Des victimes syriennes, en majorité des mineurs, des laissés pour compte, sans espoir, des rêves brisés : c’est ce que les étudiants de l’Université du Lac Tanganyika ont vu dans un documentaire de 51 minutes projeté ce jeudi 24 janvier sur la révolution en Syrie. Et les leçons à tirer sont nombreuses …
<doc6902|right>Ils sont curieux et très attentifs, les visages de ces étudiants silencieux qui suivent {« Quant les éléphants se battent, c’est l’herbe qui souffre »}, un documentaire qui parle de la révolution syrienne. Particulièrement de ses victimes. Tout se passe dans la salle des conférences de l’Université du Lac Tanganyika. Le long métrage est virulent. Il met l’accent sur les séquelles que laisse le conflit sur la nouvelle génération. Pour les enfants syriens en exil, peut-on le voir de part quelques extraits, la révolution traumatise, intoxique, tue, mais aussi inspire les artiste. Pathétique ! Certains jeunes, surtout les filles, en Turquie où ils ont trouvé refuge, illustrent le conflit, ses acteurs et ses intérêts par le dessin et la peinture. D’autres, très petits, s’amusent à en faire une mise en scène. « Je déclare que je fais défection pour joindre l’armée libre », lâche un petit gamin, se faisant passer pour un militaire dissident du régime Assad, d’un ton autoritaire, en tenue militaire. L’extrait ne laisse pas l’auditoire indifférent. Des hurlements, des murmures, et même des rires éclatent.
L’émoi est là. L’assemblée est surtout pétrifiée par cette transmission du conflit des parents vers leurs enfants.
Des leçons à tirer
Mais, pourquoi un documentaire qui parle de la Syrie au Burundi, et surtout dont la diffusion cible les étudiants ? « L’université est la pépinière des leaders. Ces jeunes doivent être avisés sur les dangers qui guettent les politiques assoiffés de pouvoir, afin de ne pas tomber dans le même piège demain », explique Natacha Songore, fondatrice du Cine-Club Horizons et organisatrice de la projection.
Le débat, après la projection, pousse l’analyse plus loin. Les étudiants, jeunes, mais aussi plus âgés (notamment ceux qui fréquentent les amphithéâtres le soir), les professeurs qui enrichissent les débats, veulent comprendre le conflit, ses enjeux, ses tourments et surtout l’efficacité de la voie optée par les révolutionnaires pour combattre le pouvoir : « La violence est-elle le meilleur moyen de lutte pour la liberté ? », lance comme réflexion, Eloi Mugisha, qui préside le club universitaire Génération Consciente, co-organisateur de l’événement.
« Il faut tout relativiser. La justification des moyens utilisés par un pays se retrouve dans son contexte politique mais aussi dans son histoire », expliquent certains. Mais d’autres campent sur le fait qu’on ne riposte à la violence que par la violence. Les avis divergent. Mais par-dessus tout, un point, un seul, parvient à recueillir l’unanimité : La gestion de l’après révolution tourne la plupart des fois en catastrophe. « Les révolutions sont mal préparées, subites, les leaders qui prendront la relève ne sont pas connus. Pire, ils n’ont pas été préparés. C’est surtout la souffrance vécue, parfois même la haine, qui inspirent les révolutionnaires et non pas l’envie d’un réel changement », explique l’un des participants.
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Iara Lee, cinéaste brésilienne d’origine coréenne, est la réalisatrice du documentaire. Egalement membre du conseil du président de l’International Crisis Group, cette activiste avait déjà réalisé {«Cultures de résistance »}, un film qui explore comment art et créativité peuvent se transformer en munitions dans la bataille pour la paix et la justice. Dans l’entre-temps, les projections continueront dans d’autres universités et dans les lycées, car, complète Natacha Songore, «Une image vaut plus que mille mots.»