Provocations, affrontements, injures, échauffourées. Tels sont quelques comportements qui ont caractérisé les jeunes affiliés aux partis politiques lors des élections. Aujourd’hui, des voix s’élèvent pour leur demander de ne pas récidiver lors des prochaines élections.
« Que ce soit en 2015, en 2020, il y a eu des affrontements entre les jeunes de différents partis politiques. Des cas de blessures ont été identifiés. Mais, quand vient le moment de partager les postes, le constat est que ces jeunes ne sont pas mis en avant. Au contraire, certains ont été arrêtés, emprisonnés voire tués », déplore I.L, un habitant de Mutanga-Sud, zone Rohero, commune Mukaza.
D’après lui, les jeunes sont souvent exploités politiquement. « C’est avec des boissons, de l’argent, des promesses fallacieuses de contrat de travail, des bourses d’études, …. qu’ils tombent dans le piège des politiciens. C’est vraiment regrettable. »
A l’approche des législatives de 2025, cet homme, la soixantaine conseille à la jeunesse de ne plus se laisser entrainer dans la violence. « Normalement, les jeunes devaient se focaliser sur les études, leurs projets d’avenir. Ils partagent le même destin. »
Selon lui, il ne leur est pas interdit de militer dans les partis politiques mais, « il faut le faire de façon intelligente sans se laisser embrigader dans la violence. » I.L demande d’ailleurs aux politiciens véreux de laisser libre la jeunesse.
Même message du côté des responsables des ligues des jeunes dans les partis politiques. « Nous avons commencé à enseigner nos jeunes sur la Constitution et le code électoral. Car, tu ne peux pas participer dans un jeu sans toutefois savoir ses règles », indique Alain Jules Sibomana, le représentant du conseil des jeunes du parti Frodebu.
Il affirme qu’au sein de son parti, la violence ne fait pas partie de nos principes. « Plutôt on incite nos jeunes à dialoguer avec les jeunes des autres partis. Car, la différence de leurs idées contribue au renforcement de la démocratie. »
De son côté, Arnaud Irakoze, le secrétaire général des Jeunes Révolutionnaires de Rwagasore (JRR), trouve que durant la période électorale, les jeunes doivent être caractérisés par un comportement pacifique, le respect de la loi, être à l’écoute d’autrui.
« C’est mieux que les jeunes participent à la politique. Mais, ils doivent bien analyser les messages des politiciens, choisir entre le bien et le mal, voir que leur contenu corrobore avec la réalité. »
D’après lui, les jeunes militants des partis politiques doivent être à l’écart des politiciens qui les incitent à la violence, à la provocation, aux insultes pour atteindre leurs postes.
« Qu’ils sachent que nos différences ne sont pas un problème, que du choc des idées jaillit la lumière. Qu’on peut tous contribuer au développement malgré des idées divergentes.»
M.Irakoze demande aux dirigeants des partis politiques d’avoir un comportement responsable, un comportement parental envers leurs jeunes partisans et de mettre en avant des solutions sur le chômage.
Pour sa part, Aimable Nkunzumwami, le représentant des jeunes pro-Rwasa souhaite voir de bonnes élections, surtout des élections libres et pacifiques. Il demande aux jeunes du parti CNL de rester calmes et d’éviter tout genre de provocation.
Nous avons contacté le représentant de la League des jeunes Imbonerakure du Cndd-Fdd mais son téléphone était injoignable.
La société civile et les experts passent le même message
« Chaque burundais doit œuvrer pour la paix dans l’intérêt de tous, être en bonne relation avec les autres, utiliser un bon langage et éviter tout genre d’exploitation politique susceptible de créer des conflits », prêche Gérard Hakizimana, le président et représentant légal de la Force de lutte contre le Népotisme et le Favoritisme (Folucon.F).
Il précise que la violence cause toujours des ennuis, des problèmes non seulement aux autres mais aussi aux instigateurs d’une façon ou d’une autre. Pour lui, les jeunes doivent adopter un comportement pacifique et respecter la loi. Il appelle ainsi les jeunes à ne pas tomber dans les pièges des politiciens.
« Il faut une éducation interne, profonde et un changement d’idée afin que les jeunes burundais et hommes politiques puissent adopter un comportement responsable durant la période électorale », souligne, pour sa part, Dr Sururu Adolphe, professeur à l’Université du Burundi et expert en communication non-violente.
En effet, explique-t-il, les gens communiquent ce qu’ils vivent au quotidien : « Quand nous vivons des situations d’exclusion, d’intolérance, c’est dur vraiment de pouvoir communiquer de manière inclusive et non-violente. En fait, les communications qui sont utilisées pendant les campagnes électorales reflètent le quotidien des citoyens dans leurs communautés. »
Selon ce professeur, la non-violence touche principalement le cœur : « Est-ce que je me sens impliqué dans la construction avec l’autre ? Parce que nous disons que la paix, c’est lorsque les dirigeants et les dirigées se sentent en harmonie, en symbiose pour vivre ça. C’est quand les forts se sentent compris, mais il faut aussi que les faibles se sentent protégés et soutenus, et compris aussi. »
Malheureusement, il déplore que durant les campagnes électorales, la loi semble être oubliée. « Les chansons de la haine, les slogans, les caricatures que les politiciens utilisent, les discours, ….bref, une sorte d’animosité envers l’autre s’installe. La cohabitation pacifique reste au niveau des langages mais dans les faits, elle ne transparaît pas. »
M.Sururu appelle les jeunes à ne pas être embrigadés et de penser plus à leur avenir.