Le 6 décembre 2018, le gouvernement du Burundi a décidé de fermer le bureau onusien des droits de l’Homme. Une décision normale, pour les uns. Une sentence pour écarter les témoins gênants, pour les autres.
C’est l’aboutissement d’un bras de fer du gouvernement avec le Haut-commissariat des Droits de l’Homme. Depuis octobre 2016, Bujumbura avait interrompu sa collaboration avec cette agence onusienne. Les rapports produits par le bureau de Bujumbura facilitaient l’examen périodique du Burundi à son siège de Genève. Connaissant combien ces rapports accablent Bujumbura, pas étonnant que l’exécutif lui réserve un pareil sort. Le bureau onusien n’a jamais cessé de dénoncer une situation des Droits de l’Homme très préoccupante voire critique. Un langage inacceptable pour les autorités burundaises.
Pour le gouvernement, le bureau n’avait plus de raison d’être, le pays n’étant plus en guerre. « Faux ! », rétorque Me Lambert Nigarura, du collectif des avocats en exil pour la défense des crimes de Droit international commis au Burundi(Cavib). Cette justification ne tient pas la route. « Ce n’est pas la situation de guerre qui explique l’existence d’un bureau des Nations unies pour les droits de l’Homme. La décision de la faire fermer vise plutôt le verrouillage de l’espace et l’élimination des témoins gênants des violences des droits humains ».
Quant à Hamza Burikukiye porte-parole de la Plateforme intégrale de la société civile (Pisc), il estime qu’il n’y a pas de quoi s’alarmer. « D’autres organes des Nations unies vont prendre la relève pour travailler avec le gouvernement et les autres organes nationaux de promotion des droits de l’Homme». M. Burikukiye soutient que rien n’est perdu car la coordination des Nations unies au Burundi collabore toujours avec le gouvernement. La preuve en est qu’elle a appuyé la récente 70è célébration de la Déclaration universelle des droits de l’Homme à Gatumba.
« Décision légale, mais qui isole davantage le Burundi »
Du reste, il fait savoir que son organisation était un partenaire de cet office onusien. « Nous nous rencontrions dans le réseau des observateurs des droits de l’Homme initié par cet office et le gouvernement via le ministère des Affaires Etrangères ».
Néanmoins, M. Burikukiye fait savoir qu’ils avaient des divergences qu’ils prenaient soin de ne pas mentionner. Outre un appui donné aux organisations de la société civile, ce bureau fermé soutenait les magistrats, la justice, la police et les établissements carcéraux en renforcement de capacité.
Rénovat Tabu, ambassadeur du Burundi à Genève, assure que la fermeture ne signifie pas la fin de la coopération avec le Haut-commissariat des droits de l’Homme. Pour lui, la CNDIH fera le travail. Une tâche qui s’annonce ardue. Avec la rétrogradation au statut B, cette commission a perdu de sa superbe. Pour un observateur avisé, la décision de fermeture est légale. Sauf que pour l’instant, il ne fait qu’isoler le Burundi davantage. Le Cavib, lui, souhaite que l’Onu relance la résolution 2303 prévoyant l’envoie des policiers. Eux pourront faire le monitoring des violations des droits de l’Homme et alerter en cas d’escalade.