En décembre dernier, une députée a revendiqué, lors d’une séance de questions au ministre de l’Énergie, une station-service réservée uniquement aux élus, se plaignant d’être méprisée lorsqu’elle devait faire la queue. Ces propos ont profondément choqué l’opinion publique et ont essuyé une pluie de critiques.
Contre toute attente, Iwacu apprend par le biais de certains députés qu’une station-service existe effectivement dans les enceintes de l’Assemblée nationale. Non sans humour, ils demandent aux journalistes de poser la question aux organes habilités sur le moment où ils seront servis, puisque le carburant y est déjà. « Plus de deux mois se sont écoulés sans communication sur la suite de ce carburant », déplorent-ils.
Certaines stations-service ne servent que sur présentation de bons de commande. Ces bons sont réservés à des banques, des maisons d’assurance, des hôpitaux, des dignitaires, et de grands opérateurs économiques. Bref, il s’agit de stations-service pour une certaine catégorie, une élite. Elles sont connues sous le sobriquet de stations-service VIP (Very Important Persons).
Je ne prône pas l’apologie d’une société égalitaire, ce serait utopique ; certains avantages liés au statut peuvent être légitimes. Ce qui provoque un tollé, c’est l’inégalité et le manque d’équité dans la distribution et l’approvisionnement de ce produit rare au Burundi. Depuis plusieurs mois, une sévère pénurie de carburant affecte durement la vie quotidienne de la population et frappe de plein fouet l’économie de ce pays. Il y a quelques jours, les habitants de Bujumbura n’avaient plus d’autre choix que d’aller s’approvisionner en République Démocratique du Congo. Mais à quel coût ? Un bidon d’essence de 20 litres se vendait en moyenne à 250 mille francs bu alors que ceux qui s’approvisionnent au Burundi l’achetaient à 80 mille francs bu. Donc, ceux qui n’avaient pas de bons de commande payaient plus de trois fois plus. Mais ils le faisaient tout de même.
Ce deux poids deux mesures, cet approvisionnement « à deux vitesses », commence à susciter tacitement une indignation et une désapprobation, que ce soit individuellement ou collectivement. « Au niveau de l’approvisionnement en carburant, on dirait qu’un mur se dresse entre les élites et la population. On peut même parler d’une fracture sociale déguisée. Qu’ils pensent à nous aussi, le bas peuple. »
Marc Bloch et Ernest Renan, en leur temps, avaient dénoncé la myopie et l’égoïsme des élites. Dans son livre « L’oligarchie ça suffit, vive la démocratie« , Hervé Kempf révèle que dans tous les pays qui se disent démocratiques, la démocratie est attaquée par une caste : « La domination d’une petite classe de puissants qui discutent entre pairs et imposent ensuite leurs décisions à l’ensemble des citoyens. »
Je dis ça je, dis rien…
Si les députés ont leur propre station-service, comment vont-ils la souffrance qu’endurent les citoyens qui les ont élus? Demain, ce sera l’eau et l’électricité pour les députés. Oh, mon pays!
Dieu du Burundi (L’Eden) aime les pauvres et donne aux riches!
Merci infiniment d’avoir énoncé ces inégalités aberrantes à haute voix! Peut être que vous avez risque la colère de ces privilégiés puissants.
Juste une république bananière