Jeudi 21 novembre 2024

Société

Etats généraux de l’Education en vue : Les acteurs du secteur en attente de réformes profondes

25/01/2022 Commentaires fermés sur Etats généraux de l’Education en vue : Les acteurs du secteur en attente de réformes profondes
Etats généraux de l’Education en vue : Les acteurs du secteur en attente de réformes profondes
Cassien Gashirahamwe : « Il faut s'asseoir ensemble pour voir comment contourner les contraintes liées à la crise de 2015. »

La Coalition Éducation pour tous « Bafashe bige » souhaite une réflexion sur la qualité de l’éducation en constante régression, un syndicaliste demande une revalorisation de l’enseignant tandis qu’un expert en éducation est pour une redéfinition complète du projet de l’école burundaise.

Pour la Coalition Education pour tous « Bafashe bige », les Etats généraux viennent à point nommé. « Il faut que les gens se mettent ensemble, réfléchissent et avancent des stratégies pour résoudre certains problèmes », précise Cassien Gashirahamwe, vice-président de cette coalition.

Et de rappeler que lors des Etats généraux de 2014, différents défis de l’éducation ont été analysés et que des recommandations ont été formulées. « De très bonnes recommandations pour relever tous les défis en matière de l’éducation. » Malheureusement, regrette-t-il, toutes les recommandations n’ont pas été mises en œuvre.

Avec la crise de 2015, le vice-président de la coalition Éducation pour tous « Bafashe bige », explique que certains partenaires et bailleurs ont gelé leurs fonds : « Le système éducatif n’a pas été épargné. C’est-à-dire que beaucoup de fonds ont été gelés alors que c’étaient beaucoup plus les partenaires, les bailleurs, qui devraient aider. »

D’après M. Gashirahamwe, il y avait même un fonds qu’on appelait Fond commun Éducation qui servait à améliorer la qualité de l’éducation, mais malheureusement qui a été aussi gelé. « Les stratégies qui ont été proposées n’ont pas été exécutées suite à une contrainte. » Maintenant, propose cette coalition qui œuvre dans le secteur de l’enseignement, « il faut s’asseoir ensemble pour évidemment voir comment contourner les contraintes liées à la crise de 2015 ».

Au cours des Etats généraux à venir, le vice-président de la coalition « Bafashe bige » estime que des réflexions doivent être menées sur tous les points notamment la multiplication des salles de classe et des bancs pupitres. « Car aujourd’hui encore, des enfants étudient assis à même le sol », se désole M. Gashirahamwe.

Il évoque aussi la qualité de l’éducation en constante régression suite aux mauvaises conditions d’apprentissage. Cassien Gashirahamwe revient ensuite les supports pédagogiques, c’est-à-dire le matériel didactique qui manque cruellement. Pour lui, il faut étudier comment rendre disponible le matériel didactique et avoir des enseignants suffisants et qualifiés et un encadrement de proximité.

« Améliorer les conditions de vie de l’enseignant »

Désiré Nisubire : « Il ne faut pas chercher la qualité de l’enseignement auprès de celui qui œuvre dans des conditions assez précaires. »

Les États généraux de l’Éducation sont également très attendus du côté du Syndicat du Personnel Enseignant de l’Université du Burundi (SPUB). « Il y a trop de problèmes auxquels il faut trouver des solutions ensemble », avance Désiré Nisubire, président du syndicat.

« On remarque sans se tromper que, de toute façon, les connaissances des étudiants ont franchement baissé », a-t-il affirmé. Selon lui, à la faculté de médecine où il travaille, on constate généralement un abaissement du niveau des étudiants. Et de se demander où se situe le problème : « Est-ce que c’est au niveau le plus bas, au niveau du milieu, au niveau de l’université ou au niveau des enseignants ? On n’en sait rien.»

Il faut alors pour lui aller au fond des choses pour trouver le nœud du problème. « Une nation est obligée de former les futurs cadres, les futurs employés des industries et même dans l’enseignement. Le pays a toujours besoin de gens instruits avec rigueur et d’une manière rationnelle ».

Il se dit indigné de ce que des étudiants soient incapables de bien formuler des phrases en français ou de saisir des notions de base en chimie et en biologie alors qu’ils en ont besoin pour franchir leur parcours universitaire.

L’autre aspect qui suscite l’attention du SPUB, c’est l’amélioration des conditions des enseignants. Car, indique son président, si les enseignants ne sont pas valorisés dans la société, le rendement s’en va de soi. « Il ne faut pas chercher la qualité de l’enseignement auprès de celui qui œuvre dans des conditions assez précaires».

Ce syndicaliste et enseignant d’universités rappelle le gel des annales chez les enseignants qui, observe-t-il, provoque chez les enseignants des défis énormes. Il souhaite que ce que l’on appelle les notions de logement des enseignants soient discutées pendant les Etats généraux en vue. A l’université, déplore-t-il, les indemnités de logement sont de 35% alors que dans d’autres structures de l’Etat elles sont de 60%. Et d’avertir : « Quand un pays n’investit pas pour améliorer la qualité des enseignements et la qualité de vie des enseignants, ce pays va sombrer dans l’abîme. Par ce que la production va être médiocre. »

« Eviter la démarche de 2014 »

Pour Libérat Ntibashirakandi, expert en éducation, il faut une redéfinition complète du projet de l’école burundaise. C’est-à-dire, explique le professeur, une école qui définit clairement le produit sortant du système éducatif burundais. « Le projet de l’école permettra de dire dans 10 ans, dans 20 ans, dans 30 ans, le citoyen burundais devrait avoir telle compétence. » Ntibashirakandi estime que c’est la seule façon de préparer les gestionnaires du Burundi de demain.

« Si c’est pour faire la même chose qu’en 2014, ces Etats généraux ne sont pas nécessaires », prévient cependant le professeur d’université belgo-burundais. Il considère qu’après les Etats généraux de 2014, la qualité de l’enseignement s’est complètement détériorée. « Les réformes se faisaient en désordre sans aucune réflexion préalable, sans consulter les experts d’où la situation d’aujourd’hui ».

Si ces états généraux avaient produit des résultats, observe le professeur, on n’en organiserait pas d’autres en moins de 8 ans. En plus pour lui, en 2014, les États généraux de l’enseignement n’avaient pas l’objectif de refonder complètement le système éducatif burundais. Il trouve que les objectifs étaient autres, notamment la mise en place de la pré-bourse pour les étudiants de l’Université du Burundi qui a été acté au cours de ces états généraux.

« C’était politisé. J’espère que les prochains états généraux seront organisés autrement ». Pour lui, les états généraux de 2014 ont été une réunion comme d’autres. « Rien n’a permis d’améliorer la qualité de l’enseignement. » Ce qu’il faut discuter lors des états généraux prochains, se résume M. Ntibashirakandi, c’est le projet de l’école qui produira d’ici 20 ans, 30 ans, un citoyen moderne qui a des compétences pour résoudre des problèmes, qui respecte les droits de l’Homme, qui a les valeurs d’Ubuntu, qui respecte l’environnement, les droits des enfants, les droits des femmes, doté d’une éthique, etc.

Pour rappel, l’annonce de la tenue des états généraux de l’éducation au cours du 3e trimestre de l’année 2021-2022 a été faite par le ministre François Havyarimana en charge de l’Education, lundi 3 janvier. C’était lors d’une réunion hebdomadaire avec les hauts cadres de son ministère. « C’est très simple, cela fait un moment que d’autres ont eu lieu, c’est donc une évaluation des précédents et formulations des recommandations pour l’état actuel », livre un haut cadre du ministère qui était présent dans la réunion.

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