Samedi 23 novembre 2024

Editorial

De malédiction à la bénédiction des ressources

01/04/2022 9

Le 3 mars 2022, un décret portant révocation du permis d’exploitation du nickel et des minerais associés sur le périmètre Musongati en faveur de la société Burundi mining metallurgy international (BMM international) est signé. Elle avait obtenu ce permis le 3 juin 2014. Cette licence d’exploitation sera donnée à la société East African Region Project Group, une société que l’on peine de tracer le background. Soit. Un mémorandum d’entente entre cette compagnie et le gouvernement sera adopté. Le ministre en charge de l’Energie et le représentant de la société y apposeront leurs signatures une semaine après, le 29 mars 2022. Pourquoi la révocation du permis d’exploitation à BMM international pour l’accorder dans la précipitation (en moins d’un mois) à une autre compagnie dont on ignore les prestations antérieures ? La question est sur toutes les lèvres.

Par Léandre Sikuyavuga

Tout de même une nouvelle qui fera couler beaucoup d’encre et de salive : « La société déboursera un montant de 1,5 milliard de dollars américains par an à titre de subvention financière pour une période de 10 ans, soit 15 milliards de dollars américains… East African Region Project Group versera annuellement pendant 10 ans un montant de 500 millions de dollars américains, soit 33,3 %, à l’Etat du Burundi. »

Bref, le pactole ! Certes, l’annonce suscite quelques espoirs mais aussi beaucoup de questions et de doutes. Pour les uns, les optimistes, si l’entreprise publie les montants qu’elle va verser et ce que le pays va gagner, cela traduit son sérieux et sa bonne foi. Les optimistes veulent croire dans les balises annoncées par le porte-parole du gouvernement : ce mémorandum d’entente aura une durée de 2 mois. « Dépasser ce délai, sans transfert des fonds de la première tranche à la Banque centrale, ce mémorandum deviendra caduc. » Cette opinion estime que si cette « manne » était bien gérée, elle offrirait d’énormes possibilités de faire progresser le développement durable de notre pays. « Ces revenus seront investis dans les infrastructures, les services sociaux, le développement économique, les programmes et les services gouvernementaux ».

Une autre opinion reste sceptique, voire pessimiste et soulève beaucoup de zones d’ombre. Gabriel Rufyiri, président de l’Olucome, pose des conditions préalables à tout contrat : « Il devrait y voir d’abord l’adoption de la politique nationale minière et l’amendement du Code minier surtout mettre dedans la transparence dans l’octroi des permis d’exploitation. Malheureusement, ce sont des négociations qui se font dans les coulisses. » Plusieurs « sceptiques » auraient aimé connaître les détails de cet accord signé par leur pays «pour obliger les dirigeants politiques à rendre des comptes ».

Dans sa nouvelle stratégie de lutte contre la pauvreté, le gouvernement mentionne l’exploitation minière comme un pilier important du développement économique du pays. Mais des défis sont énormes dans ce domaine. Le secteur des matières premières est insuffisamment réglementé, le pays manque de compétences, l’énergie est insuffisante… Le chapelet de défis peut être égrené à satiété. Je pense, à mon humble avis, que la transparence dans les contrats reste la seule manière de s’assurer que les sociétés qui viennent exploiter nos minerais sont crédibles et capables. On évitera ainsi cette fameuse « malédiction » qui entoure l’exploitation des ressources minières et qui fait référence à la relation inverse entre développement et abondance des ressources naturelles, pour être dans la bénédiction des ressources…

Forum des lecteurs d'Iwacu

9 réactions
  1. Gacece

    De la malédiction à la bénédiction des ressources

    Votre titre est ambigüe! En y regardant plus profondément, vous remarquerez ne signifie pas qu’on va de la malédiction vers la bénédiction des ressources. Elle signifie aussi que la bénédiction des ressources est maudite.… d’où l’ambiguïté : L’expression a 2 sens contraires l’un de l’autre.

    Cela n’est peut-être pas fait exprès, et ce n’est sûrement pas ce qui est voulu en lisant le reste du texte, mais inconsciemment, l’effet est le même… celui d’une prophétie auto-réalisante.

    Juste un clin d’oeil.

  2. Maningo Jean claude

    J’ai demandé à un haut dignitaire s’ils pensent aux générations futures en exploitant anarchiquement et d’une façon opaque nos richesses. Sa réponse fait mal au dos: « Ils vont se débrouiller comme nous le faisons. » Qui dira mieux???

  3. Emery_Délice M.

    Personne n’ignore que le pays n’est pas à mesure d’exploiter ses ressources minières. Mais pour être plus transparent, des lois qui règlementent l’exploitation des minerais devraient être mises en vigueur. Et les contrats aussi devraient être signés en toute transparence, afin d’éviter les spéculations dans toutes les parties. Quand la signature des contrats se fait dans les coulisses, tout le monde doute aux évaluations corruptions ce qui est normal, or on ignore néanmoins que la corruption est une forme de dénigrement. Il accepte de t’offrir un pot de vin mais sache bien qu’il apprend aussi ta faiblesse, et finira par te ruiner. Il faut rester toujours débout, et défendre la terre et ses potentielles, qui vous est légué par vos encêtres. L’exploitation des minérais devraient être gagnant gagnant, soit 50% sur 50%. Penser à l’avenir du pays et de nos enfants à la énième génération

  4. Stan Siyomana

    Moi je veux bien espérer qu’on attend que les négociations aboutissent pour nous annoncer qu’il s’agit d’un tout nouveau consortium (comme SAKHALINE 1 qui, avant les sanctions économiques contre la Russie, exploitait le gaz naturel de l’Ile de Sakhaline, en Sibérie à l’est de la Russie).
    « En 1996, un consortium de majors internationales a signé un accord de partage de production (PSA) avec le concessionnaire des champs, la fédération de Russie et le gouvernement de Sakhaline…
    Membres du consortium
    30,0 % – ExxonMobil
    30,0 % – Sakhalin Oil & Gas Development Co. Ltd. (Japon)
    20,0 % – ONGC Videsh Ltd. (Inde)
    11,5 % – Sakhalinmorneftegas-Shelf (Russie)
    8,5 % – RN-Astra (Russie)
    Les partenaires russes sont des filiales de Rosneft1… »
    https://fr.wikipedia.org/wiki/Sakhaline_I

  5. Nkebereza

    « ….Cette licence d’exploitation sera donnée la société East African Region Project Group, une société que l’on peine tracer le background… » ! Cette société n’est pas connue dans toute l’Afrique de l’Est ? Et le gouvernement burundais l’aurait dénichée où alors ?
    Le sous-sol africain n’enrichit pas ces citoyens : les minerais et le pétrole ! Jetons un coup d’œil chez notre grand voisin de l’ouest, le Nigéria, … Où va donc l’argent ?

    • BarekeBavuge

      Pourquoi aller loin?
      Le Zaire est un scandale géologique. Trois minuscules pays: le Rwanda, Burundi et Uganda ont pu l’envahir et le vaincre en moins de 6 mois. La Monusco est là pendant 15 ans pour faire un travail régalien qui devait etre fait par le Zaire. C’est dire à quel point ce pays a été mal géré.
      Les matières premières ne sont une richesse que lorsqu’on a de bons dirigeants.
      Les sociétés minières ou pétrolières sont des rapaces et savent bien par quel bout prendre les dirigeants corrompus.
      Et en fin de compte c’est le pays et la population qui perdent toujours.
      Regardez comment les fils Bongo, Macias Ngema, la fille Santos (Sont honteusement riches). Cet argent ne vient pas du ciel, cabnke ibinyakuzimu.
      Meme l’argent qui a bati le building donné au Gouvernement par un ministre des mines que je ne nomme pas vient de quelque part.

      Pourquoi n y a t il pas d’appels d’offres?
      Pourquoi on ne nous donne pas les références de cette société?
      Comment cela se fait il que le montage se soit fait seulement en 1 mois?
      La société précédente chassée n a t elle pas porté plainte dans les tribunaux internationaux?

      • Yan

        @BarekeBavuge
        « Les matières premières ne sont une richesse que lorsqu’on a de bons dirigeants. »

        J’ai un sentiment qui est pire à ce sujet: que les richesses du sous-sol portent malheur dans plusieurs pays d’Afrique; il n’y a qu’à regarder autour de vous.

        • BarekeBavuge

          Je suis de votre avis Yan.

        • Ntwari B.

          @Yann
          Evidemment avec votre mentalitè défaitiste nous pouvons donc juste regarder les autres nous abattre?Ce monde appartient à ceux qui savent défendre leurs terres nkuko ntare rushati yarwanye.Ubu dufise igihugu grace à lui.S’il avait eu votre mentilité de perdant iki gihugu kiba kiri mu minwe yabandi.
          Il faut kurwanira igihugu cacu nibiri munsi yubutaka bwaco.Nta vyagusa bigihari cher ami.Dukeneye abagabo nyabo mu gihugu bazi kukirwara et non pas une mentité defaitiste et lâche!

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