À partir du 16 septembre 2024, la loi portant cadre des confessions religieuses est entrée en vigueur. Cette loi impose, entre autres, le niveau baccalauréat pour les dirigeants, la gestion des financements des Églises ainsi que la distanciation entre les lieux de culte. Il y a toujours un statu quo malgré la mise en garde du ministère de l’Intérieur. Coup de projecteur.
La loi a été adoptée le 16 septembre 2022. L’article 70 donnait un délai de grâce de 24 mois jusqu’au 16 septembre 2024 pour permettre aux confessions religieuses de s’y conformer. Selon l’article 46 de cette même loi, une distanciation entre deux lieux de culte est exigée : au moins 500 m en milieu urbain et 1 km en milieu rural. Le dimanche 29 septembre 2024, la mesure n’était pas encore respectée dans certains endroits de la mairie de Bujumbura.
Nous sommes par exemple à la jonction entre la 13e avenue du quartier Mirango II de la zone urbaine de Kamenge et la Route nationale Bujumbura-Bugarama (RN1). A quelques 100m se trouve une chapelle de l’Eglise catholique. C’est dans la paroisse Kamenge.
Non loin de cette chapelle, à moins de 40m, est érigée « l’Eglise Baptiste de la Parole Vivante de Kamenge ». La prière est en cours. Chants et danses au rythme des tambours alternent.
De l’autre côté de la même chapelle, à 30m, se trouve une autre église dénommée « Eglise Shamah Center ».
Selon les habitants rencontrés près de cette chapelle, ces églises ont été implantées plus tard après la construction de la chapelle. « Il y a interférence des voix et des chants les jours de culte », déplorent-ils. Ils implorent l’administration locale de faire respecter la loi.
Sur la même avenue, à environ 100m, se trouve l’église des témoins de Jéhovah. Celle dénommée Fraternité Evangélique Christ d’Afrique du Burundi est implantée à 50m de celle des Jéhovah. A moins de 100m se trouve l’église dénommée Word of Life Liberation Church.
Sept églises sont donc implantées sur un rayon de moins de 500m. Or, le ministère de l’Intérieur recommande qu’une église et une autre doivent être séparées par au moins 500m en milieu urbain et 1000m en milieu rural.
Vers la fin de l’avenue, à gauche, se trouve l’Eglise Baptiste et, à droite, il y a l’Eglise Méthodiste Libre au Burundi, paroisse Mirango II. A peu près 40m les séparent. C’est à cheval de la route pavée séparant les quartiers Teza et Mirango II, tous de la zone urbaine de Kamenge.
Une église dénommée « Eglise du Christ Actes des Apôtres » se trouve sur la même avenue. Il est presque 11h30. La messe continue. A un jet de pierre se trouve celle dénommée « Communauté des Eglises du Christ pour les Héritiers de la Promesse ». Les fidèles rentrent un à un.
Selon la population environnante, c’est du tapage les jours du culte. « Nous ne nous reposons pas tranquillement les jours du culte. Les fidèles de ces églises séparées par au moins 20m font beaucoup de bruits », se lamente G.H. Il demande aux autorités habilitées de faire respecter la distance recommandée par le ministère de l’Intérieur.
Une implantation anarchique à Cibitoke et Kinama
La distanciation physique entre les églises dans la zone urbaine de Cibitoke dérange aussi plus d’un. La situation est atypique à l’avenue dite dorsale séparant la zone urbaine de Cibitoke et celle de Kinama.
Sur cette avenue, 5 églises sont implantées sur une distance ne dépassant pas 250m. A peu près 20m séparent l’église du « MINEVAM » et l’église Adventiste du 7e jour. Cette dernière se trouve à au moins 10m de celle dite « Burundi Assemblees of God’s Fellowship ».
L’église de Pentecôte est à quelques 50m du Sinai Temple. Des églises qui cohabitent avec les habitations. Il est midi et la musique retentit partout. La prière est en cours. L’on entend concomitamment à travers les haut-parleurs : « Alléluia, Yesu ashimwe!» (Alléluia, que Jésus soit loué !).
« C’est du brouhaha et de la cacophonie les dimanches. Le bruit des chants en provenance de ces églises casse nos tympans », se lamentent les riverains de cette avenue.
Un administratif à la base décrit une situation insupportable. A cause des tapages, les habitants peinent pour se reposer lors des cultes que ce soit le jour ou la nuit. « Je pense que le ministère de l’Intérieur fera tout pour mettre en application la loi les régissant car la période de grâce pour se conformer aux nouvelles dispositions a expiré. Les mesures prises par le ministère de l’Intérieur et les sanctions y relatives seront strictement appliquées », espère-t-il.
Même situation en zone urbaine de Bwiza
Par exemple, sur l’avenue de la Jeunesse, tout près du marché de Jabe, se trouvent trois églises très rapprochées. Elles se succèdent à moins de 100 m. Les Église Christ Generation City, Bethany Holy Church et La Vie Sauve de Golgotha en sont des exemples.
Sur la même avenue, l’Église Vivante de Jésus de Jabe est à moins de 200 m de l’Église Israël Pentecôte Church, située sur le boulevard du Peuple Murundi. De l’autre côté de cette dernière église, à moins de 400 m, se trouve l’Église Pentecôte de Bujumbura en parallèle avec une autre nommée « Ishengero ryo kwihana no kuruhukira muri Yesu Kristo » (l’Eglise de la repentance et du repos en Jésus Christ », située à moins de 300 m vers le bout de l’avenue de l’Imprimerie.
Insuffisants
Les dirigeants des confessions religieuses estiment que les deux ans accordés pour se conformer à la nouvelle loi sont insuffisants. « Les églises n’ont pas les mêmes moyens. Il est possible que certaines soient actuellement en règle avec la loi, mais la majorité des Églises ne se sont pas encore conformées aux exigences du ministère. Cela demande plus de moyens, comme par exemple les moyens d’avoir un endroit propre de culte », se désole un pasteur d’une église en zone urbaine de Cibitoke.
Concernant le niveau du baccalauréat exigé par cette loi, il affirme que le diplôme n’a rien à voir avec la vocation de Dieu. « La vocation de Dieu ne dépend pas des études. Dieu a sa propre manière de choisir celui qu’il veut sans toutefois se concentrer sur son niveau d’études », déclare un pasteur de Kamenge.
Selon Rev Pasteur Sylvestre Bizimana, secrétaire général du conseil national des églises du Burundi, les confessions religieuses sont en train de mettre en application la loi. La question de la qualification des dirigeants religieux ne constitue pas, dit-il, un obstacle majeur. « Les leaders des Églises membres du CNEB remplissaient déjà les conditions liées au diplôme avant cette loi. Donc, nous n’avons pas de défi à relever à ce niveau », a-t-il expliqué, soulignant que cette exigence n’aura pas d’impact significatif sur leurs membres.
Il dit qu’ils se sont convenus avec le ministère de l’Intérieur sur certains défis. Sylvestre Bizimana souligne deux questions majeures liées à la mise en œuvre de la nouvelle loi religieuse.
Il s’agit notamment de la distanciation entre les églises et le retard de délivrance des permis de construction pour la conformité des temples. « Comme la loi n’est pas rétroactive, une enquête doit être menée pour déterminer la position des églises avant l’adoption de la loi, sinon des conflits pourraient émerger ».
Concernant l’exigence des accords-cadres avec le gouvernement pour les églises affiliées à des églises-mères étrangères, Bizimana a indiqué que plusieurs églises avaient déjà soumis leurs dossiers. « Les Églises qui sont prêtes pour l’accord-cadre ont déjà déposé leurs dossiers ».
Il parle également d’un retard dans la prise d’acte par le ministère de l’intérieur des dossiers contenant des organes statutaires impératifs pour les églises créées au niveau local.
Sur l’obligation de déclaration de leurs aides de la part des partenaires extérieures, il explique que des églises ont déjà mis en application ces mesures. « Il y a eu une obligation que tous les comptes en devises soient hébergés à la Banque de la république du Burundi, BRB. Aucun compte en monnaie étrangère n’est inscrit dans les livres des banques commerciales. On n’a pas de problème à ce niveau ».
La loi doit être respectée
Le ministère de l’Intérieur, de la Sécurité publique et du Développement communautaire se dit déterminé à faire respecter la loi pour l’intérêt de tous. Désiré Nitunga, directeur général de la coordination des ONG et de la promotion des libertés publiques fait savoir que la loi sur les confessions religieuses doit être mise en application dans tous ses articles. « La loi a été promulguée le 16 septembre 2022 et a prévu une période de grâce de 24 mois aux confessions religieuses et mouvements religieux pour s’y conformer. Cette période a expiré le 16 septembre 2024. La déclaration du ministre de l’Intérieur n’était qu’un rappel ».
Il fait savoir aussi qu’une équipe du ministère fera une descente sur le terrain pour confectionner un inventaire des églises et leur localisation en vue de la mise en application de la loi en ce qui concerne la distanciation entre les églises comme le stipule l’article 47 de cette loi. Il rappelle le principe de la non rétroactivité de la loi. De ce fait, les églises implantées avant la promulgation de cette loi ne sont pas concernées par ces mesures de distanciation.
Désiré Nitunga parlent des organes statutaires impératifs contenus dans l’article 16 que chaque organisation religieuse doit avoir. Il s’agit de l’Assemblée générale, du comité exécutif et du conseil d’arbitrage. « Les organes dirigeants doivent être élus démocratiquement conformément aux statuts et règlements en vigueur ». Et de préciser que toutes les confessions religieuses sont concernées.
Il rappelle que tout financement extérieur doit être déclaré au ministère ayant la gestion des confessions religieuses dans ses attributions et les fonds transiter sur des comptes à la BRB. « Il n’y a rien d’ingérence car la loi est claire que tout argent en devises doit être géré à la BRB. J’invite toutes les confessions religieuses à y ouvrir des comptes en devises ».
L’article 45 de cette loi dispose qu’un représentant légal et le représentant légal suppléant doivent avoir au moins un diplôme de Baccalauréat et un responsable du lieu de culte doit justifier du niveau de formation biblique ou canonique. Désiré Nitunga est catégorique : « Un aveugle ne peut pas diriger les autres. Cette disposition vient pour lever certaines mauvaises interprétations de la Bible ».
Je ne sais pas ce qui est mieux. Je vis dans un pays où on a construit ces somptueuses églises mais les gens ne vont plus aux cultes.
De grands édifices qui sont entrain d’être transformés en condominiums ou appartements. J’en passe sur les conséquences des valeurs morales de ces dites sociétés.
Je ne suis pas si sûr qu’avec tous les défis que le pays est entrain de faire face, les églises soient une cause à haute priorité ou de grand dérangement social.
Et pourquoi cibler une église en particulier avec cette photo de l’église Minevam?
N’est ce pas la même église d’où sort des grands serviteurs de Dieu dans ce pays comme Chris Ndikumana avec Kanguka, Pasteur Aimé Prosper Ninganza, Pasteur Gahomera Bonnevie, Pasteur Stanislas Mutokambali, Pasteur Ncuti Denis et j’en passela liste est longue.
J’en connais beaucoup de gens que leur vie a été transformée dans cette église. Des anciens brigands, voleurs, drogués, prostituées, des gens qui aujourd’hui participent collectivement pour l’avancée de la société burundaise.
Fermez ces églises et on s’en reparlera dans quelques années. L’apostasie n’est pas mieux!
@Sokwe Samandari
1. Vous ecrivez:« Fermez ces églises et on s’en reparlera dans quelques années. L’apostasie n’est pas mieux!.. »
2. Mon commentaire
a. L’article dit:« Sur cette avenue, 5 églises sont implantées sur une distance ne dépassant pas 250m. A peu près 20m séparent l’église du « MINEVAM » et l’église Adventiste du 7e jour. Cette dernière se trouve à au moins 10m de celle dite « Burundi Assemblees of God’s Fellowship »… »
b. Meme si l’eglise du « MINEVAN » a forme certains pasteurs elle est tenue a respecter les lois du pays.
Vous defendez cette eglise/vous manifestez une certaine solidarite negative en disant: « Et pourquoi cibler une église en particulier avec cette photo de l’église Minevam? N’est ce pas la même église d’où sort des grands serviteurs de Dieu dans ce pays… »
c. Est-ce que cette concentration d’eglises dans un meme coin ne pourrait pas contribuer a l’insalubrite que la Premiere Dame Angeline Ndayubaha Ndayishimiye essaie de combattre dans la ville de Bujumbura avec sa campagne Zero Dechets?
Ceux qui ont élaboré cette loi portant sur les confessions religieuses ont oublié d’y inclure les exigences architecturales. Parce qu’une église ce n’est pas quatre murs, quelques fenêtres et une croix. C’est plus que ça.
Ceux qui ont eu l’opportunité de voyager à travers le monde ont probablement remarqué que les églises sont des œuvres d’art, des chefs-d’œuvre d’architecture que les touristes, chrétiens et non chrétiens vont visiter juste pour admirer leur beauté.
Mais au Burundi, on remarque que c’est en majorité de simples bâtiment construits à la va-vite, au coin de la rue. Remarquer que nous disons « ingoro y’Imana », ingoro c’est la somptueuse résidence du Roi, elle mérite des égards et des gros efforts dans son édification; ça ne peut pas être une hutte.
S’il faut réduire le nombre par distance les unes des autres, il faut je pense procéder en commençant par écarter les bâtiments qui sont en dessous des normes.
« Parmi les lieux de culte fermés par l’office national de la gouvernance au Rwanda, une majorité de petites églises pentecôtistes et plusieurs mosquées. Au total, 4 223 établissements ont fermé leurs portes. Pour cause : des manquements à certaines réglementations : d’abord sur la sécurité pour certains sites sans extincteur et alarmes incendie, par exemple, ou encore installés illégalement dans des caves ou trop proches de cours d’eau…
Parmi les autres critères avancés par les autorités pour expliquer ces fermetures : le non-respect des conditions d’insonorisation nécessaires pour éviter les nuisances dans le voisinage pendant les prières ou encore la qualification des responsables : les dirigeants d’églises paroissiales devant détenir un diplôme universitaire en théologie… »
https://www.rfi.fr/fr/afrique/20240805-le-rwanda-ferme-plus-de-4-000-lieux-de-culte-en-quelques-semaines