Des délais d’attente infinis après les prélèvements, des citoyens agacés… C’est le constat fait sur différents sites de dépistage en mairie de Bujumbura.
Elles se disent dépitées, contrariées, trahies… Les personnes qui se font dépister la Covid-19, ne tarissent pas d’adjectifs pour décrire leur ras-le bol. Une situation exaspérante, clament-elles, d’autant plus que si elles ne sont pas confinées à temps, elles peuvent être des « vecteurs » de transmission de la maladie. Désormais contraintes d’attendre toute une semaine, certaines en viennent à mettre en doute le bien-fondé du dépistage. Jean, la soixantaine en fait partie.
S’étant fait dépister le 21 avril, bientôt une semaine s’écoulera sans qu’il n’ait encore obtenu le résultat de son test.
Certes, sa santé n’est pas vacillante. Mais, compte tenu de son âge, un test de confirmation pourrait le rassurer. « Tous mes enfants ont été testés positifs. A 60 ans, la meilleure chose à faire, c’est d’avoir le cœur net qu’au moins, la maladie ne sommeille pas en moi ». Même cas de figure pour Hassan. Ce chauffeur de bus rencontré sur le site de dépistage de la commune Mukaza « Bon Accueil » est venu pour le test de contrôle. Malheureusement, pour la 2e fois en une semaine, l’agent en charge du prélèvement lui dira de revenir le lendemain. « Il m’a dit que les résultats ne seront disponibles que demain ». Un dilemme sans nom pour lui qui craint de perdre son emploi : « Deux semaines au repos, c’est trop. Au risque que mon patron ne me remplace par quelqu’un d’autre, je dois décider si je dois rester confiné ou pas.»
Toutefois, une chose étonne. Dans cette journée du mardi 27 avril, sur tous les sites de dépistage en mairie, c’est la quiétude. Plus besoin de se bousculer. Chacun attend calmement son tour.
Une infirmière rencontrée à Kamenge glissera à notre endroit qu’au lieu de passer des journées à attendre les résultats, il faut explorer d’autres alternatives.
Une probable rupture de stock des tests rapides
Selon des témoignages concordants, la cause de ce retard dans l’octroi des résultats serait la rupture de stock des tests rapides. « La récente campagne de dépistage massive des élèves de retour en internat en est la cause », révèle une infirmière. Il se pourrait que le ministère de tutelle, tente-t-elle d’expliquer, ne fût pas davantage préparé quant à la suite des activités. Selon elle, une situation qui aurait fait que le stock de ces tests rapides ait rapidement tari. Face à l’urgence de la situation, poursuit-elle, la solution était de retourner à la case départ : le prélèvement par voie oro-pharyngée. « Certes un procédé utile, mais nécessitant du temps et autres moyens».
Allusion faite au temps nécessaire pour extraire l’ARN (acide ribonucléique) des échantillons prélevés.
Et si l’on s’en tient aux données de la 1ère semaine d’avril où plus de 200 échantillons étaient prélevés quotidiennement. Et ce, sur chaque site de dépistage en mairie de Bujumbura. Néanmoins, tous les agents en charge de prélèvement rencontrés sont plus que formels : le ministère en charge de la Santé publique doit faire feu de tout bois pour que les tests rapides soient de nouveau disponibles. Sinon, ajoutent-ils, dans peu de jours, il y a des risques d’entretenir des foyers de contamination. Des craintes que partage N.D., un cadre du ministère de la Santé publique : « Face à la flambée de cas positifs, je vois mal comment le problème du temps imparti dans l’octroi des résultats sera résolu avec seulement 12 machines PCR Gene Xpr, de surcroît, mises au repos toutes les deux heures. » Dans l’optique de faire vite, indique-t-il, la priorité sera accordée aux personnes présentant des symptômes de la maladie.
Les professionnels de santé dans l’embarras
« Quoi répondre d’autre, si ce n’est que courber l’échine et se taire », lâche N.T., un agent en charge du prélèvement rencontré au site de dépistage de l’hôpital de district de Ruziba. Face à l’instance des patients désireux de savoir à quand seront disponibles les résultats de leurs tests, il ne cache pas qu’ils sont désormais contraints de leur mentir : « Un répit de courte durée puisque le lendemain matin quand ils reviennent, nous ne savons pas comment nous justifier.» Selon lui, une entrave énorme à l’éthique et la déontologie professionnelle de leur métier. « Si une personne demande à être prise en charge, autant qu’il ait une réponse adéquate à sa doléance. Sinon, c’est notre crédibilité qui sera remise en cause ».
A en croire certains témoignages, nombreux sont les patients qui auraient décidé de « franchir un cap ». Sans connaître leurs statuts sérologiques, ils auraient décidé de prendre des médicaments contre la Covid-19. Et dans les pharmacies, révèlent les mêmes sources, la fâcheuse tendance se généraliserait. « Une course contre la montre vers l’automédication ».
Toutefois, fait remarquer Désiré Bizimana, pharmacien, une pratique qui n’est pas sans conséquence. « Les risques sont que ces produits peuvent causer des effets secondaires ou indésirables ».
Nous avons tenté de joindre le porte-parole du ministère de tutelle, en vain.
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