L’émotion et l’empathie était bel et bien au rendez-vous ce mardi 7 février dans les enceintes de l’IFB. A l’affiche « Le bruit des os qui craquent » du Théâtre de Poche. Pour craquer, nous avons craqué…
<doc2939|left>Cela fait plus de dix ans que je fréquente le CCF… pardon l’IFB (j’y arriverai jamais !) et en dix ans je n’ai jamais assisté à un spectacle qui suscite autant d’émotion. La salle n’était qu’écoute, silence, reniflement brusque vite étouffé dans des papiers mouchoirs. Par moments, des rires soudain qui éclatent nerveusement comme si l’on s’empressait de rire de peur d’être obligé de nouveau de fondre en larmes.
Sur scène, deux protagonistes ou plutôt trois. La première, Elikia, congolaise et enfant soldat, à 14 ans, une rebelle à la panoplie complète : kalachnikov en bandoulière, cheveux hirsutes… tout ce qu’il y a de plus rebelle dans notre imaginaire collectif. La seconde, Josefa, rwandaise, 10 ans. Elle vient juste de se faire kidnapper.
La trame de l’histoire : dans un sursaut d’humanité, Elikia, refusant de voir les mêmes sévices qu’elle s’est vu infligés (viols et coups à répétition) revenir à la petite Josefa, décide de s’enfuir avec cette dernière. Commence alors un long périple à travers la forêt où les deux vont tour à tour se confronter, se déchirer pour mieux se retrouver.
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> La pièce était à redécouvrir ce soir, à partir de 19h à l’IFB avant de partir pour Bukavu puis Kisangani (RDC)
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Fait très important, les deux actrices s’expriment chacune dans leurs propres langues, le kinyarwanda et le lingala. Le metteur en scène, Roland Mahauden a beau dire que cela se déroule dans un endroit imaginaire, rarement on a vu imaginaire plus réaliste. La troisième actrice, interprète l’infirmière qui les a recueillies après une cavale de plusieurs jours. Elle est là en tant que témoin, plaidant leur histoire par le biais d’un cahier rédigée par Elikia devant une commission imaginaire. « On aurait dû mal à retranscrire des mots d’enfants sur nos rapports officiels » lui rétorque ces fameux membres de la commission.
Une histoire d’humanité
« Le Bruit des os qui craquent » est tiré du texte de Suzanne Lebeau qui s’est rendu sur place au Congo pour recueillir des témoignages sur les enfants soldats. A la fin de la pièce, un débat a eu lieu entre le public et la troupe. Des nombreuses questions et réponses qui ont fusé, une a retenu l’attention : « Notre désir n’est pas de montrer au public comment penser mais plutôt qu’il faut penser » cite Roland Mahauden. Pari plus que réussi car non seulement on a pensé mais surtout ressenti.