Depuis le mois de juin 2019, le Burundi fait face à une importante épidémie de choléra. Plus de 1.000 cas ont été enregistrés, la majorité à Bujumbura. Grâce à la réponse rapide soutenue par Médecins Sans Frontières (MSF), l’épidémie n’a presque pas fait de victimes. Le dernier centre de traitement a ouvert ses portes début octobre à Bujumbura. Reportage.
Extrêmement contagieux, le choléra se transmet par l’ingestion d’une bactérie d’origine fécale – Vibrio cholerae – présente dans les eaux sales ou stagnantes. Provoquant diarrhées et vomissements, le choléra entraîne une rapide déshydratation et, sans prise en charge rapide, peut tuer en quelques heures.
« Mes deux enfants sont tombés malade dimanche et ont commencé à avoir la diarrhée », explique Sandrine, une patiente du centre de traitement du choléra appuyé par MSF à Bujumbura. « Le premier centre de santé où je les ai emmenés n’avait diagnostiqué qu’une simple diarrhée. Mais leur état se détériorait rapidement et ils ont été emmenés en ambulance ici. Deux jours plus tard, mon troisième enfant les y rejoignait. Je ne sais pas comment ils sont tous tombés malades. Finalement, je suis également tombée malade et j’ai aussi été admise ici. »
Une réponse immédiate
Endémique sur toute la bande de terre qui longe le lac Tanganyika et la rivière Rusizi, le choléra affecte en moyenne 200 à 250 personnes par an au Burundi. Mais tous les cinq à six ans, le pays connaît un pic de cas. Lors de l’épidémie en 2013, 936 personnes avaient contracté le choléra dans les provinces de Bubanza et Cibitoke, faisant 17 victimes.
« Cette année, l’épidémie a été particulièrement rapide car elle a touché Bujumbura » explique Julien Binet, représentant légal de Médecins Sans Frontières au Burundi. « Vu l’ampleur de l’épidémie et les risques encourus, nous avons tout de suite collaboré avec les autorités pour soutenir les centres de traitement. »
Depuis des années, MSF est la principale organisation humanitaire appuyant le Ministère de la santé et les autorités locales dans la prise en charge des patients atteints de choléra. Selon les années, cette collaboration étroite s’est traduite par la donation d’intrants médicaux, la formation du personnel, la sensibilisation des communautés et au besoin par la mise en place de centres de traitement du choléra.
« Bien avant la déclaration officielle de l’épidémie de juin, les équipes de MSF soutenaient déjà la prise en charge des cas survenus dans la province de Rumonge », poursuit Julien Binet. « Ce soutien s’est renforcé au fil des mois et, grâce à la rapidité de la riposte, il n’y a presque pas eu de victimes malgré le grand nombre de cas. »
Un nouveau centre à Bujumbura
Aujourd’hui, MSF soutient les trois principales structures de traitement du choléra au Burundi. Ses équipes assurent en priorité la supervision et la formation du personnel national. L’objectif est d’offrir la prise en charge gratuite des patients tout en renforçant les capacités du personnel de santé publique. Face à une maladie intimement liée au manque d’accès à l’eau potable, MSF a également installé des réservoirs d’eau de grande capacité à Bujumbura, ainsi qu’à Rugombo et Ndava, dans la province de Cibitoke.
Le dernier centre de traitement du choléra a ouvert ses portes début octobre à Bujumbura. Mis sur pied par MSF en deux semaines, ce centre d’une capacité de 50 lits est devenu la structure de traitement de référence de la ville.
« Ma fille est arrivée au centre très affaiblie, avec des bourdonnements dans les oreilles, des vomissements et de la diarrhée, » explique Chany, dont la fille de 3 ans, Shemsu, a quitté le centre il y a plusieurs jours. « Grâce aux soins apportés dans le centre, il ne lui a fallu que quelques jours pour se remettre sur pied. »
« Avant de sortir, on nous a expliqué comment éviter la maladie. Je passe le message autour de moi, mais certains voisins pensent encore que le choléra ne les atteindra pas parce qu’ils sont habitués à la saleté. Ils pensent qu’ils sont immunisés. Ça prouve qu’ils ne connaissent pas la maladie. »
La sensibilisation, un enjeu clé
Sensibiliser la population est fondamental pour lutter contre la propagation de l’épidémie. Même si les défis en matière d’assainissement, d’accès à l’eau ou aux sanitaires restent colossaux au Burundi, des mesures simples et efficaces permettent de prévenir la contamination.
En cet après-midi d’octobre, des agents de santé communautaires appuyés par MSF sillonnent le marché de Buterere pour faire connaître ces mesures. Munis de leurs mégaphones, ils expliquent l’importance de se laver les mains avant et après le repas, de bien cuire les aliments et de laver les fruits pour éliminer la bactérie. Ils indiquent également comment reconnaître les premiers symptômes et que faire en cas de doute.
« Toute ma famille a attrapé le choléra », explique Zacharia, qui est sorti hier du centre de traitement de Bujumbura après une semaine de réhydratation et de soins. « Heureusement, tout le monde est rentré guéri. Aujourd’hui, on sait dans la famille que se laver les mains peut nous sauver la vie. Mais tout le monde devrait le savoir… »
Photos : ©MSF/Evrard NGENDAKUMANA