Avec le décret présidentiel du 7 septembre créant l’organisme chargé de collecter et de gérer les droits d’auteur au Burundi, le mouvement de fond qui traverse la scène culturelle burundaise prend forme…
C’est la dernière accolade dans les milieux culturels de Bujumbura. « C’est fait », se salue-t-on… Et si vous demandez de quoi il s’agit, comme lors de cette rencontre des acteurs de l’association Tubiyage (théâtre), on vous répond : « Le décret de création de l’Office Burundais des Droits d’Auteur a été signé! » Acclamations sur-le-champ.
Car la bataille a été longue. Léonce Ngabo, chanteur dans les années 1970, avant de se lancer dans le cinéma plus tard, parle d’un « événement historique, autant pour le Burundi que dans la sous-région ». Un combat qui aura pris du temps, parsemé de légendes disparues dans la misère (Canjo Amissi, Nikiza David, …)
En 1992, un coup de pouce est donné au projet de création de l’organisme chargé des droits d’auteur des artistes burundais en mettant en place le Conseil National de la Communication. « Malheureusement, avec 1993, tout est tombé à l’eau et pour des années! », se rappelle M. Ngabo. Pendant longtemps, donc, le projet reste lettre morte. Jusqu’en 2005.
Le regroupement…
Jean Jacques Nyenimigabo, ministre en charge de la Culture, en avait fait l’une de ses priorités quand il a pris les rennes du Ministère de la Jeunesse, des Sports et de la Culture, dès le premier gouvernement Nkurunziza. Désenchantement : pendant quatre ans, rien de concret ne se passe… En apparence, car, pendant que les artistes attendent « de vivre de leur sueur », le monde culturel bujumburois procède peu à peu à une structuration d’activités qui rend plus lisible les secteurs les plus actifs.
L’Amicale des Musiciens, qui a obtenu un bureau au Palais des Arts (près du marché central de Bujumbura) se lance dans un vaste projet de rassemblement des musiciens-chanteurs. Le domaine littéraire voit la création du café-littéraire Samandari, puis d’une mise à jour de l’Association des Écrivains du Burundi (ASEB). Parallèlement, les arts de scène se renforcent avec la naissance de la Troupe Lampyre. Au niveau des arts plastiques, le collectif Maoni s’impose à Bujumbura, avec, ailleurs, des expositions d’artistes comme le sculpteur Lazare (à l’Alliance Franco-burundaise de Gitega). Le cinéma se dote d’un festival (2009), alors que naissent l’Association Burundaise des Créateurs de l’Image et du Son (ABCIS), à laquelle viendra se joindre plus tard le Collectif des Producteurs de l’Audiovisuel et du Cinéma du Burundi- Co.pro.D.A.C (2011). La mode aussi se dote de Miss Burundi…
Comme moyen de pression
Tous ces différents acteurs se retrouvent dans un lobbying auprès du ministre Nyenimigabo, notamment à travers le Forum National des artistes pour le développement – FNAD (2009). Il faudra attendre mai 2011 pour voir les artistes burundais conviés à une rencontre avec Mme Abibatou Sidy, consultante de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle.
Quatre mois, plus tard, les recommandations viennent de prendre leur première forme. Bruno Simbavimbere, à la tête de l’Amicale des musiciens (près de 200 membres), souligne que, au-delà de la célébration de cette « grande étape », « la balle reste dans le camp des artistes : expliquer et sensibiliser sur les relations entre les acteurs dans le domaine culturel et l’OBDA ». Entretemps, «l’office parviendra-t-il à remplir toutes ses missions? », se demande Joseph Butoyi, président de l’ASEB.
Au niveau du ministère de la Culture, la mise en place pratique de l’OBDA n’attend que des moyens. Avec le budget 2012, les choses devraient marcher…
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Quelques missions de l’OBDA :
– Gérer sur le territoire national et à l’étranger, le cas échéant, par voie d’accords de réciprocité, tous les droits relatifs à la représentation, à l’exécution publique, à la radiodiffusion, à la communication publique par fil ou sans fil, à la reproduction graphique ou mécanique, à la traduction, à l’adaptation ou par tout autre mode d’exploitation des œuvres protégées par la loi au titre du droit d’auteur, des droits voisins et du folklore national;
– Agir comme intermédiaire exclusif pour la conclusion des contrats entre les titulaires de droits d’auteur et les utilisateurs de leurs œuvres ;
– Administrer lesdits droits pour le compte d’auteurs étrangers en application d’accords de réciprocité passés avec les mandataires respectifs ;
– Percevoir auprès des utilisateurs des dites œuvres des redevances de droits d’auteur ;
– Répartir ces redevances entre les auteurs ou ayants droit ;
– Donner des informations ou des conseils aux auteurs ou à leurs ayant droit sur toutes questions relatives aux droits d’auteur ;
– Créer et administrer un fonds social et culturel ou tout autre organe similaire de prévoyance, de solidarité et d’entraide en faveur des auteurs ou de leurs héritiers
– Contribuer à la lutte contre la piraterie des œuvres littéraires et artistiques ;}