Lors d’une conférence de presse tenue mercredi 16 juin, Jimmy Hatungimana, le maire de la ville de Bujumbura a ordonné la destruction des maisons construites de façon anarchique endéans 7 jours. Le désespoir est grand chez les personnes concernées.
Lundi 28 juin. Il est 10 heures à Mutakura quartier du nord de la capitale économique Bujumbura. Les propriétaires des maisons, boutiques, églises, restaurants et autres bâtiments construits de manière anarchique procèdent de leur propre gré à leur démolition. Une course contre la montre au délai donné par la municipalité de Bujumbura ordonnant la destruction de toutes les maisons construites illégalement dans un délai de 7 jours par leurs propriétaires. Ces derniers déplorent des pertes économiques importantes liées à cette mesure.
H.K., un habitant du quartier de Mutakura de la commune Ntahangwa en mairie de Bujumbura, semble désespéré. Propriétaire de cinq kiosques démolis qui étaient sous location, il s’inquiète pour l’avenir de sa famille :«Nous gagnons la vie grâce aux loyers tirés de ces boutiques détruites. Ils étaient le seul gagne-pain de la famille.
Chaque kiosque était loué à 100 mille BIF. A la fin du mois, je gagnais au total 500 mille BIF. Une partie de ce revenu était alloué au financement quotidien de ma famille et une autre au remboursement du crédit bancaire contracté lors de la construction de ces kiosques.»
Ce sexagénaire explique qu’il avait construit ses kiosques grâce au crédit de 15 millions de BIF contracté dans une banque commerciale. Et il se demande comment il va rembourser cette dette vu que la seule source de revenus pour la famille est tarie. « Pour le moment, je crains que la banque saisisse ma maison que j’avais donnée comme garantie».
Les commerçants sont aussi dans la détresse
Seleman Ndikumana de la douzième avenue au quartier Kinyankonge ne décolère pas : « J’assiste avec impuissance à la destruction de ma maison. «C’est difficile de démolir ma propre maison. Mais comme c’est un ordre des autorités municipales, je dois m’exécuter.» D’après lui, sa maison est pourtant construite dans les normes exigées par l’urbanisme.
Pierre Gahungu, un commerçant croisé à la quatrième avenue du quartier de Cibitoke, indique que le propriétaire de la boutique dans laquelle il exerçait lui a ordonné de déménager. Il veut se conformer à la décision du maire de la ville exigeant la destruction de toutes les maisons construites illégalement. « Il m’a donné seulement deux jours pour quitter sa boutique et ce délai expire aujourd’hui ». Pour le moment, il ne voit pas là où il peut exposer ses marchandises.
De surcroît, le propriétaire de la boutique dans laquelle il travaillait a refusé de lui remettre son avance de 300 mille BIF. Et de se justifier : «C’est un cas de force majeure. La démolition a été ordonnée par la mairie. Cette somme pourrait m’aider à trouver une autre boutique à louer. »
Le prix du loyer en hausse
Ce boutiquier souligne, par ailleurs, qu’il est difficile de trouver des boutiques à louer. Les loyers ont augmenté exponentiellement ces derniers jours. Dans certains quartiers, ils ont été doublés ou même triplés. Un kiosque qui était loué à 100 mille BIF est aujourd’hui à 200 mille BIF.
Certains commerçants rencontrés au quartier de Mirango 2 de la zone Kamenge (nord de la capitale économique) indiquent qu’ils se retrouvent dans la rue. D’autres ont vendu leurs marchandises à vil prix aux commerçants qui exercent leurs activités dans des maisons qui remplissent les normes exigées par l’administration de la mairie de Bujumbura. Ceux qui n’ont pas trouvé des preneurs ont dû demander à leurs voisins de leur venir en aide en conservant les marchandises qui étaient encore dans le stock. Ils craignent que certaines marchandises atteignent leur date de péremption. Ils sont inquiets des mauvaises conditions de stockage, suite à l’exiguïté de l’espace emprunté. Ils craignent aussi le vol de leurs articles.
Des commerçants ont regagné leurs collines natales
Les commerçants déplorent le mauvais comportement des propriétaires des maisons servant de boutique et kiosque qui ont revu à la hausse le loyer depuis la mise en application de cette mesure. Un d’eux s’exprime : « Mon bailleur a doublé le loyer que je payais mensuellement avec l’annonce de la décision. Pourtant le kiosque que je loue n’a subi aucune amélioration. Les pouvoirs publics devraient inviter les citoyens à ne pas tirer profit du malheur des autres.» Un autre commerçant précise qu’il est incapable de payer le loyer de la boutique car il est très cher .Il souligne que ses amis découragés ont regagné leurs collines natales pour faire d’autres projets. «Vivre en mairie de Bujumbura, sans travail, sans revenus, est impossible ». Les propriétaires sont aussi sous le choc. Ils sont dans l’impossibilité de rembourser les avances perçues.
H .K., un habitant du quartier de Cibitoke en zone Cibitoke commune Ntahangwa, était propriétaire d’une maison démolie. Cette maison était mise en location et à la fin de chaque mois, il encaissait une somme de plus de 250 mille BIF. Il fait savoir qu’il ne voit pas comment continuer à vivre et à nourrir une famille de huit enfants et payer les frais de scolarité de ceux qui sont encore sur le banc de l’école.
Il précise que cette maison démolie était sa seule source de revenus. Il dit avoir des documents reconnus par la mairie qui attestent que sa maison n’a pas dépassé la borne. Il précise que la mairie avait mesuré la superficie de sa parcelle de 400m². L’année passée, il affirme avoir payé un impôt foncier de 163000 BIF. D’après lui, il était dans la légalité. Il dénonce le comportement d’Imbonerakure qui ont détruit des tôles alors qu’elles devraient servir à couvrir d’autres maisons.
B .K., un commerçant de la zone Kamenge, avant la démolition, louait une boutique à la première avenue. Le prix du loyer était de 80 000 mille BIF par mois. Le chiffre d’affaires journalier était estimé à 180.000 BIF. Il indique que chaque année il devait payer une taxe municipale. Il ne comprend donc pas la raison de cette démolition.
Rappelons que d’après le maire de la ville de Bujumbura, les constructions doivent respecter les normes urbanistiques.