Mardi 05 novembre 2024

Politique

Des administrateurs communaux sur la sellette

14/01/2014 2

Depuis un certain temps, certains administrateurs communaux sont limogés, d’autres risquent de l’être à tout moment. C’est le cas de l’administratrice de la commune Muyinga dont la destitution serait imminente et de Thierry Ndabonekewe, qui était à la tête de la commune urbaine de Kinama depuis 2010.

Vincent Bakire-Nzoyisaba, vice-président du Conseil Communal de Muyinga ©Iwacu
Vincent Bakire-Nzoyisaba, vice-président du Conseil Communal de Muyinga ©Iwacu

Entre le conseil communal de Muyinga et l’administratrice, le courant ne passe plus. Un climat de méfiance s’est installé. Evelyne Izobiriza, administratrice communale est accusée de s’ingérer dans la gestion du marché de Muyinga et d’incompétence.
Pour se défendre, elle reproche à certains membres du conseil communal de dresser la population contre elle et d’une gestion frauduleuse dudit marché. Des réunions visant à soulever la population contre elle et par conséquent sa destitution ont déjà eu lieu.
Elle cite ici par exemple celle tenue ce samedi 4 janvier, à Murama dans laquelle participaient 50 chefs collinaires du parti Cndd-Fdd ainsi que d’autres 50 représentants du même parti au niveau communal.

Mme Izobiriza était absente parce que, selon elle, elle n’a pas été associée dans sa préparation. Et selon le reportage de la radio publique africaine (Rpa) de ce dimanche 5 janvier, alors que cette réunion se tenait à Murama, simultanément, d’autres membres du parti Cndd-Fdd faisaient une « cross-manifestation » au chef lieu de la province. Le reporter évoque un effectif de 200 participants.
Ce qui est rejeté par Vincent Bakire-Nzoyisaba, vice-président du conseil communal de Muyinga qui évoque un effectif d’une cinquantaine de jeunes ramassés de toutes parts. Il accuse cet administratif d’incompétence dans la gestion communale.

Des accusations mutuelles

Et à cette dernière de contre-attaquer : « Certains membres du conseil communal possède des stands dans le marché de Muyinga mais il y a une année, ils n’ont jamais payé aucun sou à la commune. La privatisation ne se fait pas dans la transparence».
« Faux » ! rétorque le vice-président du conseil communal. D’après lui, si ces cas de non paiement existent, ils sont individuels. Et de déclarer : « Avoir un stand au marché de Muyinga est un droit de tout citoyen. Il suffit de remplir les normes ». Ainsi, M. Bakire-Nzoyisaba précise que la privatisation ne concerne que les actionnaires. Les normes sont mises en place par eux. Pas question des marchés publics parce que c’est une association. Et la commune, martèle-t-il, participe comme tous les autres actionnaires. Et de conclure que les questions communales sont directement adressées au conseil communal.

L’article 33 de la loi communale stipule que le mandat de l’administrateur communal prend fin à l’échéance du terme ou par décès. Il peut également y être mis fin dans les cas ci-après : par démission volontaire ; par survenance d’une cause d’inéligibilité ou d’incompatibilité ; suite à une condamnation à une peine de servitude pénale égale ou supérieure à deux mois fermes ou à six mois avec sursis, sauf pour les infractions non intentionnelles ou les délits d’opinion par déchéance prononcée par le Conseil communal, à son initiative ou à celle de l’autorité de tutelle, notamment lorsque l’administrateur communal est convaincu de corruption, d’incompétence, d’abus de pouvoirs, de violations graves des droits de l’Homme ou de détournement de fonds et de biens communaux.

Interrogé sur le sort réservé à cet administratif, le vice-président du conseil communal de Muyinga indique qu’il revient au conseil communal de statuer sur le cas. Il ajoute que tous les membres dudit conseil (onze membres du Cndd-Fdd, un uproniste et un membre du parti Fnl) sont unanimes sur certaines fautes que cet administratif est en train de commettre. Il mentionne que deux autres du parti Fnl n’ont jamais participé dans ce conseil.

Thierry Ndabonekewe, l’administrateur communal limogé par décision du maire de la ville de Bujumbura ©Iwacu
Thierry Ndabonekewe, l’administrateur communal limogé par décision du maire de la ville de Bujumbura ©Iwacu

Un limogeage aux relents politiques

Pour ce qui est du cas de Thierry Ndabonekewe, il a été suspendu de ses fonctions d’administrateur communal de la commune urbaine de Kinama samedi, 4 janvier 2014 sur décision du maire de la ville de Bujumbura.
Il est accusé de n’avoir organisé aucune réunion avec ses administrés depuis qu’il occupe ce poste en 2010, d’avoir reporté sans raison la célébration de plusieurs mariages, le 7 décembre 2013, de falsification des documents fonciers, de destruction méchante des maisons de ses administrés (cas d’un certain Samuel de Carama) et de corruption.

Un des membres du conseil communal, qui a gardé l’anonymat, juge cette décision de purement politique. Et pour cause, le conseil communal ne s’est jamais réuni contrairement à ce qui a été dit par certains médias, affirme-t-il.

Normalement, explique ce membre du conseil communal, en cas de flagrance à l’encontre de l’administrateur communal, le président du conseil communal et son bureau (le vice-président et le secrétaire) convoquent une réunion et analysent le comportement de l’administrateur communal : « Des invitations de la tenue d’une réunion du conseil sont envoyées avant 7 jours en cas d’une session ordinaire et avant 5 jours pour une session extraordinaire. »

Dans ce cas, poursuit notre source, le secrétaire du conseil communal qui est l’administrateur communal prépare les invitations et les donne au président du conseil car les points à l’ordre du jour sont discutés entre les deux personnalités. En cas des points concernant l’administrateur communal, les membres du conseil lui posent des questions. Puis vient le temps de délibération où il est prié de quitter l’endroit où se tient la réunion : « Si le conseil constate qu’il y a flagrance, l’administrateur communal est destitué et on dresse un procès verbal. » Lequel procès verbal sera envoyé au maire de la ville, qui à son tour l’envoie au ministre de l’intérieur. Le maire réagit à la décision du conseil communal.

« Ils avaient déjà un procès verbal (PV) avec 12 signatures »

En cas d’autres fautes ou manquements, le conseil peut exiger le limogeage de l’administrateur communal lorsqu’il constate une répétition de fautes. Le conseil dresse un procès verbal de délibération pour démontrer qu’il y a répétition pour que le maire réagisse et suspende l’administrateur communal.

Or s’étonne notre source, certains membres du conseil communal sont venus au bureau de la commune le 29 décembre, jour de ladite réunion avec un procès verbal déjà dressé : « Ils avaient déjà un procès verbal (PV) avec 12 signatures. »
Et pourtant, indique la même source, l’administrateur communal de Kinama devait être informé de la tenue de la réunion en tant que secrétaire du conseil communal : « Ils disent que la réunion s’est tenue dimanche, le 29 décembre 2013. Le maire de la ville était-il informé de la réunion ? Avait-il eu une invitation écrite pour autoriser la tenue de la réunion ? »

Bureau communal de Kinama ©Iwacu
Bureau communal de Kinama ©Iwacu

La remise et reprise entre Thierry Ndabonekewe et Zacharie Niragira, l’actuel administrateur communal ad intérim, a eu lieu samedi 4 janvier 2014. Toute fois, les partisans de l’administrateur voient dans cette nomination une preuve qu’il y a des non-dits dans ce limogeage.

D’après eux, Zacharie était employé à la mairie et il a été nommé par coup de baguette magique comme secrétaire communal par le maire de la ville, vendredi 28 décembre 2013. Ce qui lui offrait la possibilité d’assurer l’intérim au poste d’administrateur communal. Pour eux, il ne fait aucun doute qu’il s’agissait de couper l’herbe sous les pieds de Thierry Ndabonekewe car le délai d’une semaine pour trouver une personnalité pouvant assurer l’intérim risquait de prendre fin et ainsi faire échouer leur plan.

Les vrais raisons du limogeage

D’autres sources de Kinama indiquent que la vraie raison du limogeage de Thierry Ndabonekewe, est la mésentente entre lui et Gilbert Baranyizigiye, président du conseil communal. D’après ces sources, les deux hommes ne s’entendaient plus pour deux raisons.
La première remonte à l’élection du forum des femmes qui s’est déroulée en 2012. A l’époque, Gilbert Baranyizigiye aurait souhaité que son épouse figure sur la liste de la commune urbaine de Kinama. Il aurait même demandé explicitement Thierry Ndabonekewe d’inscrire le nom de sa femme. Celui-ci a refusé arguant que l’affaire le dépassait et que la question était traitée au niveau du ministère de la Solidarité.

L’article 34 de la même loi indique qu’en cas de vacance du poste d’Administrateur communal pour l’une des causes énumérées à l’article précédent, le Conseil communal procède à l’élection, dans les trente jours qui suivent, d’un nouveau candidat qu’il soumet à la nomination du président de la République, après vérification des équilibres par le Sénat. Il achève le mandat de son prédécesseur. Dans l’intervalle qui précède les élections, l’intérim est assuré par le conseiller technique chargé des questions administratives et sociales visé à l’article 54 de la présente loi.

La seconde pomme de discorde est liée à une tentative d’installer une savonnerie appartenant à un dignitaire du parti au pouvoir au quartier Carama. Selon ces sources, les habitants dudit quartier ont écrit au ministère de l’environnement et à la mairie pour s’opposer à cette installation, jugeant leur quartier résidentiel et non industriel. Thierry Ndabonekewe s’est rendu dans ce quartier avec des policiers, qui à leur tour, ont emprisonné les travailleurs de ce dignitaire. Gilbert Baranyizigiye se serait alors empressé au niveau du parti Cndd-Fdd pour accuser Thierry Ndabonekewe de trahir les siens.

Gilbert Baranyizigiye rejette en bloc ces accusations qu’il juge de farfelues et maintient que la réunion a eu bel et bien en date du 29 décembre 2013. Selon lui, c’est le conseil communal qui a demandé la tenue de cette réunion et il ne pouvait pas demander à l’administrateur communal de l’organiser sachant qu’il allait être destitué.

Quant aux accusations portées contre lui, le président du conseil communal de Kinama estime que si des preuves existent, il faut que ses détracteurs les présentent devant le conseil : « Thierry Ndabonekewe reste toujours membre du conseil communal. S’il a quelque chose à dénoncer qu’il vienne le faire au conseil. »

Iwacu a contacté Saïdi Juma, le maire de la ville de Bujumbura, sans succès. Evariste Sabiyumva, secrétaire permanent au ministère de l’Intérieur nous a signifié que la mairie n’a pas encore transmis la décision audit ministère : « Je ne peux pas m’exprimer sur un dossier dont je n’ai pas encore reçu officiellement toutes les données. »

Forum des lecteurs d'Iwacu

2 réactions
  1. Burihabwa

    Ababipfa ni ababisangiye! Mwibaza ko aba DD bose bararyohewe n’imburakimazi ziriko zironona igihugu? Ubu ho barafise n’ivyo bapfa. None ejo muri 2015 bakubiswe incuro n’IKIBIRI bazonyikira he ko amabi bakora azobakurikirana? Rindira gato sha DD. Hahaaaaaaaaa!

  2. moi

    Ce Gilbert Baranyizigiye,c’est le même Gilbert que le DG de la poste? Merci de me répondre.

A nos chers lecteurs

Nous sommes heureux que vous soyez si nombreux à nous suivre sur le web. Nous avons fait le choix de mettre en accès gratuit une grande partie de nos contenus, mais une information rigoureuse, vérifiée et de qualité n'est pas gratuite. Nous avons besoin de votre soutien pour continuer à vous proposer un journalisme ouvert, pluraliste et indépendant.

Chaque contribution, grande ou petite, permet de nous assurer notre avenir à long terme.

Soutenez Iwacu à partir de seulement 1 euro ou 1 dollar, cela ne prend qu'une minute. Vous pouvez aussi devenir membre du Club des amis d'Iwacu, ce qui vous ouvre un accès illimité à toutes nos archives ainsi qu'à notre magazine dès sa parution au Burundi.

Editorial de la semaine

Enrôlement des électeurs. Entre fatalisme et pessimisme

Alea jacta, les dés sont jetés. La période d’enrôlement qui avait officiellement commencé le 22 octobre a pris fin ce 31 octobre. Se faire enrôler est un devoir hautement civique et citoyen en vue de reconduire ou renouveler la classe (…)

Online Users

Total 3 793 users online