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Détaxation de 13 produits de consommation : « Une mesure symbolique »

05/05/2013 Commentaires fermés sur Détaxation de 13 produits de consommation : « Une mesure symbolique »

Le Chef de l’Etat vient de détaxer 13 produits de consommation importés, pour six mois, et annonce le protectionnisme de nos produits. Des mesures politiques sans effets, analyse Patrice Ndimanya, professeur d’économie rurale à l’Université du Burundi, car nous entrons en période de récolte où les prix doivent baisser.

<doc3972|right>« Les mesures prises par le chef de l’Etat sont des solutions symboliques pour apaiser la tension. Parce qu’elles ne s’attaquent pas à ce qu’on appelle « les fondamentaux » (production et consommation) », remarque Patrice Ndimanya, de l’Université du Burundi. Ce sont les fondamentaux qui déterminent les prix, sinon, les incitations fiscales ne vont pas les stabiliser à long terme, explique-t-il. Par ailleurs, analyse le professeur à base d’un calcul, si on partage les 10 milliards Fbu que l’Etat ne va pas couvrir à cause de cette détaxation, par 8 millions de Burundais, cela signifie que l’Etat a accordé 7 Fbu par jour et par personne pendant six mois.

Les solutions qui ont été proposées par le chef de l’Etat ont été édictées par des mouvements tendus marqués par des revendications des organisations de la société civile. Comme le chef de l’Etat l’a dit lui-même, rappelle ce professeur, il ne faut pas que les gens s’attendent à ce que cette mesure produise des miracles. D’après lui, probablement qu’il y aura une relative accalmie les mois de juin, juillet et août : « C’est la période de récolte du haricot, du riz, etc. » Nous serons à mesure d’évaluer l’impact de cette mesure vers les mois de septembre à décembre, renchérit-il.
Après cette période d’accalmie, il y a risque d’un retour à des flambées des prix, sauf si on observe une amélioration de l’offre au niveau sous-régional, car au niveau du Burundi, il n’y a pas à s’attendre à l’amélioration de l’offre : « Nous avons observé, pour la saison culturale B, un retard des précipitations. Il y aura donc une baisse de la production à l’échelle nationale. »

Des propositions à court et long terme

Pour Pr. Ndimanya, dans un court terme, il y a moyen d’analyser le comportement alimentaire des burundais pour voir s’il n’y a pas des économies à faire : « Probablement que pendant la récolte, on consomme plus de haricot que nécessaire. » Le professeur estime qu’à long terme, il faut un complément de mesures en plus de la suppression des taxes de certains produits alimentaires importés. Nous dépendons plus des pays voisins que le contraire, ajoute-t-il : « Le haricot, la farine de manioc, l’arachide, les huiles sont importés dans la sous-région. »

Mais, le Burundi exporte des produits qui ne rentrent pas dans les besoins quotidiens des ménages : les fruits, les poissons, etc. Il estime qu’il faut une politique fiable avec des incitations coordonnées sur plusieurs plans : « Un programme sur cinq ans, au moins, des indicateurs des résultats prévus d’avance, des moyens quantifiés, des investissements bien ciblés sur lesquels on peut mesurer des avancées, pour voir le changement. »

« Le protectionnisme serait une grave erreur »

Le Pr. Ndimanya estime qu’il faut prendre des décisions relativement réfléchies et murir la faisabilité pour éviter de se lancer dans la logique protectionniste : « Même les pouvoirs les plus absolutistes comme ceux des empereurs romains n’ont jamais réussi, à travers les politiques interventionnistes et protectionnistes, à protéger les cours. » On doit donc éviter de recourir au protectionnisme qui n’aura aucun impact chez nos voisins : « Imaginez si par réciprocité ils bloquent les exportations vers le Burundi alors que nous sommes déficitaires en aliments de base ! »

En outre, le Burundi est dans un ensemble régional : « Vous engager dans un marché commun veut dire que vous acceptez d’épouser une citoyenneté supranationale. Et dans la communauté, vous vous engagez à partager le bonheur et les ennuies. » Le professeur ne comprend donc pas pourquoi la Tanzanie, par exemple, a bloqué l’exportation du riz vers le Burundi depuis avril 2011 : « Dans le cadre des négociations au sein de l’EAC, on devrait plaider pour cette citoyenneté supranationale qui engage tous les Etats à la solidarité en cas d’abondance ou de pénurie. »

Pour le professeur Ndimanya, bloquer l’entrée d’un produit sur le territoire d’un autre favorise la fraude et la corruption : « Nos frontières sont perméables, et il est pratiquement impossible de placer un policier à l’entrée de chaque ménage, surtout que les populations frontalières échangent des biens chaque jour. » Les échanges font partie de leur vie quotidienne, explique le Pr. Ndimanya : « Ils ont vécu le marché commun depuis longtemps, l’EAC n’a fait que consacrer une réalité déjà effective. »
Pr. Patrice Ndimanya conclut en précisant que la cause de la flambée des prix est due à la baisse de la production au niveau sous-régional : « Je ne parle pas de la crise alimentaire chez nous parce que le Burundi n’est pas essentiellement apte à couvrir ses besoins en aliments de base par la production nationale. »

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