À l’occasion de la journée internationale des femmes, l’équipe Europe, composée de l’ambassade de l’Union européenne, de l’ambassade de Belgique, de l’Agence belge de développement (Enabel) et de l’ambassade des Pays-Bas, a organisé ce vendredi 7 mars un ciné-débat sur le thème :« Accès à la terre pour les femmes au Burundi et réflexion sur le droit coutumier. »
Ted Hunink, chef adjoint de mission et chef de coopération à l’ambassade néerlandaise au Burundi a ouvert cet évènement dédié à l’accès des femmes aux droits fonciers au Burundi.
« Si toutes les femmes et tous les hommes de ce monde avaient les mêmes droits et les mêmes chances, nous vivrions dans un monde meilleur aujourd’hui, » a-t-il affirmé d’emblée.
Il a précisé que par « meilleur », il entendait « un monde avec des communautés plus heureuses, une économie plus forte, une société plus saine, un monde plus pacifique. » En somme, « un monde où chacun en sortirait gagnant ».
Hunink a ensuite exprimé son honneur et son plaisir d’ouvrir cet événement, soulignant l’importance de la Journée internationale de la femme. « Cette journée est une occasion de rendre hommage aux avancées significatives obtenues par les femmes du monde entier dans leur lutte pour l’égalité des droits et des chances. C’est aussi un moment de réflexion sur les inégalités persistantes et les défis qu’il reste à surmonter. »

Hunink a mis en lumière l’importance du thème de l’accès des femmes aux droits fonciers au Burundi. « Ce thème mérite notre attention parce qu’il est de plus en plus évident que les pays qui garantissent l’égalité des droits fonciers entre hommes et femmes enregistrent un développement accéléré, » a-t-il expliqué. Il a cité des études démontrant les effets positifs de l’égalité des droits fonciers en Inde, au Pérou, en Éthiopie et au Rwanda.
Il a salué les progrès accomplis par le Burundi en matière d’égalité des droits fonciers, notamment sur le plan juridique. Il a mentionné la constitution burundaise, la ratification de traités internationaux, la jurisprudence de la Cour suprême et la pratique d’inscrire les noms des deux conjoints sur les certificats fonciers. « Ce sont tous des étapes significatives vers l’amélioration de l’autonomie et de l’indépendance des femmes, et je félicite le gouvernement avec ce projet », a-t-il déclaré.
Cependant, il a souligné la nécessité de poursuivre les efforts. « Malgré les avancées, il reste des chemins à courir pour garantir l’application à technique de l’égalité des droits fonciers. », a-t-il reconnu. Il a évoqué les cas où les lois coutumières et les traditions patriarcales continuent de restreindre l’accès des femmes à la propriété foncière.
Il a ensuite présenté le programme de l’événement, conçu avec l’appui de partenaires tels que Enabel, l’ambassade de Belgique, la délégation de l’Union européenne et l’ambassade des Pays-Bas. « Ce soir, nous nous efforçons de partager nos expériences, discuter des défis et réfléchir ensemble sur les actions nécessaires pour promouvoir l’accès équitable à la terre » a-t-il indiqué.
Hunink a mis en avant les contributions de l’ambassade des Pays-Bas à l’amélioration de la gouvernance foncière au Burundi. Il a cité la mise en place des premiers services fonciers communaux et le projet Amahoro, qui a permis à plus de 80% des ménages à Nyanza-lac d’enregistrer leur terre.
Il a réaffirmé la détermination de l’ambassade des Pays-Bas à poursuivre ses efforts pour l’égalité des droits fonciers au Burundi. « Car en fin de compte, nous aspirons tous, et pour tous, à vivre dans un monde meilleur », a-t-il conclu, souhaitant à tous une session inspirante.
Après ce discours d’ouverture émouvant, il y a eu la projection d’un film poignant « the letter », relatant les épreuves vécues par des personnes âgées au Kenya, accusées de sorcellerie et spoliées de leurs biens. Un panel de discussion s’est tenu. Ce panel était modéré par l’ambassadrice de l’Union européenne au Burundi, Elisabetta Pietrobon.
Le Dr Vénérand Nsengiyumva, sociologue, enseignant chercheur et chef du département de la socioantropologie à l’université du Burundi, spécialiste en genre et justice a déclaré : « ce film a une certaine réalité de ce qui se passe ici, au Burundi. Quand je faisais ma recherche sur la succession, j’ai trouvé des grand-mères qui avaient des difficultés parce que leurs enfants, surtout les garçons, les prenaient en justice pour revendiquer leur bien. »
Il a ajouté : « La différence, c’est qu’il y avait aussi des hommes âgés. Mais ici, au Burundi, ce n’est pas la même chose, les hommes sont respectés sur leurs terres peu importe leur âge. »

Sylvane Bizimana, magistrate, inspectrice de justice et responsable de la cellule genre au ministère de la justice a souligné l’action du ministère de la Justice : « Pour le ministère de la Justice, les droits de la femme sont respectés. Nous avons ressenti, justement, aux études juridiques en rigueur, aux instances judiciaires. Tout cela est mis en place ».
Toutefois, elle a reconnu : « Elles ont des problèmes. Des problèmes, justement liés au manque de moyens financiers. Mais avant tout, avant même qu’on n’arrive pas à définir ou à montrer ces problèmes de ressources financiers, il y a aussi un problème social, une mentalité patriarcale ».
Anatolie Ndayishimiye, membre de la CAFOB a partagé des témoignages poignants : « Les mamans sont chassées par leurs fils pour qu’ils récupèrent leurs terres. » Elle a expliqué le rôle de son organisation : « Alors nous, ce que nous faisons au niveau des centres, c’est pour accompagner ces mamans pour pouvoir les accompagner au niveau des juridictions parce que ça coûte de l’argent ».
Le Dr Nsengiyumva a mis en évidence l’évolution de la jurisprudence : « Il y a eu une grande évolution positive qui a été due à l’évolution de la jurisprudence, surtout au cours de la période coloniale. »
Il a cité des exemples concrets : « Par exemple, si je peux parler de la première jurisprudence, ça concernait les femmes, les veuves, c’est-à-dire à la mort du mari, si une femme n’avait pas mis au monde des garçons, s’il avait mis au monde des filles seulement, ou s’il n’avait pas eu d’enfants, à la mort du mari, elle était chassée complètement. »
Anne-Marie Ndayisenga, agricultrice et enseignante a décrit la situation au Burundi : « La femme n’a pas de droits sur la terre. Elle est dépendante de son mari. Elle a l’accès à cultiver, mais elle n’a pas accès à ses fruits, donc les fruits qui viennent de la terre. »
Elle a ajouté : « Nous avons aussi des autres conflits, et les mamans qui ont perdu leur mari et leurs enfants, elles les ont fait évacuer dans leur propre propriété. »
Ce débat, animé par l’ambassadrice de l’Union européenne au Burundi, a mis en lumière les défis persistants et a souligné l’importance de l’action collective pour garantir les droits des femmes à la terre au Burundi.
Dans son discours de clôture, David Leyseens, directeur pays Enabel au Burundi a souligné l’importance de l’égalité des genres et les efforts conjoints des partenaires internationaux.
Il a d’abord rappelé l’importance de la Journée internationale de la femme, affirmant : « Demain, le 8 mars, les femmes et leurs alliés du monde entier attireront un juste titre à l’attention sur l’importance de l’égalité entre les hommes et les femmes. » Il a ensuite souligné l’engagement des partenaires internationaux de développement, déclarant : « Pour nos partenaires internationaux de développement, il s’agit d’un thème important et transversal dans tout ce que nous faisons au Burundi ».
Il a ensuite cité des exemples concrets de l’engagement d’Enabel en matière d’égalité des genres : « Enabel via ce projet belge attache une grande importance au thème de l’égalité des sexes dans son projet d’éducation post-fondamental où les filles sont encore trop souvent privées d’opportunités dans leur développement personnel. »
Il a ajouté : « Dans nos projets agricoles et entrepreneuriaux, car au Bourgogne, les femmes sont les principaux entrepreneurs. » Et dans le domaine de la santé, il a mentionné qu’: « Enabel contribue à la gratuité des soins pour les femmes enceintes avec le soutien de l’Union Européenne ».
David Leyseens a également mis en avant les initiatives dans le domaine de la gouvernance : « Dans le domaine du gouvernement, en partenariat avec l’Institut Egmont de Belgique, les femmes leaders du gouvernement burundais sont aidées dans leur carrière. »
Il a souligné l’importance du genre dans les projets de justice, citant une étude sur les biais de genre et un appui à la réinsertion des femmes détenues à Ngozi.
Il a ensuite annoncé la participation de 30 femmes lauréates d’un concours de recrutement de magistrats, financé par l’Union Européenne, à la célébration de la Journée internationale de la femme. Il a remercié son collègue Yoann pour l’initiative d’organiser la projection du film.
David a exprimé sa gratitude envers les partenaires, notamment l’ambassade de Belgique et l’ambassade des Pays-Bas, pour leur engagement en faveur de l’égalité des genres. Il a particulièrement salué l’Union Européenne, dans un contexte où les programmes et les ambitions en matière de diversité sont mis en cause par la résurgence de l’Alpha male dans les relations internationales, déclarant : « L’Union Européenne et ses dirigeants osent encore défendre les valeurs, les normes et les normes d’égalité. » Il a ajouté : « Et lorsque je regarde ma fille de 10 ans dans les yeux, je suis fier d’être Européen. »
Le directeur Pays Enabel a conclu en remerciant tous ceux qui œuvrent pour l’égalité des genres au Burundi : « Merci aux burundais aux panélistes, mais aussi à toutes les femmes et les hommes qui œuvrent pour ce sujet important de la société burundaise ».
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