Le secteur touristique burundais vient de s’enrichir de nouveaux visages : neuf guides touristiques qui promettent de vous faire découvrir coins et recoins du pays… L’aventure mérite d’être lue.
L’épilogue semble triste. Les neuf amis n’avaient jamais cru qu’ils seraient lâchés, Julia Gasquet, leur formatrice, encore moins… Car le projet leur semblait tellement porteur. La genèse est à chercher du côté de l’Association de Prise en Charge des Orphelins du Sida (Apecos) qui, en partenariat avec l’OSI (Orphelin du Sida International) organise une formation destinée « à réduire le chômage des orphelins chefs de ménage ». Nous sommes dans la seconde moitié de 2010. Voilà bientôt les dix têtes qui se mettent à arpenter le Burundi dans un programme de formation de guides touristiques comprenant quatre mois de théorie (dont des connaissances générales en culture et tradition du Burundi, faune et flore, géographie), auxquels il faut ajouter des modules en gestion d’association et des cours en informatique ( traitement de texte, montage vidéo)… « Et surtout beaucoup de terrain », raconte Mlle Gasquet, Française, licenciée en tourisme, directrice du centre d’accueil des jeunes pendant trois ans.
Tous les gros sites touristiques sont parcourus, des chutes de Mwishanga à la Faille des Allemands, en passant par la pierre Livingstone, les musées du pays ou le sud du pays. L’Institut National pour l’Environnement et la Conservation de la Nature, en charge de la gestion, ‘très réactif », suit cela de près. Dans ces trajets de trois jours, les échanges se font en français.
Apprendre le menu
Il s’agit de faire découvrir aux prochains guides le menu à proposer aux touristes, en créant des situations de terrain : chacun des neuf élèves (l’âge varie entre 19 et 30 ans) compte un tronçon qu’il gère. Il y a aussi beaucoup d’ingéniosité chez la formatrice, qui « opère avec un budget de 100 Euros par mois (moyenne de 170.000 Fbu) ». Malgré l’impossibilité d’avoir un accès libre au Musée National (pour cause de non-coopération de la Direction de la Culture), les choses bougent. Le niveau d’expression explose dans le groupe, on y va avec sa petite vidéo sur son travail, et « avant même la fin de la formation, cinq parmi nous avaient déjà été engagés », témoigne Thierry Niyongabo. Tel décroche un stage chez les sœurs de Banga, tel autre dans un tour opérateur, contacts avec des hôtels de Bujumbura qui branchent des touristes…Il y a de l’excitation dans l’air.
Julia Gasquet, fière d’avoir aidé à établir et solidifier les bases, pense à la prochaine étape : renforcer l’initiative en lui cherchant un bureau. Mais aussi un nom : ce sera l’Association des Guides du Cœur d’Afrique. Tiens ! On créera aussi un site internet pour les neuf camarades afin que les touristes éventuels puissent les trouver sans user du bouche à oreille.
Et le servir, tout de même
Puis, à trois semaines de la fin du projet, alors que tout le groupe pense à un bureau, des moyens financiers pour « asseoir » le projet, patatras : le bailleur principal se retire ! Juila Gasquet, qui n’avait même pas pensé à chercher d’autres bailleurs, est obligée de rentrer en France.
Lors de la remise des certificats en guide touristique ce 10 août, après 10 mois de formation, Athanase Rwamo, le représentant légal de l’APECOS, parle, ému, de « cette première promotion qui augure d’une nouvelle ère pour ces enfants, qui, normalement, n’avaient pas d’avenir assuré ». Avant d’ajouter : « Il ne faut pas compter sur le travail des autres car le marché du travail est en train d’être bouclé. »
Et si justement, les bailleurs s’étaient dit que les anciens enfants, devenus débrouillards (on se passe leur numéros de téléphone) avaient appris à pêcher ! Point de poisson donc…