Les magasins des matériaux de construction commencent à subir les conséquences du manque de carburant. Les camions qui les ravitaillent font la queue devant des stations-services. Les commandes ne sont pas honorées fautes de camions pour la livraison. Les hommes d’affaires commencent à ne plus savoir à quel saint se vouer.
Dans le quartier asiatique, les affaires marchent à pas de tortue. Les vendeurs des matériaux de construction importés vivent les moments les plus sombres. Les uns commencent à vendre leurs derniers stocks, les autres n’arrivent plus à livrer les commandes faute de camions pour le transport.
« Ça fait des jours que nos camions attendent du mazout dans les stations-services et nous n’arrivons plus à livrer les matériaux de construction déjà commandés, comme nos grands clients n’arrivent pas à venir récupérer la marchandise, nous non plus nous n’arrivons plus à la leur livrer parce que nous rencontrons les mêmes problèmes, il n’y a pas de camion pour la livraison » témoigne un marchand devant son magasin plein de sacs de ciment.
A côté du magasin de ciment, c’est la même histoire que raconte un autre vendeur de fer à béton : « Le stock s’est vidé et je n’arrive pas à avoir un camion pour le ravitaillement, j’ai passé la commande, mais je ne suis pas capable d’aller récupérer la marchandise, voyez ce qui reste de mon stock », raconte-t-il.
Il dit que si un client se présente, il viderait tout le magasin et il restera avec un magasin vide et sera obligé de fermer : « Ce qui est dans le magasin constitue un seul achat, si cela arrive, je serais obligé de fermer et attendre les camions pour refaire le stock », avoue-t-il.
Les camions attendent du mazout mais en vain
Sur le boulevard Adolphe Nshimirimana à la station-service Libajaj, plusieurs camions stationnent. Ils attendent du mazout qui n’arrivent pas et cela fait plus de 15 jours, raconte un chauffeur de l’un des camions. Ceux qui passent régulièrement sur ce boulevard croient que les camions stationnés devant cette station-service sont en panne, parce que ça fait un bon bout de temps qu’ils les voient.
Pour un chauffeur trouvé à côté de son camion, la perte est énorme, pour lui, pour son patron et pour le pays : « En temps normal, mon patron enregistre un versement de 600 000 BIF par jour et ça fait plus de 15 jours que le camion est stationné ici en attente du mazout. Nous avons des stations qui nous sont réservées, mais elles ne sont pas ravitaillées comme celles qui ravitaillent les bus de transport », témoigne-t-il avec tristesse.
Chef de famille, Patrick ne sait pas comment il va faire vivre sa famille sans travail : « Le patron n’acceptera jamais de me payer parce qu’à la fin du mois, je n’aurais même pas l’audace de lui demander mon salaire parce que sa source de revenu est bloquée ici », raconte-t-il.
A côté du camion de Patrick, un convoyeur d’un autre camion se lamente et avoue que son boss ne lui paie pas la ration journalière : « Le boss m’oblige de reste prêt de son camion pour éviter des vols quelconques, mais refuse de me rationner, si je pars et laisse son camion et qu’un pneu est volé, c’est la prison assurée ».
Certains camions sont gardés en alternance entre chauffeurs et convoyeurs, d’autres sont seulement gardés par les convoyeurs, ajoute le convoyeur trouvé avec Patrick : « Moi par exemple, le chauffeur qui travaille avec moi sur ce camion est rentré, mange et se repose avec sa femme, tandis que moi, je ne l’appellerai que le jour de ravitaillement en carburant », se lamente-t-il.
Avec un air triste et visiblement fatigué, il ajoute que ça fait des jours qu’il dort dans le camion à la merci des moustiques et de la poussière qu’est doté le boulevard Adolphe Nshimirimana : « Je ne me rappelle même pas de comment on mange convenablement », lance-t-il.