Ils étaient nombreux à abandonner le banc de l’école par suite de la pauvreté dans leurs familles et de pas suivre attentivement les leçons mais depuis 2023, le programme Bigebose de Catholic Relief Services (CRS) a initié des cantines scolaires dans les écoles de Ruyigi, qui se sont avérées comme une réponse à la problématique devenue complexe des abandons scolaires.
Dans la province de Ruyigi, l’une des provinces du Burundi où beaucoup de ménages peinent encore à nourrir leurs enfants 3 fois par jour, plusieurs enfants avaient l’habitude de déserter les salles de cours depuis des années.
En conséquence, le taux d’abandons scolaires ne cessait de croître, et des enfants qui devaient être en classe étaient contraints de rester à la maison ou de travailler dans les champs pour soulager la charge financière de leurs parents.
Pour remédier à cette situation, le gouvernement et l’Organisation non gouvernementale Catholic Relief Services ont pris le taureau par les cornes en initiant depuis 2022, le programme Bigebose pour nourrir les enfants de la maternelle jusqu’ en 6è année primaire dans 14 établissements scolaires pris comme pilotes.
Pour cette année 2024, la lutte pour l’éducation améliorée a pris une nouvelle dimension. Cette initiative s’est avérée comme une véritable solution pour endiguer le flux des abandons scolaires. Aujourd’hui, Bigebose couvre 100 établissements de toute la province de Ruyigi, avec plus de 60.000 repas chauds et nutritifs servis chaque jour.
Pour Charles Baseka, directeur de l’Ecofo Nyakirunga, ce programme offre un espoir de stabilité alimentaire aux jeunes élèves et soulage leurs familles. Alors que la province de Ruyigi subit les effets du changement climatique et que les opportunités économiques restent limitées, ces cantines permettrent réellement aux enfants de se concentrer sur leur scolarité et à la Direction provinciale de l’Enseignement de faire face aux répercutions cycliques de la pauvreté sur l’éducation.
« C’était comme un don du ciel quand le Catholic Relief Service nous a inscrits sur la liste des écoles à nourrir pendant la journée. C’était beaucoup pénible de voir que nos enfants abandonnent l’école chaque jour. Les plus jeunes étaient plus vulnérables face à cette situation de sous-alimentation », a-t-il indiqué. Selon lui, l’habitude de s’absenter dans les cours a été vite abandonnée.
Après avoir savourer les bienfaits de ce programme dans les sections maternelle et primaire, cette autorité scolaire plaide ensuite pour sa vulgarisation dans le secondaire.
« Comme parent, les enfants du secondaire non concernés par le programme me font pitié quand je constate que deux enfants frères ne peuvent pas manger tous sur la même table. C’est difficile à supporter comme parent et éducateur », souligne-t-il tout en lançant des éloges à ceux qui ont pensé à cette initiative combien salutaire.
Urgence d’une réponse éducative
Confrontée à des aléas climatiques, la province de Ruyigi se distingue par un taux de pauvreté élevé, avec de nombreux ménages incapables de bien nourrir toute leur fratrie parfois nombreuse.
Dans ce contexte, la nourriture devient une ressource précieuse, et lorsque les familles ne peuvent plus subvenir aux besoins alimentaires de base, l’école devient une option secondaire.
Les enfants en peu âgés sont souvent envoyés dans les champs pour des travaux rémunérés, aidant ainsi à compenser les ressources manquantes.
Selon beaucoup, cette situation pose un double problème : non seulement elle prive les jeunes de l’éducation nécessaire pour espérer un avenir meilleur, mais elle compromet aussi leur santé. La malnutrition affecte particulièrement les enfants, affaiblissant leur capacité de concentration et leurs performances scolaires.
« Nos terres ne sont plus fertiles et les changements climatiques sont venus ajouter le drame. Il est rare de trouver dans une famille un ou deux enfants qui n’ont pas abandonné prématurément l’école pour aller travailler comme travailleur saisonnier en Tanzanie. Des mariages précoces sont aussi observés à cause de l’oisiveté et de la pauvreté des parents », nous a confié Eugenie Nyandwi mère de 4 enfants qui déjeunent à l’Ecofo Nyakirunga.
Pour elle, sans ce programme de CRS, elle n’imagine pas comment elle serait capable de convaincre ses petits de rester à l’école alors qu’elle n’a pas les moyens de les nourrir 2 fois par jour. Et d’ajouter : « Je crois aussi que nous profitons tous en quelque sorte de ce programme quand nous venons cuisiner. Ainsi, le peu de nourriture qui est à la maison sert à préparer le repas du soir sans s’inquiéter de demain !»
D’après cette mère de famille, les cantines scolaires, en fournissant un repas quotidien, apportent une solution immédiate et permettent de réduire la malnutrition dont souffrent beaucoup d’enfants. Face à ces défis, les cantines scolaires constituent un moyen essentiel pour remédier à l’abandon scolaire et offrir un minimum de sécurité alimentaire aux élèves de Ruyigi.
Ces cantines, mises en place par Catholic Relief Services en partenariat avec les organisations locales Bigebose et Caritas Ruyigi-Soprad, offrent des repas gratuits nutritifs aux élèves chaque jour, permettant ainsi de pallier les carences alimentaires et de maintenir les enfants à l’école.
Le programme a un impact immédiat : les élèves reçoivent un repas nutritif par jour, composé de légumes vertes,de pâte de maïs et de riz fortifiée, et haricots ; ce qui soulage les parents et assure aux enfants un environnement scolaire plus propice à l’apprentissage.
Les cantines scolaires ont également pour effet de renforcer la motivation des élèves et de stabiliser les effectifs scolaires comme en témoignent les enfants qui affirment s’atteler régulièrement dorénavant aux études. En ayant un repas quotidien, les élèves se concentrent davantage sur leurs études et ont une meilleure chance de réussir leur parcours scolaire.
« Les absences ou les retards sont rares. Tu ne peux pas te permettre de rater le repas gratuit sous quel motif », a souligné Raïssa Nemayimana 14ans. D’après cette fillette de la 4e primaire, il était fréquent que chacun trouve un motif pour s’absenter quand le soir on n’avait pas trouvé de quoi mettre sous la dent. Par pudeur, les enfants avaient l’habitude d’inventer plutôt des maladies ou autre chose pour justifier leur absence en classe.
Une appropriation communautaire pour la pérennisation du programme Bigebose
Bien que l’initiative des cantines scolaires semble prometteuse d’espoir, elle reste vulnérable aux défis actuels de la province de Ruyigi, notamment ceux liés au changement climatique.
Les périodes de sécheresse plus fréquentes et intenses, les inondations, et les baisses de récoltes mettent en péril l’approvisionnement en nourriture, essentiel pour le bon fonctionnement de ces cantines. Une éventualité que ne conteste pas les autorités administratives et scolaires.
D’après elles, pour que le programme de cantines scolaires puisse être maintenu à long terme, il est essentiel de trouver des solutions durables pour sécuriser les approvisionnements locaux et améliorer la résilience de l’agriculture et garantir des financements réguliers.
« Quoique satisfaits de ce programme des cantines scolaires, nous sommes conscients qu’il ne pourra pas être éternel. C’est pourquoi, nous appelons la communauté à une implication effective et nous l’interpelons à déployer tout leur dynamisme à renforcer l’apport communautaire pour l’autonomisation et la durabilité », a soulevé Diane Mvuyekure ; directrice adjointe du programme Bigebose au sein de CRS.
Elle propose de cultiver elles -même des légumes et aux parents de s’adapter aux pratiques agricoles qui ont un intérêt pour s’adapter au changement climatique (par exemple la mise en place de couverts végétaux qui renforcent la fertilité des sols, la diversification des variétés cultivées pour une espèce très cultivée sur la ferme, etc).
Cette directrice adjointe préconise aussi aux parents des activités génératrices de revenus. En soutenant le développement des sources alternatives de revenus, en particulier celles qui n’impliquent pas seulement l’agriculture comme les SILC, les ménages ont accès à des revenus tout au long de l’année, Ainsi, les ménages pourront compléter l’apport nutritionnel des enfants une fois à la maison.
Même son de cloche chez le directeur provincial de l’enseignement à Ruyigi. Selon lui, diversifier les opportunités économiques dans la région est essentiel pour réduire la dépendance à cette aide alimentaire et offrir aux familles d’autres moyens de subsistance.
En créant des emplois ou en soutenant des activités génératrices de revenus, il serait possible de diminuer la pression financière sur les familles et de leur permettre de se concentrer sur l’éducation de leurs enfants.
Enfin, sensibiliser la communauté à l’importance de l’éducation et aux bénéfices à long terme de la scolarisation des enfants pourrait également encourager les familles à prioriser l’école, même en période de crise économique. Comme il le fait savoir, les cantines scolaires représentent bien plus qu’un simple repas offert : elles incarnent l’espoir d’un avenir où les enfants peuvent s’éduquer, se nourrir correctement et échapper au cycle de la pauvreté.
Cependant, pour garantir que cet espoir devienne réalité, il est impératif de relever les défis imposés par les conditions climatiques et les limites économiques.
« Si les efforts de soutien se poursuivent et que des solutions de développement durable sont mises en place, les cantines scolaires pourraient non seulement transformer la vie des enfants de Ruyigi mais aussi offrir à la province une chance de résilience et de progrès socio-économique », a reconnu Onésphore Sabiyumva.
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