Mardi 05 novembre 2024

Société

Désormais, plus de mariage entre collègues !

30/06/2020 Commentaires fermés sur Désormais, plus de mariage entre collègues !
Désormais, plus de mariage entre collègues !
La Brarudi vient d’interdire l’embauche d’un membre de la famille immédiate d’un employé.

Certaines entreprises refusent désormais d’employer les conjoints. La mesure récente est celle de la Brarudi. Une décision illégale et violant des droits humains pour certains employés. Une mesure légitime pour un juriste.

« Les employés internes désirant s’unir par une relation maritale devraient s’assurer que dans les deux mois qui suivent leur mariage, l’un des conjoints démissionne. Faute de quoi un des deux verra son contrat résilié. » C’est la mesure récemment prise par la Brarudi dans une note interne qu’elle a publiée il y a quelques jours.

Plusieurs employés de cette entreprise, interrogés, s’insurgent contre cette décision « qui ne figure même pas dans le règlement interne ». Ils parlent d’une violation des droits humains, chacun ayant la liberté de choisir son conjoint. « Si tu as réussi au test d’embauche, qu’est-ce qui t’empêcherait de travailler?», se demande un de ces employés. Il déplore que l’administration n’ait même pas consulté le conseil d’entreprise, servant d’intermédiaire entre l’employeur et les employés, avant de prendre cette décision.

Ces quelques représentants du personnel de la Brarudi estiment qu’il fallait plutôt prendre cette mesure à l’endroit des décideurs et les chargés du recrutement pour éviter toute subjectivité.

Déjà des victimes!

Désormais, ce n’est pas seulement la Brarudi qui applique cette politique. Des anciennes employées d’une société de Télécom affirment avoir été victimes, très récemment, de cette mesure. L’administration n’a jamais sorti une note interdisant ces relations, d’après les employés de cette entreprise.

Pamela (pseudonyme), la vingtaine, est l’une de ces victimes, depuis quelques mois. Elle a rejoint cette société avec un contrat déterminé, alors qu’elle avait un projet de mariage avec son partenaire déjà employé de cette entreprise. Avant le mariage, témoigne Pamela, le couple avait signalé son projet à la direction des ressources humaines. « On nous a dit qu’il n’y a pas de problème vu que nous travaillions dans des services différents».

Trois mois après leur mariage, l’administration informe la jeune épouse que son contrat ne va pas être renouvelé. Un « coup de poignard » dans le dos de cette jeune mariée qui venait de dépenser énormément pour le mariage. « Je ne voyais pas comment la vie allait continuer».

Arlette (pseudonyme), la vingtaine également, est une autre victime de la même société. « La décision était injuste et illégale, il n’y a aucune note qui interdit ces relations. Même pas dans le règlement intérieur. D’autant plus que nous ne travaillions pas dans un même service. » Cette jeune femme affirme qu’elle n’a eu aucune explication.

Cette politique est appliquée aussi dans les banques, d’après des témoignages de ceux qui ont vécu une situation similaire.

Une mesure « légitime »

Cet avocat spécialisé en droit du travail parle d’une mesure légitime.

Me Bienvenue Niyongabo, avocat spécialisé en droit du travail, indique que le code du travail est le texte applicable en général pour les relations entre l’employeur et l’employé. Ce texte de loi donne le pouvoir à l’employeur de mettre en place un règlement d’ordre intérieur. Ce dernier doit édicter des règles qui ne sont pas contraires au code du travail.

Dans le cas d’espèce, explique Me Niyongabo, le code du travail n’est pas précis sur ce cas de mariage entre collègues. « Mais si l’employeur constate que ces liaisons peuvent créer des situations préjudiciables à l’employeur ou à l’entreprise, il peut prendre la mesure conformément au règlement d’ordre intérieur ou à défaut par une note interne».

Pour ce juriste, il est vrai que cela peut s’avérer être une ingérence dans la vie privée d’un employé. « Mais si l’employeur a constaté que la relation peut nuire à l’entreprise, il a le pouvoir de décider ainsi pour éviter des conflits d’intérêts, par exemple».

A titre d’exemple, Me Niyongabo estime qu’il est plus facile pour un couple ou les membres de la famille d’organiser une fraude au sein de l’entreprise. Ou en cas de rapport hiérarchique entre les deux partenaires, quand l’un est amené à évaluer les performances de son conjoint, il est difficile que l’évaluation soit objective. « Alors même si le code du travail est muet sur cette situation, je pense que c’est légitime et légal pour l’employeur de prendre une telle décision, s’il a déjà remarqué que ces liaisons causent préjudice à l’entreprise », soutient cet avocat.

« Eviter les conflits d’intérêts »

La note interne de la Brarudi.

Sur la question de violation des droits humains, ce juriste estime que ce n’est pas le cas. Il est vrai que la Constitution accorde à chaque personne la liberté de choisir son conjoint. « Mais si j’ai bien lu la note, on n’empêche pas les employés de se marier. Ils peuvent choisir en dehors de l’entreprise».

Me Bienvenue Niyongabo, qui exerce souvent au Tribunal du travail, affirme constater parfois des cas de fraude organisés par les membres d’une même famille au sein d’une entreprise. « Même au sein des Nations unies, le fait de ne pas avoir une parenté à l’interne est l’un des critères d’éligibilité. C’est justement pour éviter ces conflits d’intérêts».

Cette note de la Brarudi interdit également l’embauche des membres de la famille immédiate d’un employé : parents, grands-parents, enfants, petits-enfants, frères, sœurs, belle-famille… « Cela peut générer des conflits d’intérêts et encourager le favoritisme, mettant ainsi en danger la bonne marche des services et le moral des employés», peut-on lire dans cette note.

Concernant les employés actuels de la Brarudi, il n’y aura plus de promotion ou mutation vers un service comprenant déjà un membre de la famille.
La note précise que les couples qui existent déjà ne sont pas concernés par la mesure.

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