Le ministère de l’environnement serait sur le point de régler à l’amiable la question des terres de Mutambara, commune Rumonge, dans la province de Bururi. Des propriétaires avaient accusé le gouvernement de spoliation.
Localité de Mutambara. A trois kilomètres de la ville de Rumonge. Des habitants cultivent leurs champs sous un climat doux en ce mois d’août. Des plantations de palmiers et d’autres cultures s’étendent sur plus de 7 hectares, en bas de la route menant à Nyanza-lac. Mais le calme est loin d’être total dans le cœur de ces habitants.
Très remonté, un certain Jean qui a une propriété sur place lâche : « Nous ne pouvons accepter que nos terres soient spoliés pour être données aux rapatriés. » Selon lui, le gouvernement persiste à affirmer que ces terres appartiennent à l’Etat, alors que c’est faux.
Les habitants indiquent vivre dans la peur depuis une année. Tout commence le 9 novembre 2010. Des agents du ministère de l’environnement débarquent à Mutambara et commencent à fixer des piquets dans toutes les propriétés.
Quelques jours après, les habitants apprennent que le gouvernement veut distribuer « leurs terres » aux rapatriés du village de paix d’à côté, ce qui est confirmé par une source administrative qui a gardé l’anonymat. Depuis, confient ces habitants, ils sont inquiets car ils ne savent pas où ils iront, une fois expulsés.
Après plusieurs correspondances adressées à l’administration, Mme Gloriose Nimenya, gouverneur de Bururi, leur réponu que ces terres appartiennent à l’Etat. Les ministères de l’environnement et de l’agriculture sortent même une ordonnance conjointe, le 3 novembre 2010, qui annule tous les titres de propriété des propriétaires de Mutambara. Ces derniers s’en étonnent car ils estiment que seul le ministère de la justice est habilité à le faire.
Toutes ces familles indiquent qu’elles ne sont pas opposées à une expropriation. Mais elles demandent que le gouvernement le fasse conformément à la loi. « Le Code foncier stipule que l’Etat peut exproprier un particulier pour cause d’utilité publique. Toutefois, il doit l’indemniser au préalable (Art 321 et 322) », rappelle un habitant de Mutambara.
Or, constate ce même habitant, le gouvernement ne leur a jamais expliqué l’importance de cette utilité ; car, pour eux, la raison avancée pour donner leurs terres aux rapatriés n’en est pas une. « Certains d’entre nous sont des rapatriés venus en 1993. C’est la même administration qui nous a octroyés ces terres. On se demande alors pourquoi elle veut nous les prendre pour les donner à ceux qui sont rentrés après nous. »
Devant cette situation, ces habitants ont décidé, depuis le 4 février dernier, de porter l’affaire devant Cheikh Mohamed Rukara, l’Ombudsman du Burundi. Selon Donavine Niyongabire, chef de cabinet de l’Ombudsman, le dossier est en cours d’analyse et la commission chargée de l’étudier donnera son rapport prochainement : « Cette commission s’est même rendue sur place ce mercredi 17 août. »
Pour Jean-Marie Nibirantije, ministre de l’Environnement et de l’Aménagement duTerritoire, cette question sera réglée très prochainement : « Nous comptons octroyer des papiers à ceux qui exploitaient une partie de Mutambara depuis longtemps. » Toutefois, prévient-il, la grande partie de cette localité reste une réserve naturelle, donc un domaine de l’Etat « Cette partie a toujours appartenu à l’Etat et constituait un vaste champ de coton. Ceux qui ont empiété sur ces terres devront les rendre. »
D.N, habitante de Mutambara, et mère de sept enfants, ne l’entend pas de cette oreille: « Personne n’a empiété sur le domaine de l’Etat car ce dernier n’a jamais eu des terres ici. Ce sont des propriétés de nos ancêtres. » Pour elle, le gouvernement veut abuser de son pouvoir pour spolier de petites gens.
Quatre groupes de personnes exploitent Mutambara. Le premier est constitué des personnes qui disent avoir reçu ces terres dans les années 50 sous la colonisation. Le second est composé de ceux qui ont été expropriés suite à l’extension de la réserve de Nyamirambo (communément appelée Mungongo). Le troisième groupe est celui qui a bénéficié des terres via le projet PIA RUBUBU (Projet d’Intensification Agricole dans les communes de Rumonge, Burambi et Buyengero), sous la deuxième République. Enfin, le dernier groupe est composé ce ceux qui ont acheté aux trois premiers. Ceux-ci ont même des titres des propriétés.