Le Burundi compte une vingtaine de sites d’eaux thermales. Des lieux qui attirent beaucoup de gens, certains pour des soins ‘’médicaux’’. Dr Pascal Nkurunziza, un hydrogéologue, fait le point.
Qu’entend-on par eaux thermales?
Ce sont des eaux qui naturellement émergent à la surface du globe. Elles sont reliées avec le magma. Il s’agit d’une roche entièrement ou partiellement fondue. Elles sont reliées avec des zones de fracture comme c’est le cas ici dans la zone du rift par exemple. Ici, nous avons le rift albertin qui passe par le Burundi. C’est tout le long de la plaine du Nord au Sud. Vous avez une plaine qui résulte effectivement de ce phénomène de tectonisme cassant.
Qu’est-ce que le tectonisme ?
Ce sont les transformations internes que subit la croûte terrestre par l’adaptation des couches qui la composent. Ces transformations se font très lentement dans le temps. Quand cette tectonique est là, parfois il y a un volcanisme qui peut venir. C’est notamment les volcans du Rwanda, même au Congo, etc.
Existe-t-il des volcans au Burundi ?
Bien sûr, il y avait un volcanisme dans le tertiaire qui est lié à cette structure tectonique de rift. Et de façon globale, on parle de volcanisme du Sud-Kivu. Et les volcans sont des magmas qui ont pu s’extruder à la surface. Mais, il y a des magmas qui ne réussissent pas à ressortir de la croûte, qui restent en profondeur. Dans ce cas, vous avez, par exemple, des eaux de pluie qui peuvent s’infiltrer dans les rochers jusqu’à atteindre le niveau proche du magma.
Qu’est-ce qui se passe dans ce cas ?
Ces eaux sont refoulées à l’extérieur en raison de cette chaleur énorme du magma. Il y a donc une résurgence des eaux dites thermales qui sont en connexion avec ce magma chaud dans la croûte terrestre.
Il y a près de 30 millions d’années s’est produit un phénomène de distanciation entre deux croûtes continentales qui partent pratiquement de Djibouti jusqu’au Sud au niveau du Mozambique. Autrement dit, une cassure a provoqué la séparation de deux blocs continentaux. Alors, le long de ce rift, c’est là que vont s’effectuer ce volcanisme et des eaux thermales. Au Burundi, sur les 26 sources thermales, 10 se trouvent presque alignées le long de ce lift.
Ces eaux auraient des vertus médicinales…
Il y a beaucoup de sources d’eaux thermales en Europe et ailleurs qui sont exploitées pour des fins curatives. Il y a des traitements notamment de rhumatisme pour lesquels on peut effectivement utiliser ces sources. Ces eaux contiennent des éléments minéraux en concentration et même des oligoéléments dont le corps a besoin et qui, par osmose, peuvent pénétrer dans le corps humain. Ainsi, si on a des carences, on peut les avoir à partir de ces eaux thermales.
Les eaux thermales ont-elles les mêmes propriétés ?
Pas du tout. Nous avons des eaux thermales dont les températures ne sont pas égales. C’est pourquoi, nous avons l’ambition de faire des analyses physico-chimiques.
C’est-à-dire ?
Faire des analyses de PH (Potentiel d’hydrogène), de la température, de la conductivité électrique mais aussi on pourra faire des études de tous les cations (ions positifs) et anions (ions négatifs) dans les eaux. A savoir la concentration en fer, en calcium, en sodium, en potassium, en cuivre, des éléments de nickel en toute petite quantité comme des oligoéléments. Au niveau des anions, on pourra aussi analyser quelle est la concentration du carbonate, des phosphates qui pourraient être dedans, etc. Ainsi, on pourra faire leur classification.
Propos recueillis par Rénovat Ndabashinze
Ce qui dans l’oreille du journaliste a été perçu comme « lift » a très probablement été énoncé comme « rift ». Terme anglais qui évoque l’idée de déchirure ou de cassure. La traduction de Google donne crevasse ou fissure. Les géologues parlent de faille – la «grande faille est-africaine».