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Déclaration de guerre : info ou intox ?

05/05/2013 Commentaires fermés sur Déclaration de guerre : info ou intox ?

Aloys Nzabampema vient de déclarer la guerre contre le gouvernement burundais. Pourtant, le porte-parole d’Agathon Rwasa rejette cette déclaration. Iwacu a tenté de démêler cette affaire.

<doc5120|left>2 septembre 2012. L’ « Etat-major » général du FNL-Ubugabo burihabwa déclare qu’il décide de combattre militairement le gouvernement de Bujumbura. Général Aloys Nzabampema appelle tout le peuple burundais à la résistance pour empêcher le parti CNDD-FDD de précipiter le pays dans le gouffre. Il demande également à la communauté internationale de sortir de son silence quand des militants des FNL sont massacrés comme des bêtes sauvages. Sinon, termine le général, les Burundais risquent de considérer qu’elle n’a rien fait pour assister la population en péril.

Le Général Nzabampema dénonce la politique d’extermination envers des militants des FNL dans la campagne du parti présidentiel baptisée « Mukube » ou « Traquez-les ». De plus, il rappelle le bradage des deniers publics, la corruption et les malversations économiques par la clique décideuse du président Nkurunziza. Il revient sur les divisions orchestrées par le pouvoir au sein des partis politiques de l’opposition et la « fraude » électorale de 2010.

Maramvya attaqué

Dans cette même nuit, les habitants de Kagaragara dans la zone Rukaramu ont été réveillés par des tirs nourris. Les témoignages recueillis sur place précisent que l’attaque a eu lieu vers 21 heures. « Les militaires de la position Kagaragara ont essuyé des tirs pendant au moins trois heures », affirme N.A. de cette localité. D’après lui, ces hommes armés disaient qu’il fallait attraper les neuf militaires occupant cette position. H.U., une habitante à 50 mètres de cette position, explique que personne n’a vu ces malfaiteurs : « Les coups de fusils venaient de partout et personne n’osait sortir pour les identifier. » Néanmoins, cette quinquagénaire affirme qu’ils étaient nombreux car ils faisaient beaucoup de bruits. Pour ces habitants, les forces de l’ordre doivent doubler de vigilance dans ce secteur proche de la Rukoko. Aloys Nzabampema a revendiqué cette attaque. Iwacu a essayé de le joindre sur ces deux téléphones sans succès.

Réactions

<img5122|left>{« Cette déclaration vise la déstabilisation politique de l’ADC »}

Léonce Ngendakumana, président de l’ADC-Ikibiri, parle de pure manipulation du pouvoir : « Il veut entretenir la confusion pour embêter notre coalition. Cela ne serait pas surprenant que le pouvoir s’adonne à ce genre d’exercice surtout que nous sommes en pleine échéance électorale. » Il jure que l’ADC ne reconnaît pas le général Nzabampema parce que c’est Agathon Rwasa qui a engagé le parti FNL dans cette coalition. « Le FNL reste membre d’Ikibiri à part entière », précise-t-il.
Léonce Ngendakumana ne doute pas qu’il s’agit d’un complot pour arrêter ou tuer des membres de cette coalition : « On l’a vu à l’époque de Kabirigi. Nous avons recensé plus de 200 personnes massacrées, accusées de faire partie de cette rébellion. »

M. Ngendakumana écarte l’idée selon laquelle Sinduhije serait derrière le général Nzabampema : « Chaque fois que des problèmes se posent, le pouvoir évoque le nom de Sinduhije au moment où le même pouvoir l’invite à rentrer. Aucun dossier judiciaire ne traîne derrière lui. » Il promet de poursuivre l’affaire Nzabampema pour savoir les mobiles qui sont derrière sa déclaration.

<img5123|right>{« C’est une trahison envers les Banamarimwe »}

Jacques Bigirimana, secrétaire général du parti FNL (d’Emmanuel Miburo), ne cache pas sa colère : « Depuis quand Aloys Nzabampema s’est transformé en leader politique pour sortir une telle déclaration ? » Simplement, M. Bigirimana trouve que la déclaration constitue un danger pour les militants des FNL(les Banamarimwe) : « Ils vont être arrêtés, tués et contraints encore une fois à l’exil. » Il constate que Nzabampema vient de donner raison au pouvoir: « Suite aux accusations portées contre nos militants de perturber l’ordre public, nous étions dans la logique de faire comprendre au gouvernement que nos militants ne le combattent plus, que la lutte armée est terminée. » Pour Jacques Bigirimana, tout vient de tomber à l’eau car le pouvoir les traquera sans relâche. Le secrétaire général regrette que la déclaration tombe au moment où la communauté nationale et internationale était informée sur la volonté de réunification de tous les héritiers de Gahutu Rémy. « Agathon Rwasa se présentera-t-il avec ça ? », s’interroge-t-il.

M. Bigirimana dit ignorer pour qui roule le général Nzabampema. Cependant, pour des fins électoralistes, il affirme que certains partis politiques ne souhaitent pas voir les FNL se constituer en une seule force. D’après lui, ils veulent récupérer l’électorat des FNL en 2015. Et de demander à tous les militants des FNL de rester sereins. Au gouvernement et aux forces de l’ordre de ne pas tomber dans le piège que leur a tendu Nzabampema afin de continuer à protéger tout le peuple burundais. A la communauté internationale, il lui sollicite de suivre de près ce qui se passe dans le parti FNL : « Nous sommes un parti agréé, nous avons déposé les armes et signé les accords de cessez-le-feu. Nous n’acceptons pas qu’un seul individu déstabilise tout le parti pour ses propres intérêts. Le pas franchi est grand. »  

<img5121|right>{« La guerre n’a pas de place dans notre pays »}

Pour Pierre Claver Mbonimpa, président de l’Aprodh, les politiques devraient tout faire pour éviter une nouvelle guerre. Il souligne que les organisations de la société civile vont user de toutes leurs forces pour convaincre le gouvernement et la communauté internationale d’approcher ce mouvement de Nzabampema afin de régler ce conflit par la voie de la négociation.

Toutefois, il reconnaît que Nzabampema a raison sur quelques points. Notamment sur la question des membres du parti FLN qui sont massacrés sauvagement tous les jours par les militants du parti Cndd-Fdd ou par les membres du corps de police sous l’œil passif du gouvernement. L’autre question concerne les prisonniers politiques. Le président de l’Aprodh abonde dans le sens d’Aloys Nzabampema. Selon lui, plus de 400 personnes sont détenues pour des infractions à caractère politique et beaucoup sont du parti FNL.

Pierre Claver Mbonimpa conseille au gouvernement de ne pas prendre à la légère la déclaration d’Aloys Nzabampema. «J’ai suivi comment le mouvement CNDD-FDD a été créé, le même circuit peut se répéter», souligne-t-il.
Pour ceux qui pensent que c’est une manipulation ourdie par le pouvoir ou qu’Agathon Rwasa serait derrière Aloys Nzabampema, le président de l’APRODH répond que tous ces scénarii sont possibles. «Il y a mille moyens d’accéder au pouvoir mais qu’on ne retourne plus dans les affres de la guerre », conclut l’activiste.

Le colonel Gaspard Baratuza, porte-parole de la FDN, estime qu’il ne peut pas réagir sur les propos de Nzabampema. Pour lui, l’armée doit toujours protéger les frontières et tout le pays en général. « Si Nzabampema a déclaré une guerre contre le gouvernement burundais, les forces de sécurité vont le combattre. »

Les scénarios autour de la " déclaration de guerre " …

A propos des déclarations de Nzabampema, certains observateurs énoncent trois hypothèses :
1. Des informations recueillies auprès des FNL fidèles à Agathon Rwasa qualifient Aloys Nzabampema de traître. « Les responsables du parti avaient déjà donné la consigne aux membres d’être prudents avec Aloys Nzabampema, ces derniers jours», révèle un militant des FNL d’Agathon Rwasa. Selon lui, Aloys Nzabampema est de mèche avec le service de national de renseignements. La même source affirme que les déclarations de Nzabampema sont une façon de discréditer le parti FNL de Rwasa afin d’arrêter les principaux responsables. Les mêmes informations révèlent que des Imbonerakure et certains prisonniers seraient déjà recrutés pour constituer une armée de Nzabampema. « L’effectif s’élève actuellement à plus de 2500 personnes », poursuit notre source. D’après elle, ils seront cantonnés dans différents endroits, probablement à Cibitoke, Bubanza et Rukambasi afin de montrer à l’opinion qu’ils abandonnent la lutte armée. « Cela sera alors une occasion d’arrêter les fidèles d’Agathon Rwasa, les accusant de rester seuls dans la logique de la guerre », précise-t-il.
2. La seconde hypothèse est que le processus de réunification de toutes les branches des FNL était déjà amorcé. Des sources dignes de foi affirment que les FNL étaient en train de préparer un congrès extraordinaire auquel allaient participer tous les membres des FNL. Nos sources expliquent que des bailleurs de fond avaient même accepté de le financer et qu’on était en train de négocier le retour de Rwasa. Certains observateurs parlent alors d’une machination du parti au pouvoir pour empêcher cette réunification. D’après eux, cela affaiblirait le parti présidentiel lors des élections de 2015.
3. La troisième hypothèse est qu’Agathon Rwasa serait toujours avec Aloys Nzabampema. Pour ceux qui soutiennent cette hypothèse, c’est une sorte de diversion pour que Rwasa ne s’attire pas les foudres de la communauté internationale.
Nous avons essayé de joindre les porte-paroles du parti au pouvoir et du SNR sans succès.

<img5125|left>Qui est Aloys Nzabampema ?

Il serait né à Mwaro et aurait grandi dans la province de Cibitoke, à Buganda suite au déménagement de sa famille. Selon une source digne de foi, général Nzabampema a un niveau 6ème année primaire. Il est dans la rébellion du mouvement Palipehutu, depuis les années 1994. Il évolue dans la branche armée. En 2006, il intègre l’Etat-major des FNL. Avant que ces derniers ne signent les Accords de principes avec le gouvernement, il est arrêté par le Service National de Renseignements burundais. Il sera libéré six mois plus tard, en 2007. Il intègre l’armée nationale en 2009 sous le grade de major. Il fera l’Iscam où il suit les cours d’harmonisation. Peu connu, il n’a pas fait long feu dans l’armée car une année plus tard, il retourne au maquis. D’après ses anciens compagnons de lutte, M. Nzabampema est un homme de terrain. Discret et peu connu, général Nzabampema ne serait pas en bons termes, ces derniers jours, avec Agathon Rwasa. Motif : après la « mascarade » électorale, M. Nzabampema se serait rangé du côté du pouvoir et travaillerait pour le compte du SNR.

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