Les massacres interethniques consécutifs à l’assassinat du premier président hutu démocratiquement élu, le 21 octobre 1993, ont déferlé sur la commune de Mpinga-Kayove à Rutana au sud-est du Burundi. Même si aujourd’hui, le calme règne avec des jeunes confiants en l’avenir, cette commune a touché le fond.
Les jeunes rencontrés dans cette commune le témoignent. Avec la crise de 1993, Mpinga-Kayove s’est retrouvée balkanisée, avec des collines ethniquement rangées, étiquetées.
Et au sein de la population, des plaies mal pansées, des ressentiments, des souvenirs amers, de rancœur refoulée, …et ces messages officiels qu’il faut oublier ce passé douloureux.
Avant les opérations de rapatriement des réfugiés burundais hébergés dans des pays voisins comme la Tanzanie, certains jeunes et leurs parents ont connu l’exil. Ils ont dû fuir le pays suite à cette crise.
Les jeunes rencontrés aujourd’hui dans cette commune de Mpinga-Kayove se souviennent des tensions entre différentes communautés, des récits des massacres, de chasse à l’homme, de climat délétère, d’une sorte d’apartheid.
Depuis que j’ai eu l’âge de raison, relate Diomède Wasaba, habitant de la zone Mugondo à majorité hutu, les gens de la zone Mugondo ne pouvaient pas se rendre à Mpinga. « On se méfiait de cette zone à majorité tutsi. Dans notre zone, nous n’étions que des Hutu. Il y avait méfiance parce que nos parents et nos aînés nous disaient qu’en 1972, les Tutsi avaient décimé des Hutu. En 1993, on était des petits mais on entendait les gens d’ici dire qu’ils vont faire la chasse aux Tutsi à Mpinga ».
Une balkanisation qui ne dit pas son nom
Nous les jeunes, raconte-t-il, nous sommes devenus victimes de cette situation et il y avait méfiance entre nous. « Quand on allait à Mpinga pour nous préparer à la communion solennelle, même les enseignants ne nous facilitaient pas la tâche, ils s’arrangeaient pour que nous occupions les dernières places sur les rangées, ils ne nous mettaient jamais devant les jeunes gens de la zone Mpinga ».
Même pour les habitants des collines à majorité tutsi comme Mpinga, il fut un temps où se rendre à Mugondo était risqué, impensable car, c’était synonyme d’un aller sans retour.
La suspicion et la méfiance consécutives à ce climat de tension transmise aux jeunes générations se sont transposées partout. Les massacres interethniques ont eu des conséquences néfastes, laissé des blessures, des cicatrices.
Quand la crise de 1993 a éclaté Sildonie Nibizi, jeune mariée, habitant de la zone Mpinga à majorité tutsi, n’avait qu’une une année. Elle a perdu son père et le feu mis à la maison de sa famille ne l’a pas épargnée : le nourrisson a eu une brûlure au niveau du pied, Sildonie a été sauvée par sa mère et quelques rescapés de sa colline.
Elle témoigne : « Quand la guerre a éclaté et les Hutus et les Tutsis se sont entretués, vous voyez bien que je porte une cicatrice. Et les gens ont fui le pays, puis ils ont regagné leur mère patrie ».
Elle poursuit son récit : « Les Hutu se sont mis d’un côté et les Tutsi ont fait pareil. Même à l’école, on n’échangeait pas avec eux, on nous disait que ce sont des adversaires, on se chuchotait d’ailleurs que ce sont nos ennemis ».
Mais grâce à un engagement partagé pour le vouloir-vivre ensemble, plusieurs jeunes venus de différentes communautés ethniques ont bénéficié de formations sur les valeurs d’Ubuntu, la cohésion sociale, la cohabitation pacifique, la réconciliation, ce qui a créé des rapprochements et permis à ces derniers de tisser des liens.
Quand la jeunesse brise les chaînes du passé
Selon Siméon Sinzobatohana, habitant de la zone Mugondo, les enseignements reçus ont eu un impact positif surtout chez les jeunes. « Bon nombre d’entre eux étaient portés au mal, à la violence. Mais après différentes formations et avoir compris comment se prendre en charge, initier et gérer un petit projet générateur de revenu, tout le monde a réalisé que nos actes étaient insensés ».
Suite à la formation sur les valeurs d’Ubuntu, témoigne-t-il, les jeunes se sont attelés aux projets d’auto développement. « Et c’est pourquoi j’atteste qu’il y a eu un changement de mentalités surtout chez les jeunes ».
Plusieurs jeunes témoignent que Mpinga-Kayove d’antan n’est plus celle d’aujourd’hui où règne la concorde sociale, avec un calme retrouvé, avec des jeunes tournés vers l’auto-développement, un véritable changement.
Aujourd’hui, raconte Sildonie Nibizi, de la zone Mpinga, il n’y a presque plus de suspicion. De nos jours, poursuit-elle, nous partageons la bière, il y a des mariages interethniques, personne ne vient vous dire qu’il ne faut pas aller chercher l’âme sœur chez les Hutu ou chez les Tutsi.
« Un jeune homme issu d’une famille hutu peut demander en mariage une jeune fille tutsi et vice versa et ils fondent un foyer viable et socialement paisible. Un Hutu peut rendre visite à un Tutsi et passer de bons moments ensemble et vice versa, c’est vraiment la concorde sociale », affirme cette jeune femme.
A Mpinga-Kayove, l’administration salue différentes initiatives de paix menées auprès des jeunes et salue le pas franchi par cette commune frappée de plein fouet par différentes crises avec un rôle prépondérant de la jeunesse souvent manipulée et instrumentalisée.
Philippe Kanyoni, administrateur de Mpinga-Kayove, ne le cache pas : « Les jeunes ont été manipulés jusqu’à être embarqués dans des tueries. Le passé a été jalonné de crises cycliques et la jeunesse a joué un rôle de premier plan. Des gens se sont entretués sur base ethnique.
Mais aujourd’hui, suite aux formations dont ces jeunes ont bénéficié sans oublier la part de l’administration et les appels des associations, ces derniers vivent en harmonie.
Actuellement, ils sont plus préoccupés par le développement. Ils s’attèlent à l’auto-développement au sein des coopératives et d’autres groupements. Il n’y a plus de ces histoires d’ethnie, de s’entredéchirer.»
Mais ces massacres, cette chasse aux tutsis n’est pas génocide seul 1972 est génocide! !!
@Maguru
Tout est génocide pour toi. Au fait le pays a un déficit catastrophique d’empathie depuis les dernières années de la colonisation. C’est cela qui a mis le pays à genou
Donc à Mpinga- Kayove les hutus ont tué les tutsis!Soyez précis, ils ne se sont pas entretués comme vous le dites!!
A quoi bon de nous entre-tuer?nous sommes de la même nation,nous partageons tout,regardons seullement la pauvreté notre grand enemis.
Aho ni vyiza espérons que les massacres hutus-tutsis n’auront plus lieu dans nos paysans qui partagent surtout la pauvreté!!