C’est désormais officiel, à l’issue du congrès spécial du ’’parti de l’aigle’’ organisé ce dimanche 26 janvier 2020 à Gitega, le Général Major, Evariste Ndayishimiye est son candidat aux présidentielles. Cette désignation, ou ce choix, met un terme aux nombreuses spéculations.
C’est Nancy-Ninette Mutoni, porte-parole du Cndd-Fdd qui annonce officiellement les résultats du congrès après deux heures de tractations et de négociations pudiquement appelées ’’travaux’’ tenus en interne.
Seuls les congressistes et d’autres hauts dignitaires du parti au pouvoir auront le droit d’y prendre part. La presse, les diplomates et autres invités de marque ont été poliment invités à se retirer pour une « pause. »
Dans la foule qui patiente, l’ attente donne libre cours aux spéculations. Le nom du président du l’Assemblée nationale, Pascal Nyabenda se chuchote, mais il y a surtout celui du secrétaire général du Cndd-Fdd, Evariste Ndayishimiye, alias « Neva » qui est sur toutes les lèvres.
C’est finalement ce nom que la porte-parole du Cndd-Fdd annonce au 10ème point du communiqué sanctionnant ce congrès spécial précédé par une prière œcuménique de trois jours axée sur l’Exode.
Invité à prendre la parole, Evariste Ndayishimiye parle du chef de l’Etat comme d’un sauveur, un libérateur : «Excellence, à part le fait d’être notre guide permanent, vous êtes notre Moïse. Avec votre soutien, je suis prêt à affronter tous les combats».
Le candidat du Cndd-Fdd aux présidentielles révèle qu’il aura dans sa vie des signes avant-coureurs de ce couronnement : «J’ai été entraîné à être patient, endurant, une sorte de baptême de feu. J’ai sillonné toutes les provinces du Burundi à pied, j’ai appris à être un meneur d’hommes, j’ai été subalterne. J’ai été dans le dénuement, la précarité, la peur ».
«Le président Nkurunziza sera toujours mon maître à penser»
Selon Evariste Ndayishimiye, il y aura au cours de la lutte armée des moments d’hésitations, de doute, d’incertitude : «J’ai failli renoncer à la lutte, mais j’avais une ferme conviction qu’elle valait la peine, que c’était pour une juste cause».
Et de confier à la foule de congressistes qu’il sera pendant longtemps côte à côte avec le président de la République au maquis : «Vous ne le savez pas peut-être, j’ai été son commandant et il a été mon commandant, nous avons été ensemble sous les ordres d’un supérieur. J’ai toujours écouté ses conseils».
C’est aussi l’heure de quelques confidences : «J’ai eu peur quand le président du Conseil des sages a annoncé que c’est moi le candidat. Mais je me suis dit que si telle est la volonté du Très-Haut, je ne pourrais pas me dérober à cette responsabilité et à cette marque de confiance du chef de l’Etat et de tous les ’’Bagumyabanga’’ (militants du parti Cndd-Fdd).
Il fait remarquer que c’est pour la première fois qu’un président en exercice demande d’avoir un successeur : «Vous savez, la nouvelle Constitution ne lui interdit pas de continuer. Mais il a renoncé. Je lui serai reconnaissant et dévoué. C’est mon maître à penser, je vais l’imiter».
Avant de terminer son mot, le candidat du Cndd-Fdd, qui se voit déjà dans le fauteuil présidentiel par ses évocations, mettra en garde tous ceux qui seraient tentés de rééditer ce qui s’est passé en 2015 notamment avec les frondeurs.
Bravant la pluie, l’heureux élu du »parti de l’aigle » terminera son discours tout trempé, refusant de s’abriter sous un parapluie qu’un membre du protocole déploie pour le couvrir. Il décline vigoureusement ce service.
Un discours révélateur
C’est avec un appel lancé aux militants du Cndd-Fdd à soutenir ce candidat aux présidentiels que le chef de l’Etat Nkurunziza débute son discours de circonstance. «C’est lui qui sera demain aux commandes et je vous demande de l’appuyer et je le ferai avec toutes mes forces. Nous serons à votre côté dans notre combat, la lutte continue, je vais obéir».
Son mot avant les consultations des congressistes avait été quelque peu révélateur quant au profil du candidat idéal aux présidentielles pour le Cndd-Fdd. Il avait demandé aux congressistes d’observer une minute de silence en honneur des collègues tombés sur le champ de bataille au maquis : «Lors de notre lutte armée, nous avons perdu beaucoup d’amis. Le Cndd-Fdd doit se souvenir de ce sang versé. La population acquise à notre cause et nos combattants ont payé un lourd tribut. Il y en a qui ne sont plus de ce monde, mais ils se sont sacrifiés pour notre lutte».
Et d’évoquer les ennemis à sa façon : «Merci à nos ennemis, ils nous ont aidés à être ce que nous sommes aujourd’hui. Il n’y pas de victoire sans combat. Même aujourd’hui, nos ennemis sont les bienvenus, ils nous renforcent».
Selon lui, ce congrès spécial vient lever beaucoup d’équivoques, calmer certains esprits : «C’est le début d’une ère nouvelle, un nouveau départ, le moment d’impulser une nouvelle dynamique ».
Le Président Nkurunziza reviendra sur les promesses faites en 2015 quand il avait annoncé qu’il entamait son dernier mandat contesté même par quelques uns de ses proches : «Nous ne nous reprochons de rien, j’ai eu gain de cause, au niveau des juridictions nationales et même régionales. Ces instances ont reconnu le caractère légal de ce mandat. Il faut que ceux qui l’ont contesté me dédommagent».
Plusieurs ambassadeurs accrédités au Burundi ont été invités à prendre part à ce congrès spécial du Cndd-Fdd. Ceux de l’UE, de Chine, de Russie, de Turquie…Des délégations des partis au pouvoir des pays de la région et de quelques pays amis ont été également invitées à Gitega.
En raison des liens « très forts entre les deux formations », le représentant du parti au pouvoir en Tanzanie, CCM(Chama Cha Mapinduzi) aura le privilège de prononcer un discours. La majorité des ambassadeurs du Burundi à l’étranger seront également conviés à suivre cette grand-messe du parti au pouvoir, leur parti.