Les ministres des Finances, de la Santé et celui de l’Intérieur ont signé, lundi 26 octobre, une nouvelle ordonnance réglementant les nouveaux coûts du test de la Covid-19. Pour les milieux d’affaires, c’est une décision à revoir pour ne pas enclaver davantage le pays.
100$ pour les étrangers et 30 $ pour les nationaux est la somme que toute personne entrant sur le sol burundais devra s’acquitter pour subir le test de la Covid-19. Ladite ordonnance précise aussi que les personnes en partance vers d’autres pays devront payer 10 mille BIF. C’est l’indignation totale dans les milieux d’affaires (commerçants, transporteurs, hôteliers. « Une décision qu’il importe de vite revoir avant la réouverture effective des frontières et de l’aéroport international Melchior Ndadaye», clame en chœur les commerçants interrogés.
« A peine, nous arrivons à payer nos stands. Si le gouvernement nous prive des seuls clients qui nous restent. Comment nous acquitterions nous de nos impôts et taxes ? », se demande Adrien, vendeur de chaussures au marché de Ruvumera. Depuis la fermeture des frontières, il confie qu’il peut passer toute une semaine sans voir aucun client. Les seuls qui leur restent sont des Congolais et des Tanzaniens qui viennent s’approvisionner au Burundi. Pour lui, c’est une aberration. « Pour nous autres petits commerçants, payer les 50 $, c’était un casse-tête. Qu’en sera-t-il des 100 $ ? ». A l’instar de leurs clients étrangers, il voit mal comment une personne qui vient deux fois la semaine pourra à chaque fois débourser « cette modique somme ». Des soucis partagés par la quasi-totalité des hôteliers contactés.
A demi-mots, ils déplorent que ladite ordonnance aille à l’encontre des conclusions de la récente réunion avec les intervenants du secteur aéroportuaire. «Le principe était qu’on mette dans de bonnes conditions les voyageurs, notamment les touristes. Hélas, ce n’est pas le cas ».
Avec l’ouverture prochainement annoncée de l’aéroport international Melchior Ndadaye et des autres frontières, H.N, hôtelier, estime que le pays devrait surfer sur cette vague de « bon élève » dans la gestion de la pandémie. « Les autorités devraient en profiter pour s’ouvrir sur le monde, attirer les investisseurs réticents… Sinon, cette mesure ne fera que davantage enfermer le Burundi ».
Vu la lenteur dans l’obtention des résultats des tests pouvant durer 3 jours, cet hôtelier estime que le Burundi ne pourra pas devenir une destination de prédilection pour les étrangers. « Il n’y a aucun doute là-dessus. Même le peu de voyageurs qui nous reste changera de destination ».
Une mesure mal venue
Gabriel Rufyiri, président de l’Olucome, se dit surpris par cette obligation pour les Burundais de s’acquitter d’une somme de 30$ : « S’ils sont déjà dépistés lorsqu’ils rentrent chez eux, pourquoi payer encore une fois au pays ?».
Concernant les 100 $ que tout étranger ou Burundais en possession d’un passeport étranger devra débourser, M. Rufyiri demande aux trois ministères de surseoir à cette mesure. « Dans le contexte de reprise économique, c’est un non-sens. Pour les gens moyens, déjà, il était difficile de payer pour l’obtention du visa. Quid de ces 100 $». D’après lui, un mauvais calcul qui risque d’écorner la bonne image du pays.
Pour Thierry Havyarimana, représentant légal de l’Association des commerçants transfrontaliers du Burundi, ladite ordonnance signe quasiment un arrêt de mort pour eux. Tirant le diable par la queue, il ne cache pas que, sous peu, certains d’entre eux mettront la clé sous le paillasson.
Plus déplorable, il craint qu’à leur tour, les pays dans lesquels ils s’approvisionnent ne fassent pareil.
Pour justifier ces montants, le ministère de la Santé avait indiqué que c’était en vue de pérenniser le test.
« La philosophie est d’intégrer le test du Covid-19 dans les tests de routine », a fait savoir Dr Joseph Nyandwi dans un entretien accordé à Iwacu en septembre dernier. D’après lui, l’objectif est de se préparer à voler de ses propres ailes. « A un moment donné, les partenaires techniques devront partir. Mais, la Covid-19 restera. A nous de faire face à cette éventualité ».
Aux personnes qui se plaignent du coût onéreux du test, il avait répliqué : « Je vois mal quelqu’un qui est en mesure de payer un billet d’avion 3 millions BIF, manquer 50$ ».