Faute d’acquittement des arriérés, l’EALA a voté une motion d’expulsion du Burundi de la Communauté Est-africaine(CAE), a rapporté le journal kenyan, The East African. Fâché, Gitega a dénoncé une information biaisée, tout en reconnaissant sa dette qu’il promet d’apurer sous peu. Pourquoi ces arriérés ? Quelles peuvent être les implications ? Eléments de réponse.
L’histoire des arriérés des cotisations du Burundi dans l’EAC n’est pas nouvelle. Ces dernières années, le pays a accusé des retards pour les cotisations. Déjà pour les années fiscales 2016-2017, 2017-2018, et 2018-2019 aussi. Des millions de dollars d’arriérés… Mais, telle que faite par The East African, l’annonce de ces arriérés pour l’année budgétaire qui vient de s’écouler pointait un risque : la menace d’expulsion pour deux débiteurs, le Burundi et le Soudan du Sud en l’occurrence.
Selon ce media kenyan, lors des échanges dans la semaine du 21 juin, des députés de l’EALA ont été attristés par le retard récurrent de paiement des cotisations annuelles par le Burundi et le Soudan du Sud. Des arriérés qui auraient eu pour conséquence notamment le manque des salaires de ces élus du peuple. De quoi les amener à formuler cette motion d’expulsion de ces membres de la CAE.
L’information a fait un peu froid dans le dos et les réactions ne se sont pas fait attendre. Le secrétariat général de la CAE, sous la responsabilité du Burundais Libérât Mpfumukeko, l’a critiquée, soulignant que la motion proposée recommandait au Conseil ministériel de la communauté d’exhorter le Sommet des chefs d’Etats de mettre en application les articles 132 (en son alinéa 4) et 146 du Traité d’établissement de la CAE.
Le premier dispose : « Les ressources du budget proviennent des contributions annuelles, d’un montant égal, des États membres, de donations régionales et internationales ainsi que d’autres sources qui peuvent être identifiées par le Conseil ». Quant au second, il stipule que « le Sommet peut suspendre un État membre si cet État ne respecte pas les principes fondamentaux et les objectifs du Traité, y compris s’il ne respecte pas ses obligations financières vis-à-vis de la Communauté pendant une période de dix-huit (18) mois ».
Le secrétariat général de la CAE soulignera, à travers cette note, que « dans l’état actuel des choses, tous les Etats membres de la CAE sont en défaut d’obligations, sauf un seul », avant de se demander : « On ne sait donc pas pourquoi le journaliste a retenu deux Etats membres et a annoncé qu’ils seraient expulsés ».
« Le Burundi n’est pas encore à l’étape de la suspension »
Le président de la commission chargée de la communication, du commerce et des investissements de la CAE estime que le Burundi n’est pas encore à l’étape d’être expulsé de cette Communauté. D’après Christophe Nduwayo, il y a une procédure qui doit être suivie. Il évoque notamment l’article 147 du Traité d’établissement de l’EAC : « Le Sommet peut expulser un État membre pour violation grave et persistante des principes et des objectifs du présent traité moyennant notification écrite avec un préavis de 12 mois. »
En outre, il rappelle que l’EALA n’a pas la latitude d’adopter une résolution de suspension d’un membre de la CAE selon l’article 143 de ce Traité: « Tout État membre qui ne respecte pas ses obligations financières et les autres obligations lui incombant en vertu du présent traité est passible d’actions décidées par le Sommet sur recommandation du Conseil ».
Pour M. Nduwayo, il faut que le Burundi s’acquitte de ses contributions afin de s’éviter un risque de suspension. « Il n’y a aucune autre marge de manœuvre ». Selon lui, la dette n’est pas anodine. Il parle de plus de 9 millions USD. Si ces arriérés demeurent impayés, dit-il, il y a beaucoup d’activités de la communauté qui ne sont pas réalisées alors qu’elles étaient prévues. Notamment des projets qui doivent être financés par ces contributions. Mais aussi, la dette peut avoir pour implication le manque de salaire du personnel, l’annulation des rencontres prévues, etc.
Gitega promet le désendettement
Réagissant dans la foulée de l’information, Gitega a parlé d’une « information biaisée », dénonçant des « visées inavouées ». Le ministre chargé des Affaires de la CEA a indiqué que « ce n’est pas la première fois que le Burundi accuse des arriérés au sein de cette communauté » et « n’est pas le seul pays [de la CAE]» à connaître cette situation. « Depuis notre entrée dans l’EAC, nous avons toujours connu des problèmes de retard de paiement. Mais cela n’a pas conduit le Burundi à quitter la communauté », affirme Ezéchiel Nibigira. « Ce retard ne constitue nullement un problème. L’auteur de cette information avait tout simplement des intentions que nous ignorons »
Pour le ministre Nibigira, il n’y a rien de spécial pour cette année. « Nous n’accusons que des arriérés d’une seule année, l’année 2019-2020. C’est la seule année. Et ce retard est vraiment normal ». Il explique que ce retard est dû aux charges du processus électoral, totalement financé par le Burundi. « Tout le monde est au courant, qu’il soit du Burundi ou de la région, sauf celui qui serait de mauvaise foi ». Il estime que le Burundi méritait plutôt d’être félicité, vu qu’il finance totalement son budget depuis 2015. « Nous sommes des vaillants et surtout si nous pouvons considérer les 5 ans que nous venons de franchir. »
Selon ce membre du gouvernement, le Burundi va s’acquitter de sa dette, dans un bref délai. « Car le problème qui avait causé ce retard de paiement des arriérés est terminé ». Ezéchiel Nibigira rassure : « Nous sommes engagés à respecter les engagements, y compris les engagements financiers ».
Le Burundi fait partie de la Communauté de l’Afrique de l’Est depuis 2007. Sa suspension impacterait les avantages dont il bénéficie. Notamment la libre circulation des personnes et des biens et les grands projets régionaux (chemins de fer, routes, etc.)