Un analyste français s’est demandé ce qui se passe lorsqu’on réunit un politique, un humoriste, un communicant, et un sondeur ? Probablement qu’il trouverait la réponse exacte au pays de Ntare Rushatsi, le Burundi. Dans un tweet, et comme il se doit, le responsable de la communication à la Présidence de la République annonce un événement qui a eu lieu au Palais. « Ce 6 janvier 2021, une cérémonie d’échange de vœux s’est tenue dans un cadre convivial au Palais Ntare House, entre le Président de la République SE Evariste Ndayishimiye et les représentants de tous les partis politiques agréés au Burundi. » Des photos où nos politiques posaient en essayant de se mettre en exergue ont accompagné le message. Oui, ils étaient allés souhaiter au Chef « Assalamu alaykum », « Que la paix soit sur vous ». En réponse à ce tweet, comme pour le compléter, un politique de la majorité jouera la même carte non sans éloges au Chef : « Ce qui ne se passe nulle part ailleurs qu’au Burundi. Vive Général Neva. I love my President! ». Après les cérémonies, le chef de la communication sortira un communiqué sanctionnant les messages de circonstance. Que du positif.
Politique quand tu nous tiens. Ce tableau « immaculé » des politiques burundais au palais présidentiel a été interprété autrement par ceux qui se nomment vrais « opposants » Certains s’interrogent sur la procédure protocolaire. Selon leur analyse, au nom des autres formations politiques, on s’attendait à ce qu’Agathon Rwasa, venu en deuxième position lors des dernières élections, prenne la parole. Mais c’est Pierre Claver Nahimana, représentant du Frodebu. « Une incohérence peut-être de façade qui cache un message à décoder ! »
Le président de la coalition des forces de l’opposition burundaise pour le rétablissement de l’Accord d’Arusha, “CFOR-Arusha, a décrypté le message du Chef de l’Etat à sa façon. Selon Frédéric Bamvuginyumvira, cet échange de vœux a révélé la compréhension que le Chef de l’Etat a des partis politiques. « Ils ont la mission de conseiller, de rappeler à l’ordre pour ne pas entrer en contradiction avec la ‘’volonté du peuple’’ ». Pour lui, le chef de l’Etat prodigue des conseils aux partis politiques et leur demande en substance de continuer à œuvrer de concert. D’après cet ancien vice-président de la République, cette séance signe la fin de l’opposition et inaugure le système de parti unique. « Plus de Cnl, deuxième force du pays, plus de Frodebu, le parti de Ndadaye, plus de l’Uprona, le parti de Rwagasore. La démocratie est à réinventer pour sauver le Burundi des affres du monopartisme. »
Le dramaturge Pierre-Augustin Beaumarchais estime que le but de la politique est l’intérêt et l’intrigue son moyen : toujours sobre de vérités, ses vastes et riches conceptions sont un prisme qui éblouit. Chacun est libre d’interpréter de sa façon l’initiative du Chef de l’Etat, c’est son droit absolu. A mon humble avis, cet échange de vœux a le mérite de briser la glace de la méfiance observée après les dernières élections par certaines formations, de favoriser la décrispation dans la classe politique burundaise. Que chacun joue son instrument, pourvu qu’il joue la même musique, la démocratie.