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En avant… Marche !

05/05/2013 Commentaires fermés sur En avant… Marche !

Iwacu dresse une série de portraits de Burundais qui ont vécu en acteurs, témoins ou simples citoyens des moments forts de notre histoire. Cette semaine témoignage de Bernard Rubeya, l’officier qui a commandé le premier défilé militaire du Burundi indépendant.

<doc3466|left>Bernard Rubeya parle avec flamme de ce défilé qu’il a commandé. Il était alors jeune capitaine de 25 ans. Il était entré à l’armée après des études dans le groupe scolaire d’ Astrida, au Rwanda, pépinière de l’élite de l’ époque.

Les officiers belges ne faisaient aucune discrimination, et, selon Rubeya, la composition ethnique de l’armée « reflétait bien la proportion ethnique de la population. » Il sera envoyée pour une formation commando en Belgique, à Arlon, précise-t-il.

Le 30 juin 1962, à minuit, à l’intérieur de l’actuel stade FFB, près de l’hôtel Source du Nil, le drapeau belge descend lentement de son mât. Le drapeau du Burundi monte. Le peloton d’honneur était commandé par un sous-lieutenant, un certain Nicodème Kamurari. « La cérémonie était sobre, je dirais même assez discret », raconte Bernard Rubeya. Ce soir là, une minute après minuit, le Burundi est indépendant. « Le premier ministre Muhirwa a remis plié le drapeau belge à un colonel wallon du nom de Henniquiau je crois. » Cette retenue s’explique, d’après Rubeya, par les événements qui ensanglantaient la sous-région : « Lumumba avaient été tués, des massacrés avaient lieu chez notre voisin de l’ouest, des réfugiés nous arrivaient du Congo et, au nord, le Burundi accueillait des rescapés des tueries de la « révolution sociale. »

Les « Trois glorieuses »

<doc3465|left>Selon Bernard Rubeya, les vraies festivités auront lieu au cours de ce qu’il appelle les « trois glorieuses », les 27, 28 et 29 septembre. Et c’est ce jour du 27 septembre 1962 qui l’a marqué à vie. Parmi les plus haut gradés de cette époque, six capitaines, il est choisi pour commander les troupes qui vont défiler devant le roi. « C’est un moment inoubliable. » Des gens pleuraient de joie, se souvient l’ancien officier. La fête de l’indépendance a duré trois jours, dans les cités c’étaient de la musique jour et nuit. « Les gens buvaient chantaient, dansaient.  La jeune génération ne sait pas les frustrations que nous endurions. Les Belges nous disaient que nous étions idiots de demander l’indépendance alors que nous ne sommes pas capables de fabriquer une aiguille ! »

Après l’indépendance, les militaires belges ne sont pas partis tout de suite. « Ils sont restés pour nous aider à organiser l’armée. Tout était à faire.» D’après Rubeya, les Belges ont partagé en deux parts égales le matériel qui était jusque-là commun au ruanda-urundi. « Matériel roulant, stock d’armes, munitions, tout a été partagé en deux » explique le retraité.

Avec l’avènement de la république, après le renversement de la monarchie par un jeune capitaine, Michel Micombero, le pays va vivre des épisodes très douloureuse. Avec tristesse, Bernard Rubeya raconte : «  J’ai perdu dans les purges beaucoup d’amis, nous étions six capitaines, trois Hutu et trois Tutsi. Les Hutu ont été tués. » Il se souvient notamment de Karorero, un camarade de promotion, formé comme lui en Belgique. Que pense-t-il de Micombero ? « Je l’ai bien très bien connu. Pourtant, il n’a pas bougé le petit doigt quand on m’a faussement accusé de tremper dans un complot pour faire un coup d’Etat dans ce que l’on a appelé {le complot des gens de Muramvya.} Le régionalisme était à son paroxysme. » Bernard Rubeya sera gracié in extremis et condamné à de longues années de prison.

Sur l’ancien président, par pudeur, l’ancien officier ne veut pas s’étendre. « Micombero était très mal entouré. Il n’était pas ferme. Souvent, il prenait des décisions très tard la nuit. Vous comprenez ce que je veux dire.»

Bernard Rubeya s’occupe beaucoup par la lecture, « j’ai une caisse de livres d’une tonne », raconte-t-il avec fierté. Pour vivre, le retraite fait du « décorticage du riz, de la fabrication de l’aliment pour bétail. » Ses enfants sont tous grands, « j’ai même 12 petits enfants » précise-t-il.
Dans son salon, Bernard Rubeya a placé une grande photo où il commande le premier défilé militaire du Burundi indépendant. Le jour le plus important de la vie de l’officier S0008 de la Matricule.

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