Vendredi 22 novembre 2024

Société

Communes Rugombo et Buganda : Quand les agriculteurs et les éleveurs se regardent en chiens de faïence

23/12/2020 Commentaires fermés sur Communes Rugombo et Buganda : Quand les agriculteurs et les éleveurs se regardent en chiens de faïence
Communes Rugombo et Buganda : Quand les agriculteurs et les éleveurs se regardent en chiens de faïence
Des troupeaux de vaches en train de brouter sur la colline Kiramira

La tension monte d’un cran entre les agriculteurs et les éleveurs des communes Buganda et Mugina, en province Cibitoke au nord-ouest du Burundi. Plus de 2 ha de cultures sont déjà dévastés par les vaches. Les agriculteurs menacent de se faire justice. L’administration promet une solution.

Lundi 14, à 9h. La journée est ensoleillée. Nous sommes sur la colline Kiramira, zone Kiramira, commune Rugombo, province de Cibitoke. Une végétation verdoyante s’y observe. Sur cette colline, les agriculteurs accusent les éleveurs de faire paître le bétail dans leurs champs. Nous rencontrons Jean Ngendakumana, un agriculteur dans cette localité. Il sarcle son champ de maïs. Mais une partie de son champ a été détruite par le bétail la semaine dernière. Il ne cache pas sa colère. «Les gardiens de vaches ont fait paître leurs troupeaux dans mes champs de maïs, de haricots et de maniocs. Un demi-hectare a été dévasté par les vaches », se lamente-t-il. Il fait savoir qu’il a alerté l’administration mais déplore qu’elle tarde à réagir. « Je réclame des dommages et intérêts ».

Ce conflit entre les agriculteurs et les éleveurs dans la commune de Rugombo prend des allures inquiétantes. Thaddée Nzeyimana, est un agriculteur dans la plaine de la Rusizi, sur la colline Mbazamiduha, commune Rugombo. Il fait savoir que les gardiens ont fait paître les vaches dans ses champs de haricots, cotons et de sorghos pendant la nuit.

N.D, un autre agriculteur dans cette localité, des larmes dans la voix, informe qu’au moins, un hectare de ses cultures a été détruit. «Je n’espère rien récolter durant cette saison. Mes champs ont été dévastés par les vaches pendant la nuit. Les gardiens l’ont fait sciemment ». Il affirme avoir été battu par les gardiens quand il réclamait des dommages et intérêts.

Cap sur la commune Buganda

Comme dans la commune Rugombo, un climat malsain règne à Buganda entre les agriculteurs et les éleveurs. Il y a risque d’affrontements. La recherche des terrains de pâturage est à l’origine de ce conflit. Certains agriculteurs rencontrés peinent à supporter la situation. Ils dénoncent l’inaction des administratifs et menacent de se faire justice.

«C’est inacceptable. Nous n’allons pas supporter que nos cultures soient régulièrement dévastées par les troupeaux », lancent-ils avec colère. Des sources sur place indiquent que les agriculteurs risquent de se venger en donnant du poison à ces vaches. Selon ses sources, un cas s’est produit l’année dernière où 5 vaches ont été tuées.

Ces agriculteurs demandent l’application de la loi relative à la stabulation permanente et à l’interdiction de la divagation des animaux domestiques. Une façon, selon eux, de mettre un terme à ce conflit récurrent qui les oppose aux éleveurs. Ils demandent également aux forces de l’ordre d’effectuer des patrouilles nocturnes afin de mettre la main sur les gardiens qui font paître leurs troupeaux dans les champs.

Interrogés sur ces comportements des gardiens de vaches, les éleveurs défendent leurs chapelles. Ils affirment être confrontés aux problèmes de réduction des pâturages et à la disponibilité des aliments pour le bétail. Ils rejettent les accusations des agriculteurs selon lesquelles les gardiens sont de mèche avec eux. Toutefois, ils reconnaissent quelques manquements des gardiens. «Les gardiens ne sont pas mal intentionnés. Mais des fois, les vaches trompent leur vigilance ».

« Il faut une solution durable »

Des champs de maïs dans la plaine de la Rusizi

Gilbert Manirakiza, administrateur de la commune Rugombo, dit être au courant du conflit qui existe entre les agriculteurs et les éleveurs. Il précise qu’il a déjà reçu plusieurs plaintes des agriculteurs. Et de promettre de trouver une solution durable à ce conflit qui ne date pas d’hier. « Nous allons organiser des réunions à l’endroit des concernés pour éviter l’irréparable ». Et d’ajouter que les agriculteurs et les éleveurs sont complémentaires. «Ils sont obligés de cohabiter ».

Même solution du côté de Pamphile Hakizimana, administrateur de la commune Buganda. « Nous allons prendre à bras-le corps ce problème ». Toutefois, cette autorité communale met en garde les gardiens de vaches qui seront surpris en train de faire paître leurs troupeaux dans les champs. « Celui qui sera attrapé sera puni conformément à la loi et payera des dommages et intérêts ». Il conseille aux agriculteurs à ne plus se faire justice et les éleveurs de nourrir leurs vaches dans les étables pour éviter des ennuis avec les agriculteurs.

Quid de l’application de loi sur la stabulation permanente des bêtes ?

Interrogé sur les préparatifs en rapport avec l’application de la loi relative à la stabulation permanente et à l’interdiction de la divagation des animaux domestiques et de la volaille, Maxime Butoyi, vétérinaire dans la commune Buganda, indique que la loi sera effective dès 2021. Il reconnaît que ce mode d’élevage va mettre un terme aux conflits entre les agriculteurs et les éleveurs. « Il faut élever un nombre raisonnable de bétail ».
Et de préciser que les préparatifs vont bon train. « Des séances de sensibilisation sont menées régulièrement à l’endroit des éleveurs pour qu’ils gardent leurs bêtes dans les étables afin d’éviter ces querelles incessantes».

Les éleveurs, quant à eux, restent sceptiques quant à l’application de ladite loi. Ils évoquent le manque de moyens. . «La stabulation est possible pour un ménage qui dispose de deux ou trois vaches. Mais pour un éleveur qui a 50 vaches, où va-t-il trouver un domaine pour cultiver l’herbe pour son bétail ?, Où va-t-il trouver de l’argent pour acheter la nourriture pour son bétail » ; s’interrogent-ils ?

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