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Des évasions qui posent problème

05/05/2013 Commentaires fermés sur Des évasions qui posent problème

Des hommes impliqués dans de lourds dossiers souvent liés aux assassinats parviennent à s’évader des prisons. Des hauts cadres du SNR sont pointés du doigt. Iwacu revient sur certains cas.

<doc6657|left>{Innocent Ngendakuriyo, alias Nzarabu : principal accusé de Gatumba}

Le soir du dimanche 18 septembre 2011, des personnes en tenues policières attaquent un bar à Gatumba, près de la frontière congolaise. C’est à une dizaine de kilomètres de la capitale Bujumbura. Le bilan sera de 39 morts, la plupart tuées sur-le-champ. A ce jour, 21 personnes, dont un officier de l’armée, sont arrêtées, accusées d’avoir participé, de près ou de loin, à ce massacre.
Toutefois, le procès de ces personnes poursuivies pour crime contre l’humanité et vol qualifié s’est achevé dans la confusion totale le mercredi 14 décembre 2011. Les avocats ont préféré quitter la salle avant même le réquisitoire du ministère public, estimant que le procès a été bâclé car les hauts cadres de la police et du SNR cités par les accusés dans ce carnage n’ont pas comparu.
Innocent Ngendakuriyo alias Nzarabu, le principal accusé, sera d’abord emprisonné à Bubanza, ensuite à Rumonge. Néanmoins, il s’est évadé en janvier de cette année. Sur une des radios locales, Nzarabu a affirmé que son évasion a été facilitée par des agents du SNR afin de fausser les enquêtes. Sa destination est jusqu’à présent inconnue.

<doc6658|right>{Mukono, le fameux « auteur » du carnage de Gatumba}

Claver Nduwayezu alias Carmel ou Mukono était un ancien combattant dans les rangs du mouvement Palipehutu FNL. En 2008, il intègre l’armée burundaise quand son mouvement signe les accords de cessez-le-feu. Aux élections de 2010, il n’accepte pas la défaite de son parti. Il reprend le chemin de l’exil. Toutefois, il ne fera pas long feu car il est arrêté et emprisonné à la prison centrale de Mpimba. Il est accusé de vol en connivence avec un certain Bitaryumunyu. Il est condamné à 20 ans de prison ferme.

Aidé par le SNR, Mukono s’évade de Mpimba sous condition d’accepter de coopérer dans l’exécution des militants des FNL. Des sources bien informées font savoir qu’il aurait reçu d’importantes sommes d’argent (environ 60 millions de Fbu) de la part du SNR pour livrer Agathon Rwasa. Cependant, d’après nos sources, il ne réussira pas la mission. Ainsi, le SNR s’active à le capturer à son tour. Cette fois-ci, il est déterminé à en découdre avec lui. La machine se met en marche. La police présidentielle approche Nzarabu pour convaincre Mukono de participer dans le cambriolage d’une pharmacie à Gatumba. Le SNR profiterait de ce coup pour l’arrêter.

18 septembre 2011, la situation tourne autrement. Il échappe de justesse au piège, mais plus d’une trentaine de personnes périront dans cette attaque. Néanmoins, le service secret burundais lui attribuera ce carnage. [Il sera à son tour tué par les forces armées congolaises ->http://www.iwacu-burundi.org/spip.php?article2601] alors que lui et d’autres bandits s’apprêtaient à tendre une embuscade à un cortège de commerçants sur la route entre Uvira et Bukavu.

<doc6659|right>{Alain Mugabarabona, le « putschiste »}

31 juillet 2006, à moins d’une année de la prise du pouvoir par le Cndd-Fdd. Alain Mugabarabona, président du parti FNL-Icanzo, est arrêté par le Service National de Renseignement (SNR). Il est accusé d’avoir fomenté un coup d’Etat contre le pouvoir Nkurunziza. Dans ce complot, il dénonce à son tour Domitien Ndayizeye, ancien président de la République et son adjoint Alphonse-Marie Kadege, Déo Niyonzima, président du parti PRP et le colonel Damien Ndarisigaranye. M.Mugabarabona évoque des réunions organisées à son domicile et à plusieurs endroits pour renverser les institutions. Ils seront par la suite arrêtés après avoir opéré des fouilles perquisitions à leurs domiciles.
A la permanence du parti FNL-Icanzo, seuls quelques ordinateurs et autres matériels informatiques seront découverts. Les présumés putschistes seront conduits au bureau du SNR où certains y ont passé plusieurs nuits et subi des tortures, puis transférés à la prison centrale de Mpimba.
L’affaire du pseudo renversement des institutions fait couler beaucoup d’encre et de salive dans les milieux politiques, diplomatiques, religieux, etc.
24 novembre 2006 devant la Cour suprême, chambre judiciaire. Les accusés comparaissent en audience publique pour la première fois. Ils sont tous assistés par leurs avocats sauf Alain Mugabarabona. Le siège confirme leur détention.

Dans sa cellule à Mpimba, le président des FNL-Icanzo accorde une interview à une station de radio locale où il déclare : «Cette histoire de coup d’Etat est un coup monté par la police présidentielle. » Toutes les accusations portées contre les anciens président Domitien Ndayizeye et vice-président Alphonse-Marie Kadege ainsi que les autres, avoue-t-il, ont été extorquées sous la torture et la menace. Face à ces déclarations, le pouvoir de Bujumbura sous la pression de la Communauté internationale procédera à la libération de toutes les personnalités impliquées. A l’exception du « commanditaire » qui croupira à Mpimba pendant plus d’une année.

Début juillet 2008. Alain Mugabarabona reçoit la permission d’une semaine pour se faire soigner. Toutefois, elle sera prolongée car la « maladie » ne fait que se compliquer. Alors qu’il se rend en consultation, son épouse ne le trouvera pas au lieu indiqué. Il passera trois jours sans donner signe de vie.
Des rumeurs de son enlèvement par le pouvoir fusent de partout, d’autant qu’il a des choses à révéler sur le faux putsch. D’autres pensent qu’il se serait évadé. Côté pouvoir, c’est silence radio. Aujourd’hui, des sources dignes de foi indiquent que son évasion aurait été facilitée par le pouvoir en place. Il serait aujourd’hui en Europe.

<img6660|right>{Vital Bangirinama : un colonel en cavale}

Depuis 2008, colonel Vital Bangirinama, commandant de la 4ème région militaire, est en cavale. Accusé de l’assassinat de plus de 20 personnes, il était resté en fonction pendant longtemps, malgré les protestations des associations des Droits de l’Homme. Le 5 juillet 2010, le président Nkurunziza a signé un décret (N° 100/106) portant révocation de certains officiers de la Force de Défense Nationale (FDN). Parmi eux le colonel Vital Bangirinama dont le numéro matricule est SS 0029.
Les premières investigations ont conduit à l’émission d’un mandat d’arrêt à l’encontre du colonel Bangirinama, mais il n’a pas été arrêté.
En décembre 2007, l’auditeur général s’est à nouveau apprêté à arrêter Bangirinama, mais celui-ci a quitté le pays, ayant été apparemment prévenu de son arrestation imminente. C’est ainsi qu’il a quitté le Burundi en janvier 2008, sans être inquiété.

En juillet 2006, des familles des communes Buhinyuza, Muyinga et Giteranyi, ainsi que Busoni dans la province de Kirundo avaient cherché leurs disparus sans succès. Ces personnes avaient été soit arrêtées par des militaires ou des policiers, soit par les services de renseignements à Muyinga. Elles avaient été arrêtées au courant des mois de mai, juin et juillet avec le même chef d’accusation : appartenir au mouvement Palipehutu-FNL.
Août et septembre 2006, des corps décapités et mutilés sont retrouvés flottants dans les eaux de la rivière Ruvubu, surtout dans les localités de Nkoyoyo, Mageni dans la commune de Buhinyuza. Plus d’une vingtaine de corps sont recensés.
Actuellement, Vital Bangirinama serait en Tanzanie.

|D’après les chiffres disponibles à l’Aprodh, 120 détenus se sont évadés de différentes prisons l’année passée et un au cours de ce mois de janvier : 37 à Ngozi,
35 à Mpimba, 24 à Ruyigi, 9 à Rumonge, Gitega 8, Bubanza 3, Muramvya 2, un à Bururi et une femme à Ngozi.|

{Selemani : un rescapé de Muyinga}

D’après nos sources, Selemani était emprisonné à Mukoni lors de l’arrestation de plus de 20 personnes à Muyinga. Considéré comme témoin gênant, cet ancien membre du FNL a été conduit comme les autres à la rivière Ruvubu. Arrivé là, il a réussi à fuir. Les agents du BNUB à l’époque l’ont récupéré jusqu’à Ngozi et l’APRODH l’a amené à son siège à Bujumbura. Selemani a alors accusé ceux qui ont exécuté les gens à Muyinga. Une année après, il a été arrêté en commune urbaine de Bwiza, accusé de viol, et a été emprisonné à Mpimba. Selon nos informations, des hauts cadres du SNR l’ont libéré afin d’accuser Pierre Claver Mbonimpa, président de l’APRODH, d’être le planificateur de l’assassinat de Muyinga.

{Richard Tawimbi : un Congolais rwandophone (Munyamulenge)}

Tawimbi était un combattant et avait été arrêté en décembre 2010 en province Cibitoke (Est du Burundi) pour atteinte à la sûreté extérieure des Etats du Congo et du Rwanda. Selon nos sources, il s’est évadé de la prison de Mpimba, alors que chacun des deux pays le réclamait pour le traduire devant la justice. Il serait déjà arrêté en République Démocratique du Congo. D’aucuns affirment que son évasion a été facilitée par les hauts cadres du SNR.
Iwacu a contacté Télésphore Bigirimana, porte-parole du SNR, pour s’exprimer sur ces cas. En vain.

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