La boisson Skol n’est plus disponible sur le marché burundais. Pour les commerçants, le manque à gagner est énorme. Dans les bars, les serveurs ont perdu leur emploi. Le ministère du Commerce dit ignorer la raison du manque de cette boisson en provenance du Rwanda.
« Depuis le mois de septembre, un capital de 6 millions BIF investi dans le commerce du Skol ne génère rien », se lamente Célestin Mutima, propriétaire du Bar-resto « Nobel. » Il fait savoir que cette somme a été seulement investie dans l’achat des tables et chaises plastiques de Skol de couleur jaune. Ce commerçant indique que si cet argent avait été investi dans une autre affaire, il aurait rapporté facilement 600 mille BIF.
Ce jeune homme témoigne qu’il utilisait 8 millions BIF pour s’approvisionner en boisson Skol. « Je ne me plaignais pas. Je gagnais plus d’un million et demi par mois ».
Il tient à préciser que cette bière rwandaise avait une grande marge bénéficiaire par rapport aux autres boissons. Elle rapportait 8000 BIF par caisse de vingt bouteilles. Par ailleurs, Skol était devenu l’une des boissons préférées par le consom
mateur à revenu moyen.
Là où le bât blesse, c’est que le manque de produits Skol a provoqué également la baisse du chiffre d’affaires d’autres boissons et des produits de la cuisine. D’après lui, suite au manque de Skol, le bénéfice a chuté de plus de 40%. Cet homme d’affaires explique que les consommateurs de cette bière ne venaient pas seuls. Ils étaient accompagnés par leurs familles, amis et parentés consommant d’autres boissons. Ainsi, ce bar en profitait pour écouler les produits de la cuisine.
La suspension de la commercialisation de ce produit n’a pas seulement affecté les commerçants, les serveurs ont été touchés aussi. Au bar-resto « Nobel », cinq serveurs qui avaient été recrutés pour servir Skol sont en chômage technique. « C’est triste de mettre au chômage un employé qui travaille bien. Mais, nous n’avons pas de choix. Ils n’ont pas de travail », indique le propriétaire.
La situation risque de perdurer
Mutima confie qu’il ne pouvait pas garder des employés alors qu’il ne sait pas quand cette boisson sera de nouveau disponible. « C’est déplorable. Personne ne sait où se trouve le problème». Cette situation risque de perdurer. Il explique que son fournisseur ne le rassure pas, il a même déjà pris les caisses vides.
Mêmes lamentations chez le gérant du bar « La confiance » située au centre-ville de Bujumbura. Le manque à gagner est énorme. Les consommateurs du Skol ne viennent plus. « Regardez la cour extérieure est vide. Il y a trois mois, cette rue était occupée par plusieurs consommateurs», s’indigne-t-il.
Depuis le mois de septembre, les serveurs et les agents commerciaux sont les premières victimes de l’arrêt de commercialisation de cette boisson. Ils ont perdu leur emploi. Ces hommes et femmes sont plongés dans l’amertume et le désespoir.
« Je ne sais où mettre la tête. Je suis au chômage depuis le mois de septembre », déplore l’un des agents commerciaux de l’entreprise fournisseuse de cette boisson. Par ailleurs, précise cette même source, je ne suis pas le seul. Cinq agents commerciaux sont aujourd’hui au chômage. « Imaginez le calvaire que nous endurons avec la cherté de vie actuelle». Cet emploi était leur seule source de revenus. Parmi eux, il y a des pères et mères de famille. Ils ont des familles à prendre en charge. Ils payaient le loyer et frais de scolarité. Leurs familles croupissent dans la misère.
Le chômage s’invite
« Je ne comprends pas ce qui se passe. Nous avons été mis au chômage technique alors que la situation financière de notre entreprise est bonne », s’indigne notre source.
D’après elle, cet arrêt brusque est tombé au moment où cette boisson commençait à gagner le marché. « C’était un coup de massue pour nous, qui avions sué pour faire des publicités et des promotions. », fulmine-t-elle. Nous espérions récolter le fruit de notre labeur et cette bière gagnait du terrain.
Cette source fait savoir qu’elle a commencé la promotion de cette bière rwandaise depuis 2010. Les consommateurs connaissaient déjà la bière Skol, introduite en 2009 au pays.
« Pourquoi un tel produit qui a créé l’emploi n’est plus disponible sur le sol burundais alors que la brasserie rwandaise n’a aucun problème ? », s’interroge cette source.
Même son de cloche chez John, qui était serveur au bar-resto « Nobel ». Ce père de famille ne sait plus à quel saint se vouer. Depuis le mois de septembre, il n’a pas encore payé le loyer. « Cet emploi était ma seule survie». Ce serveur témoigne que même si le patron lui demandait de travailler sans être payé, il accepterait. Car, explique-t-il, les clients étaient des amis. « Ils me donnaient toujours un pourboire. Je recevais plus de 30 mille BIF par semaine. » Pour le moment, John craint que le propriétaire le chasse de la maison qu’il loue.
Ces commerçants, serveurs et agents commerciaux demandent le déblocage de la situation.
A l’origine
Un agent commercial, sous couvert d’anonymat d’une des sociétés qui vend ce produit, révèle la genèse du problème : « Le problème d’importation de cette bière rwandaise date du mois d’août.»
C’est mois d’août, deux véhicules qui transportaient des caisses de Skol du Rwanda étaient bloqués à la frontière burundo-rwandaise située à Kirundo. Selon cette source, ces deux sociétés ont négocié avec l’administration. Après quelques jours, ces véhicules ont traversé la frontière.
« Nous avons écoulé cette boisson, mais depuis lors aucun camion n’a été autorisé d’entrer sur le territoire burundais. », indique notre source
Cette boisson d’origine rwandaise a inondé le marché burundais depuis 2010. Aujourd’hui, deux sociétés assurent l’importation.
A ce propos, le secrétaire permanent au ministère du Commerce, Samson Ndayizeye, n’y va pas par quatre chemins : « J’ignore les raisons du manque de cette boisson rwandaise sur le territoire burundais. »
Iwacu a essayé de contacter le représentant de l’entreprise Skol au Burundi en vain.