Manque de financement, insuffisance d’information sur la situation socioéconomique du Burundi, une formation qui ne favorise pas l’esprit entrepreneurial, l’absence des réseaux des entrepreneurs sont, entre autres, les défis, auxquels fait face l’entrepreneuriat des jeunes au Burundi. Le ministère de l’Industrie se montre rassurant.
Depuis lundi 18 novembre, les entrepreneurs burundais se joignent au monde entier pour célébrer la semaine mondiale de l’entrepreneuriat sous le thème « L’entrepreneuriat inclusif pour un développement durable ».
Même si l’entrepreneuriat se développe, les entrepreneurs témoignent que le chemin à parcourir est encore long. Ces derniers déplorent être confrontés à plusieurs contraintes lorsqu’ils décident de lancer leurs entreprises.
« L’esprit d’entrepreneuriat commence à se développer au Burundi. Les jeunes sont conscients qu’ils devraient créer l’emploi. Mais, ils font face à de nombreux défis », fait savoir Alexandre Nduwimana, un jeune entrepreneur de l’association Empower Burundi.
Selon lui, la formation scolaire acquise ne permet pas aux jeunes de se lancer, créer ou innover. Ces jeunes n’ont jamais exercé une autre activité au cours de leurs études.
A la sortie, peu préparés, ils s’orientent vers la recherche du travail car ils ne peuvent pas créer leur l’emploi, explique le jeune entrepreneur. La majorité est contrainte d’attendre une éventuelle embauche pendant plusieurs années.
Par ailleurs le manque d’information socio-économique constitue un autre défi de taille, déplore Alexandre Nduwimana. De ce fait, ces jeunes ne sont pas capables d’identifier les opportunités présentes sur le marché local.
Ainsi, plusieurs foires-expositions organisées au Palais des Arts sont dominées par des produits kenyans, ougandais, tanzaniens, ou égyptiens. Du coup, ces entrepreneurs étrangers profitent du marché local. Ceci montre que les entrepreneurs burundais ne sont pas informés.
La culture freine l’entrepreneuriat
« Il existe un autre défi auquel les entrepreneurs doivent faire face, mais malheureusement dont on ne parle pas beaucoup», révèle-t-il. Il s’agit de la barrière culturelle. Malgré le pas déjà franchi, la culture entrepreneuriale n’est pas encore suffisamment développée au Burundi.
Beaucoup de gens font des études pour être embauchés et faire une carrière. La mentalité burundaise considère ceux qui se lancent dans l’entrepreneuriat comme des gens désespérés de n’avoir pas pu décrocher un emploi dans le secteur public ou privé. Il arrive que leur projet ne soit pas soutenu par leurs proches et qu’ils décident d’abandonner.
Pierre Claver Nduwumwami, directeur général de Burundi business incubator (BBIN), déplore que les jeunes ne puissent pas réaliser leurs projets à cause du manque de financement : « La plupart des jeunes que nous formons manquent de moyens pour commencer. »
Ce cadre fait savoir que les banques exigent toujours des garanties dont les jeunes ne disposent pas. Et d’espérer que peut-être que la situation va changer avec la mise en place de la banque des jeunes.
Cependant, le directeur de BBIN encourage les jeunes à se lancer avec le peu de financements dont ils disposent. Il soutient qu’il y a des jeunes à Bubanza, Ngozi et Gitega qui partent de rien mais parviennent à se positionner sur le marché burundais et régional. Ils vendent des champignons, de la farine composée. « Et c’est une nouvelle dynamique qui va donner des fruits bientôt ».
M. Nduwumwami fait remarquer que l’entrepreneuriat peine à décoller au Burundi. « Les Burundais n’ont pas la vocation d’entreprendre. Ils font l’entrepreneur par défaut. Ils ont peur de prendre le risque. »
Pour eux, entreprendre est une option provisoire en attendant de trouver le boulot parfait ou encore, ils choisissent cette voie parce que toutes les portes étaient fermées. Ceux-ci ont peu de chance de réussir. Par contre, les entrepreneurs par vocation ont de fortes chances de réussir car l’entrepreneuriat est avant tout une question de vocation voire de de passion.
Ainsi, l’entrepreneuriat burundais est davantage subi que choisi. C’est souvent suite à l’absence d’opportunités au sein du secteur public ou privé, que certains finissent par se lancer dans l’entrepreneuriat pour générer un revenu minimum.
Faible réseau des entrepreneurs
L’absence des données à tous les niveaux freine l’entrepreneuriat. Par exemple, il n’y a pas des données actualisées sur le taux de chômage, des jeunes diplômés…
Selon lui, les véritables leviers de la croissance de l’entrepreneuriat se résument finalement dans les conditions névralgiques qui permettront d’activer le passage des intentions entrepreneuriales à l’acte entrepreneurial. Ces conditions sont la formation, le financement et l’accompagnement.
Quant à la vice-présidente de la Chambre fédérale du Commerce et d’industrie du Burundi, Gynette Karirekinyana, les entrepreneurs doivent former un réseau pour pallier ensemble les différents défis. Selon elle, l’union fait la force. Le manque d’un réseau fort des entrepreneurs freine le développement de l’entrepreneuriat alors que c’est un élément très important. Cette femme d’affaires soutient que le réseautage est un excellent moyen de se créer des relations professionnelles qui permettront d’accéder à des opportunités nouvelles.
Du côté du gouvernement, Jean Marie Niyokindi, ministère du Commerce, de l’Industrie et du Tourisme, rassure les entrepreneurs : « Nous avons adopté une stratégie nationale de développement du secteur privé, dont un des objectifs stratégiques est le soutien à l’entrepreneuriat. » Quatre objectifs stratégiques ont été identifiés pour renforcer l’entrepreneuriat : une amélioration des infrastructures nationales, un meilleur accès au financement, la valorisation du capital humain et l’accès à l’information.