Les périodes de tension et post-conflit suscitent des discours de culpabilisation collective aux conséquences potentiellement graves. Raymond Blaise Habonimana, expert en justice transitionnelle, propose le dialogue et la recherche de la vérité pour établir les responsabilités.
« La culpabilisation collective est une condamnation collective des gens. Elle responsabilise tout le monde sans condamner individuellement les vrais auteurs ou bourreaux. Des gens peuvent dire que tous les Hutu ou tous les Tutsi sont des bourreaux sans pouvoir déterminer les criminels à titre individuel ni les circonstances du crime. Il s’agit de discours de haine qui mène à des violences de masse de grande ampleur », indique Raymond Blaise Habonimana, expert en justice transitionnelle.
Pour lui, ces discours de culpabilisation collective ont une dimension psychologique. Il y a ceux qui promeuvent une seule mémoire et la manipule, ce qui peut engendrer d’autres victimes. Cette manipulation est le travail des leaders des communautés. « Ce sont eux qui manipulent nos chères parents qui ont leur manière de percevoir les choses. Les leaders maitrisent l’information et ont des intérêts à atteindre. Ils jouent un rôle important dans la construction de cette culpabilisation collective à des fins personnelles».
Raymond Blaise Habonimana fait savoir que ces discours sont monnaie courante en période post-conflit, comme aujourd’hui. « Ils peuvent être utilisés dans les périodes électorales en tant que ressources pour mobiliser l’électorat. « On commence à développer des discours qui vont délégitimer l’autre et amener les électeurs à voter pour soi ». De tels discours remontent aux grands massacres qu’a connus le monde, comme ceux de la 1ère et de la seconde guerre mondiale, notamment l’Holocauste et récemment avec le procès entre la Gambie et la Birmanie.
Cet expert en justice transitionnelle pense que la connaissance de la vérité sur le passé douloureux permet de couper court à cette globalisation. « Il faut promouvoir le dialogue entre générations. Il faut que les gens sachent ce qui s’est passé en termes de vérité pour éviter le pire. Une vérité sociale pour identifier les auteurs et établir des responsabilités ».
Il propose également la réparation symbolique des victimes du passé douloureux que le pays a connu. « D’une façon générale, l’Etat est le premier acteur dans ce processus. Que la vérité soit établie d’une façon constructive pour que nos communautés soient réconciliées pour une paix durable », conclut-il.