Vendredi 22 novembre 2024

Société

Contec Global Burundi : 30 employés dénoncent une rupture de contrat abusive

13/10/2021 5
Contec Global Burundi : 30 employés dénoncent une rupture de contrat abusive
Les bureaux de Contec Global Burundi dans les locaux de la PAFE. 

Transfert entouré d’opacité, absence de salaires depuis quatre mois, inertie des dirigeants de Contec Global, des représentants des pouvoirs publics indifférents… Le personnel local de la compagnie, qui fabrique notamment les documents de voyage, se dit las d’une situation dont il se dit perdant à tous points de vue.

Selon M.I.T., tout commence au début de cette année. « En janvier, nos employeurs ont commencé à nous payer en mains propres. C’était plutôt surprenant sans pour autant penser qu’il y a anguille sous roche », témoigne cet employé en poste dans la compagnie depuis 9ans.

Le 28 mai, le Gouvernement rompt son contrat avec Contec Global Burundi. « Notre employeur ne nous a nullement prévenus de cette situation. Qu’elle n’a été notre surprise de nous voir soumis à la signature d’un contrat avec le ministère en charge de l’Intérieur », raconte M.I.T.

D’après lui, la signature du contrat de travail entre les employés de la compagnie et le ministère de l’Intérieur, de la Sécurité publique et du Développement communautaire, s’est tenue au détriment du consentement des premiers. « Nous ne voulions pas signer de contrat avec le Gouvernement sans savoir de quoi retournait toute cette situation ». Toujours d’après M.I.T, l’assistant du ministre, Datus Nyandwi, a vite procédé à l’intimidation pour amener les employés de Contec Global à signer leurs nouveaux contrats avec son ministère. « Il a menacé que si nous ne signions pas les contrats, nous n’allions plus avoir accès à nos bureaux ».

L’entourloupe

Les employés de la compagnie obtempèrent et au moment de la signature des contrats, coup de théâtre. « Sur les contrats, la signature de notre employeur, en l’occurrence le ministère en charge de l’Intérieur, était absente. Pire, après la signature du contrat, alors qu’un employé a normalement droit à la copie du contrat, pour nous, ce ne fut pas le cas ! », s’exclame M.I.T.

Cet employé souligne, en outre, que ces contrats ont été signés avec la promesse d’octroi des salaires mais que, depuis le mois de juillet, aucun revenu ne leur a été versé en dépit de la poursuite de leurs activités. Sollicité à plusieurs reprises par les employés de Contec Global, l’assistant du ministre n’a, d’après eux, pas donné suite à leurs doléances. « Depuis tout ce temps-là, à chaque fin du mois, on nous dit qu’on sera de nouveau payé mais cela ne se produit jamais ! », avance M.I.T avec un ton de lassitude.

Indignation face à la direction de Contec Global

M.I.T. est d’autant plus inquiet qu’il n’y a pas eu de transfert du personnel vers le ministère en charge de l’Intérieur : « En réalité, il n’y a eu qu’un transfert du matériel. Quant au sort des employés, ça reste en suspens.»

Dans une lettre du 25 août qu’Iwacu a pu se procurer, soit trois mois après la rupture du contrat entre Contec Global et l’Etat burundais, le directeur de la compagnie, Kuldeep Singh, s’adressant à l’Inspection générale du Travail et de la Sécurité sociale, a dit attendre de la part du Gouvernement les modalités pratiques de la reprise du personnel local.

M. Singh a précisé qu’il peut y avoir un transfert des contrats existants avec tous les avantages y liés ou alors la conclusion de nouveaux contrats entre le personnel de la compagnie et leur nouvel employeur. « Au cas où le Gouvernement opterait pour le deuxième scénario, nous vous serions gré de bien vouloir nous renseigner sur la marche à suivre pour résilier les contrats de travail ».

Cependant, pour les employés de Contec Global, leur ancien employeur les a abandonnés en rase campagne. « C’est assez triste que nos employeurs n’aient jamais pris le temps de nous mettre au courant de la fin du travail à Contec Global alors que beaucoup d’entre nous étaient à leur service depuis pas mal d’années. A la limite, nous ont-ils traités comme des journaliers alors que nous avions, depuis le début, un contrat d’une année renouvelable ! », fulmine M.I.T.

« Nous sommes au fond du gouffre ! »

Les reproches vis-à-vis de la direction de la compagnie ne s’arrêtent pas là. K.Y., la trentaine, est une employée de Contec Global depuis cinq ans. De toutes ces années, la jeune femme dit en garder des souvenirs désagréables. Et de révéler des pratiques managériales pour le moins inhumaines. « J’ai travaillé pendant un moment au PCR, le service qui gère les permis. Je peux vous assurer que la responsable comptable n’autorisait pas que nous allions nous soulager pendant les heures de service. Nous étions alors obligés de le faire à son insu en évitant aussi de nous faire repérer par les caméras!»

Elle assure que les congés-maternité ont souvent été aussi une source de friction entre employées et employeurs : « Quand une femme arrivait au terme de sa grossesse et qu’elle sollicitait quelques jours de congé consécutifs à l’accouchement, ceux-ci lui étaient retirés de son congé annuel. En fait, en réalité, le congé-maternité n’existait pas à Contec Global.»

Un épisode semble avoir particulièrement marquée K.Y. : « Une de mes collègues venait de passer une semaine à l’hôpital à la suite d’une césarienne. Quand, soudain, nos patrons l’ont appelée pour la menacer que si elle ne reprenait pas son boulot, elle allait se faire virer!» Selon elle, la pauvre maman a dû difficilement retrouver le chemin du travail par crainte d’un licenciement.

Concernant le salaire non perçu depuis presque quatre mois, l’employée dit avoir perdu tout espoir. « Même si nous serions régularisés pour tous ces mois-là, nos dettes contractées ici et là ont atteint un tel niveau qu’il ne nous restera rien une fois rémunérés à nouveau. Sans parler des taux d’intérêts qui s’accumulent pour ceux qui se sont endettés auprès de banques. Nous sommes au fond du gouffre ! »

Aux côtés de sa collègue, M.I.T demande à la direction de Contec Global des indemnités pour rupture de contrat abusive « comme le prévoit le code du travail ».

Le commissaire général des migrations tranquillise

Contacté, le directeur général de Contec Global Burundi, Kuldeep Singh, a botté en touche : « Je n’ai absolument pas le droit de m’exprimer sur ce sujet en ce moment ».

Même esquive du côté de l’assistant du ministre en charge de l’Intérieur : « Je ne suis pas porte-parole du ministère pour m’exprimer sur ce sujet.» Après le rappel de son rôle dans cette affaire selon les employés de Contec Global, l’assistant du ministre a haussé le ton : « Ce dont je me suis entretenu avec eux est mon affaire. S’ils se sont finalement confiés à vous, eh ben, trouvez la solution à leur problème ! »

Le commissaire général des migrations à la PAFE, Maurice Mbonimpa, révèle que les employés de Contec Global seront bientôt régularisés.

Joint au téléphone, Maurice Mbonimpa, commissaire général des migrations à la Police des Airs, des Frontières et des Etrangers, s’est montré rassurant : « Ils seront bientôt régularisés. Leur dossier est aujourd’hui aux mains du ministère chargé des Finances.»

Et d’ajouter : « Ce sont de nouveaux fonctionnaires. Donc, le traitement de leur dossier devait prendre un peu de temps. Mais je peux les rassurer qu’ils n’auront plus à attendre longtemps.»

Quid du code du travail ?

D’après l’article 97 de l’actuel code du travail au Burundi, est nulle la stipulation portant que le travailleur s’oblige à passer au cours du contrat au service d’un autre employeur à moins qu’elle ne désigne un employeur au service duquel l’employé peut être transféré.

Selon ce même article, la stipulation n’est valable que si le transfert est prévu en faveur de personnes auxquelles le premier employeur céderait tout ou en partie l’entreprise à laquelle l’employé prestait ses services.

Quant à l’article 98, il prévoit que le transfert de tout contrat d’un employeur à un autre est subordonné au consentement du travailleur constaté par écrit, sans contrainte, ni pression abusive, ni fraude, ni erreur.

Forum des lecteurs d'Iwacu

5 réactions
  1. JIGOU MATORE

    Enfin le fameux Contrat PPP ( Public Privat Partenship) est enfin arrivé à terme, et donc résilié. C’est une des affaires « louche et mafieux » de la Gouvernance DD. Contec Global était comme « un Etat dans l’Etat », avec des revenus et des bénéfices énormes, sans s’acquitter d’aucune taxe ou impôt, alors que c’était une entreprise privée comme les autres. Le contrat qui devait durer 5 ans a été renouvelé plus de deux fois, au grand dam des intérêts nationaux. Si l’Inspection Générale devrait faire un audit là dessus et produire un rapport sur l’établissement des responsabilités des uns et des autres dans ce dossier, des têtes devraient tomber je vous dit. Si du moins la volonté du Gouvernement de lutter contre la corruption et les malversations économiques est vraiment « réelle ».
    Mais on se félicite quand même de la fin de ce fameux contrat PPP.

  2. Gasongo Mariko

    Nukuri turihanganishije bene wacu bahuye n’ivyago dusomye hano hejuru.Imana buca ibahorera niba ama revendications yanyu ari honnêtes ata manyanga arimwo.Uyo mu responsable yasubije na arrogance va subir le même sort d’ici peu.Imana ikora ihoze.

  3. Nkebereza

    …« Ce dont je me suis entretenu avec eux est mon affaire. S’ils se sont finalement confiés à vous, eh ben, trouvez la solution à leur problème ! »
    Quelle réponse d’un responsable sur un dossier dont les intéressés sont économiquement ravagés !!! Il ne faut tout de même pas attendre que son excellence le Président de la République vienne sonner la fin du calvaire. Et le ministre qui a dans ses attributions la gestion de ce service, où est-il ?

    • Bavuga

      Uti ministre arihe? Sigaho wa muntu!!! Reka ngucireko gatoyi ingene umuntu ashobora kuba ministre mu gihugu giteye imbere kimwe nzi. Voici les étapes:

      1. Tu dois d’abord battre camapagne dans ta circonscription électorale pour être élu député. Si tu perds, oublie de voir plus haut.

      2. Une fois élu député, il faut que le parti dont tu es membre remporte la majorité des sièges à l’assemblée nationale.

      3. Il faut que tu sois quelqu’un de très brillant pour que le chef de ton parti qui devient alors chef du gouvernement te propose un poste de ministre. Tu fais alors partie de la crème.

      4. Quand tu es en fonction comme ministre et fais la sourde oreille à une réponse inapproprié comme celle de cet assistant du ministre, les partis d’opposition vont faire pression sur le chef du gouvernement à l’assemblée nationale pour exiger immédiatement ta démission.

      Ndakurahiye. Ivyo muri Leta Mveyi numva ntavyo nzi.

  4. Kabizi

    Qui est le patron de la société contec global?? Pourquoi les bureaux dans les anceintes de la Pafe alors qu’ elle est privée??

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