Une déclaration de la Conférence des évêques catholiques du Burundi fait état de leur préoccupation face à l’intolérance politique qui sévit dans le pays.
Connu pour leur franc-parler, les évêques burundais n’ont pas dérogé à la règle. Dans cette déclaration, ils accusent frontalement le parti au pouvoir de se confondre aux autorités administratives. Ils épinglent la jeunesse du parti de l’Aigle. Pour eux, les Imbonerakure se substituent aux forces de l’ordre sans qu’ils en aient les prérogatives. « Cela risque de créer du désordre pouvant entamer le bon déroulement des élections de 2020 ».
Alors que la Constitution consacre le multipartisme, les prélats rapportent que les partis politiques sont malmenés dans plusieurs provinces du pays. En dépit des appels au calme de l’Etat, ils affirment sans ambages que les opposants sont toujours persécutés voire tués.
Face à ces exactions, les évêques dénoncent le « laxisme » de la justice. « Dans la plupart des cas, la justice semble traîner les pieds pour punir les coupables ». Selon eux, cela n’augure rien de bon pour les échéances électorales à venir. En outre, les évêques s’insurgent contre les enfants en bas âge embarqués dans la politique.
La conférence des évêques estime aussi que la pauvreté des burundais constitue un handicap au bon déroulement des élections de 2020. Dans ces conditions de précarité, les électeurs deviennent vulnérables et facilement manipulables.
Le sort des réfugiés burundais a été aussi évoqué. Que ces derniers puissent aussi participer au vote est leur souhait Cependant, ils insistent sur une chose : les réfugiés doivent rentrer de leur propre gré.
La déclaration des évêques catholiques sera lue, dimanche 22 septembre, dans toutes les paroisses du Burundi.
Réactions
Léonce Ngendakumana : « Les évêques voient tout. Ils savent tout»
« Les évêques ne sont pas les seuls à être inquiets. Nous le sommes tous car nos militants se voient interdits de travailler», indique le vice-président du Frodebu. D’ailleurs, il fait savoir que même le secrétaire du parti au pouvoir a dénoncé l’intolérance politique galopante. M. Ngendakumana félicite les évêques pour leur volonté de prévenir les dérapages en cette période pré-électorale. « Ils ont de la cote au sein de la population, ils voient tout et ils savent tout ». En ce qui concerne la jeunesse du parti qui se substitue aux forces de l’ordre, il affirme que c’est une triste réalité.
Abel Gashatsi : « Tout n’est pas parfait, mais la situation est plus ou moins stable »
Le président du Parti Uprona admet qu’il s’observe des cas d’intolérance politique. Mais, il nuance que ce ne sont que des incidents isolés : «Tout n’est pas parfait .Néanmoins, contrairement aux années antérieures, la situation sécuritaire est plus ou moins stable. »Selon M. Gashatsi, des initiatives sont prises par des présidents des partis politiques pour assainir l’environnement politique. Il indique qu’une réunion est prévue une fois par mois avec le ministre de l’Intérieur pour évaluer la situation sur le terrain. Quant aux accusations portées à l’encontre des Imbonerakure, le président du parti de Rwagasore prône un dialogue entre les évêques et le parti au pouvoir. « Il faut que les prélats rencontrent les responsables du parti au pouvoir pour qu’ils puissent prodiguer des conseils à cette jeunesse».
Jean De Dieu Mutabazi : « Nous appelons nos militants à condamner tout acte d’intolérance politique »
Pour le président du parti Radebu, le communiqué contient plusieurs conseils et des questions pertinentes. Face à l’intolérance politique soulevée par l’épiscopat burundais, M. Mutabazi affirme que lui et ses pairs ont enclenché une campagne de conscientisation pour l’éradiquer. « Nous appelons nos militants à condamner tout acte d’intolérance politique. Quant à l’administration, elle doit réagir en punissant les coupables ». Sur l’usurpation des fonctions dévolues aux forces de l’ordre par les militants du parti au pouvoir, M. Mutabazi fait savoir que les évêques n’ont pas été précis. « S’il y a eu des militants du parti au pouvoir qui se sont substitués à l’administration ou à la police, l’administration ou la police doit en référer à la hiérarchie supérieure ». En ce qui concerne les réfugiés, il assure qu’ils rentrent volontairement.