Un flou plane sur le monument, érigé en commune Giheta de la province Gitega, qui fait mention d’un «génocide des Hutu en 1972». Le gouverneur dit ignorer les auteurs de cette œuvre.
Les photos de ce «site mémorial» installé à Nyambeho font le buzz sur les réseaux sociaux, depuis le weekend dernier. Des écriteaux sur ce monument attribuent cette œuvre à une association dénommée «Collectif des survivants et victimes du génocide hutu de 1972 avant et après».
Tous les officiels contactés par Iwacu ce mardi 25 septembre nient disposer des informations au sujet de ce monument. Joint par téléphone, l’administrateur de la commune Giheta nous a renvoyés au gouverneur. Celui-ci assure qu’il n’a pas d’informations au sujet de ce monument. «Ce n’est pas nous qui avons donné l’autorisation de monter cette pancarte», a dit le gouverneur Venant Manirambona.
Mgr Jean Louis Nahimana, président de la CVR, affirme avoir appris l’existence de ce monument «comme tous les Burundais». Pour rappel, la qualification de différents crimes, commis depuis l’indépendance jusqu’en 2008, revient à sa commission. «Nous avons ce mandat de par la loi qui nous régit», tient à expliquer le prélat. Il souligne que la qualification des crimes de génocide est une prérogative des instances habilitées.
Seule l’Organisation des Nations Unies peut qualifier légalement les crimes de génocide sur base des critères arrêtés par la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide de 1948.
Néanmoins, il ne s’oppose pas au plaidoyer de qui que ce soit en mémoire des siens. «C’est normal, c’est même noble. Mais quand il s’agit des installations des sites mémoriaux, le respect des procédures s’impose».
«Risque d’exacerbation des clivages ethniques»
En outre, le président de la CVR estime que l’installation de ce monument contredit la loi qui régit la commission dont il est le responsable. Cette dernière prévoit notamment des monuments communs et une date commune pour la commémoration de toutes les victimes sans distinction d’ethnie. L’organisation à l’origine de ce monument a devancé la CVR. Ce qui ne peut qu’entraîner le renforcement des clivages ethniques.
Mgr Jean Louis Nahimana appelle les Burundais à se dépasser et à apprendre à reconnaître les souffrances de l’autre. «Toutes les communautés ethniques ont été victimes de leurs identités et cela dans toutes les crises ». Sur ce, prétendre un génocide des Hutu en 1972 serait monopoliser la souffrance. «Nous risquons de nous laisser piéger par certaines opinions dominantes».
Interrogé, François-Xavier Nsabimana, président du Collectif international des victimes et survivants du génocide hutu de 1972 affirme avoir eu écho de ce monument. Cependant, il ne connaît pas ceux qui l’ont monté et leurs mobiles. «Cette association dont la dénomination est frappée sur la pancarte qui fait état de ce site mémorial diffère de celle pour laquelle j’assume la présidence. La nôtre revêt un aspect international».