empêcheraient de refaire ce qui les a tant réussi?
C’est tout le système a revoir dans ce pays.
On a encore du chemin a faire.
A la différence du nickel qui reste sous terre et ne disparaît pas malheureusement les fonds non décaissés eux ne reviennent plus.
Alors s’il vous plaît les responsables du Burundi, penser aux autres et ne pas seulement remplir vos ventres.
nkeneye kwimva umukuru w’igihugu avuga kuko niwe wenyene mpanze amasaho